Son père, employé aux chemins de fer, rêve de le voir devenir ingénieur. Mais, ses études secondaires achevées et après deux années passées à l'Académie des arts décoratifs, Pabst choisit le théâtre. Il débute à Zurich en 1905 et joue en Allemagne à partir de 1907. De 1910 à 1914, il travaille comédien et metteur en scène au Théâtre allemand de New York. La guerre le surprend en France. Quatre années d'internement. De retour à Vienne en 1919, il dirige le Neuen Wiener Bühne. En 1921, avec Carl Froelich, il fonde la Froelich-Film. Il collabore aux trois premières productions de la société. Avec la quatrième, le Trésor (1923), commence sa longue carrière de réalisateur. Pabst est alors un homme de grande culture, un humaniste qui se situe politiquement à gauche, partagé entre germanisme et esprit européen, avec un caractère inquiet, vulnérable et contradictoire. C'est un créateur divisé entre raison froide et romantisme, lucidité et fascination. uvre typiquement expressionniste, qui n'est pas sans rappeler le Golem (Paul Wegener et Carl Boese, 1920), le Trésor révèle d'emblée deux constantes de l'univers pabstien : l'attirance mortelle des profondeurs géologiques ou psychiques , la transfiguration, grâce aux pouvoirs de la lumière, d'une réalité portée à l'incandescence par la passion. 1925 : Pabst inaugure le réalisme social allemand avec la Rue sans joie. Il aborde à chaud la terrible crise inflationniste de 1923 ; il ne farde rien de ses conséquences ; il souligne les rapports de classes qui lient sexualité et exploitation. Réalisme bien particulier cependant que celui de Pabst, qui trouve dans un expressionnisme contrôlé sa plus grande force d'accusation, mais aussi cette dimension trouble, ce « goût terrible et séducteur de la misère » que Mac Orlan qualifiera de « fantastique social ». Des films tournés entre 1925 et la fin du muet, on a dit justement qu'ils formaient une « suite freudienne ». La satire y rencontre le politique à travers les problèmes du sexe : les Mystères d'une âme (1926) traitent très suggestivement d'un cas d'impuissance étudié par Freud ; l'Amour de Jeanne Ney (1927), Crise (1928), Loulou (1929), Journal d'une fille perdue (id.) ces deux derniers surtout, illuminés par la personnalité magique de Louise Brooks modèlent le réalisme social sur la quête de l'amour fou.Le parlant venu, Pabst l'intègre sans débats à son écriture et passe avec une aisance remarquable du montage court au découpage en continuité, de l'effet visuel au contrepoint sonore. Bien que l'usage soit alors aux versions multiples, il réalise Quatre de l'infanterie (1930) et la Tragédie de la mine (1931) en version unique, bilingue. C'est l'apogée du réalisme pabstien ; là, l'expressionnisme lui-même (la part qui en subsiste, toujours distanciée) est au service d'une objectivité quasi documentaire. Tel n'est pas le cas toutefois de l'admirable Opéra de quat sous (id.) qui refuse de choisir entre fascination et leçon politique, ce qui vaudra au cinéaste un procès de la part de Bertolt Brecht. Comme s'il s'effrayait d'être allé trop loin dans l'engagement politique, « Pabst le Rouge », ainsi qu'on l'a surnommé, marque un premier recul : l'Atlantide (1932) n'est qu'une fable réussie. Peu avant l'arrivée au pouvoir des nazis, Pabst gagne la France. Le Don Quichotte (1933) qu'il y tourne sera le dernier film encore digne de son grand talent. Il réalise aussi un film à Hollywood : A Modern Hero (1934). Après quoi, avec des uvres mineures, parfois estimables, il s'insère dans le cinéma commercial français de l'époque ; il en adopte les formules et les traits dominants. 1939 : la Seconde Guerre mondiale éclate. Pabst, incompréhensiblement, rentre en Allemagne. Il y met en scène trois films, se gardant de céder aux exigences de propagande du régime. La paix revenue, il travaille à se disculper de ses démissions passées et s'adonne, en Autriche, en Italie, en Allemagne fédérale, à un cinéma de la mauvaise conscience (la Maison du silence, 1