17 ans après sa sortie, l’autre-chef-d’oeuvre de Satoshi Kon, réalisateur de Perfect Blue et Paprika, trouve enfin le chemin des salles françaises.
Pour imaginer à quoi ressemble Millennium Actress, ce grand mélo cinéphile animé qui aura réclamé trois ans de labeur à l’un des plus grands animateurs nippons, il faudrait envisager un cross-over impossible entre Abattoir 5 (le voyage dans le temps et la mémoire) et Titanic de James Cameron. Le chef-d’œuvre de Satoshi Kon (enfin, l’autre chef-d’oeuvre du cinéaste disparu en 2010, avec Paprika et Perfect Blue) débute par l’arrivée de deux journalistes chez une vieille actrice japonaise. Comme dans Citizen Kane, ils cherchent à comprendre ce que recèle un objet mystérieux. Ici, une clé qui semble être un objet essentiel dans la vie et la carrière de cette femme. Elle ouvre en fait les portes de sa mémoire et du récit qui va faire défiler ses souvenirs matérialisés sous la forme de séquences de tournage, d’extraits de films (on reconnaît des classiques d’Ozu ou de Kurosawa) et de scènes de la vie réelle de la comédienne…
Sublime portrait de femme, parabole mélodramatique et formidable fresque romanesque sur la grandeur et la décadence du cinéma japonais, Millennium Actress est un kaléidoscope narratif hypnotique, à la fois digne des plus beaux Resnais, mais trop local et trop codifié pour vraiment séduire l’Occident. C’est sans doute ce qui explique que Dreamworks, détenteur des droits mondiaux, l’ait torpillé dans son propre pays (le film resta deux semaines à l’affiche d’une salle tokyoïte) et jamais vraiment montré ailleurs -un DVD zone 2 était apparu en 2006 avant de disparaître aussitôt, et passait de mains en mains entre connaisseurs. Un chef-d’oeuvre méconnu, donc, jusqu’à aujourd’hui, 18 décembre 2019, où Millennium Actress sort en salles françaises. Enfin.
Commentaires