La Terre et le Sang
Netflix

L’acteur revient sur La terre et le sang, gros succès sur Netflix France.

Vous voici dans un film Netflix. Le support de diffusion change-t-il quelque chose pour vous en tant qu’acteur ou cela ne fait-il aucune différence ?
Aucune différence, aussi bien dans ma démarche d’acteur que de spectateur. Je sais bien qu’il y a des polémiques par rapport aux salles de cinéma mais, en toute naïveté, j’ai la conviction que les supports sont complémentaires. Ca ne sert à rien de se battre contre des moulins à vent, le progrès est irréversible, il ne va que dans un seul sens. Souvenez-vous, il y a vingt ans, on prédisait cette révolution numérique qui allait bouleverser les financements, la chronologie des médias, etc. On y est.

 On a l’impression qu’il n’y a que sur Netflix qu’un pur film d’action français comme La terre et le sang peut aujourd’hui voir le jour.
Quand on a fait Braqueurs avec Julien, en 2016, je me souviens qu’il y avait beaucoup de frilosité, voire de réticences, autour du projet en France. Netflix ne s’est pas posé de questions : elle a acheté Braqueurs en 2018, qui est devenu un énorme succès sur ses plateformes étrangères -avant d’arriver en France l’an dernier. Quand il s’est agi de monter La terre et le sang, Netflix ne s’est du coup pas fait prier.

Depuis Braqueurs, Julien Leclercq vous fait transpirer à l’écran. Votre personnage dans Le terre et le sang, en mode survie pendant 40 minutes, est-il le plus physique que vous ayez joué ? 
Non, pas du tout ! (rires) C’était beaucoup plus éprouvant et intense sur Braqueurs. Julien a une maîtrise de l’image et de la technique dont il repousse sans cesse ses limites. Il entraîne tout le monde derrière lui, du directeur de la photo aux acteurs. Avec lui, il faut jouer collectif et ne rien lâcher.  

Votre premier grand rôle de ce type, c’était dans Nid de guêpes auquel La terre et le sang renvoie en raison de son unité de lieu et d’action. Y avez-vous pensé ?
De façon décousue. J’ai surtout pensé à Florent-Emilio Siri qui partage avec Julien le même amour du cinéma de genre. Tu les sens glousser de plaisir sur le plateau ! À l’époque de Nid de guêpes, Florent m’avait vraiment communiqué sa passion, moi qui venais d’un cinéma plutôt intello, assez éloigné du sien. Mais j’avais senti un véritable auteur, tout comme chez Julien. 

Critique de La Terre et le Sang

On pense aussi aux Grandes gueules de Robert Enrico qui orchestrait un affrontement sanglant dans une scierie, comme ici.
C’est une référence assumée, un pur exercice de style de la part de Julien. 

Vous jouez un personnage de dur à cuire qu’auraient joué Ventura ou Delon il y a quarante ans. Cette filiation vous parle ?
Ce sont de vrais personnages, des archétypes que j’adore incarner. Pour Braqueurs, le modèle c’était le Delon du Samouraï, cette fois c’est Ventura...

À part vous, Roschdy Zem ou Vincent Cassel, on ne voit pas beaucoup d’acteurs dans ce genre de rôle. Manque-t-on d’imagination ou y a-t-il un vrai déficit d’acteurs physiques en France ?
Chez les acteurs que vous citez et moi, il y a une maturité commune qui nous prépare à ça. Mais, prenons le contrepied de ce que vous dites : qui aurait pensé à moi il y a quelques années pour jouer ce Saïd ? Pas grand-monde. Il fallait qu’un auteur mette le doigt dessus, c’est toujours pareil. Personnellement, je verrais bien Benoît Magimel ou, parmi les plus jeunes, Gaspard Ulliel s’emparer de tels rôles.

La multiplication des plateformes de type Netflix va provoquer une explosion de l’offre de fiction et, par conséquent, de celle des rôles. Pensez-vous que cela puisse justement diversifier les profils des comédiens ?
Je ne sais pas quoi vous  répondre, sinon que ça va mettre un grand coup de pied dans la fourmilière ! J’espère que ça créera une dynamique.

Vous avez tourné votre premier film, La Thune, il y a bientôt trente ans. Quel regard portez-vous sur votre carrière ?
Quand on a le nez dans le guidon, on ne réfléchit pas trop, on enchaîne. J’ai eu la chance de démarrer à une époque où il y avait un vrai vivier d’auteurs dans le cinéma français dont la vigueur était redevable à Canal+. Sans avoir jamais été réellement bankable, comme on dit, j’ai mené mon chemin modestement, en multipliant les rencontres enrichissantes.

On parlait de votre copain Roschdy Zem, devenu cinéaste. Ça ne vous a jamais effleuré la mise en scène ?
Ça m’a plus qu’effleuré mais je ne l’évoque plus car j’ai fait des tentatives que je n’ai pas su mener à bout. Roschdy m’avait d’ailleurs dit que j’avais abdiqué trop vite, que les financements étaient toujours compliqués. Dès que quelque chose se concrétisera, je vous en parlerai avec plaisir.
 

La terre et le sang, disponible sur Netflix