Angoulême 2024- Jour 5
Pyramide/ Wild Bunch/ ARP

Bilan quotidien de la 17ème édition du festival du film francophone d’Angoulême

Le film du jour : Vingt dieux de Louise Courvoisier

Louise Courvoisier est venue en famille pour présenter en compétition ce qui fut un des coups de foudre du dernier festival de Cannes, d’où il est reparti avec le Prix de la Jeunesse après sa présentation dans la section Un Certain Regard. Sa vraie famille : sa mère et son frère qui ont composé la BO de ce Vingt dieux. Et la famille de cinéma qu’elle s’est créée avec ce film où elle ne s’est entourée que de comédiens non professionnels qui, de fait, font leur baptême du feu sur grand écran. Une bande festive qui, comme sur la Croisette, a offert l’une des propositions les plus singulières de ce festival (dont il apparaît avec Rabia de Mareike Engelhardt et Barbès, little Algérie d’Hassan Guerrar comme l’un des grands favoris pour figurer au palmarès) par la capacité de sa réalisatrice à dynamiser sa fiction par une dose de docu vibrant.

On y suit Totone, un ado de 18 ans, fêtard, insouciant, qui se voit tragiquement rattrapé par la réalité. La mort de son père va l'obliger à trouver de l'argent pour pouvoir rester vivre à la ferme avec sa petite soeur. Pour cela, il se met en tête de remporter le concours... du meilleur comté de la région ! Dans cette coming of age story, en parallèle de l'apprentissage de la fabrication du fromage, Totone découvre le désir et surtout l'amour physique dans les bras d'une jeune agricultrice. Louise Courvoisier filme la ruralité avec une rare justesse. Son film est lumineux, joyeux, exalté, malgré tous les obstacles placés sur la route de son jeune héros. Et sa bande de comédiens est littéralement irrésistible. Un Petit paysan à la sauce Dumont, la foi en l'humanité en plus !

Sortie le 11 décembre

Vingt dieux - Affiche
Les Films du losange

 

Le trio du jour : Valeria Bruni-Tedeschi, Félix Lefebvre et Lubna Azabal dans Une vie rêvée

La famille inspire décidément Morgan Simon. Dans son premier long, Compte ses blessures, il était question d’une relation père-fils. Et avec Une vie rêvée, il s’agit encore d’un fils mais confronté à une mère trop donc mal aimante. Quelqu’un qui a toujours jonglé avec les galères de fric avant qu’ils finissent par la rattraper, privée de chéquier et de carte bleue à la veille de Noël. La goutte d’eau qui va faire imploser cette relation (trop) fusionnelle.

On pourrait reprocher à Simon d’arpenter des sillons déjà beaucoup explorés par le cinéma français. Mais il réussit à s’en échapper en introduisant un troisième personnage venant bousculer le duo. La patronne du bar du quartier de son héroïne. La première capable de voir la femme derrière la mère, de porter sur elle ce regard perçant et troublant qui va la réanimer et casser la dynamique du récit.

Valeria Bruni- Tedeschi, Félix Lefebvre et Lubna Azabal (doublement à l'honneur dans cette compétition angoumoisine avec Rabia) interprètent ces personnages finalement ciselés et si riches en paradoxes. Et ils justifient à eux seuls, par leur justesse et le bonheur à jouer ensemble qui traverse l’écran, la découverte de ce film, dès mercredi en salles.

Sortie le 4 septembre


 

La révélation du jour : Julien Menanteau pour Lads

Le monde des courses de chevaux a été très peu traité pour le cinéma français et quand ce fut le cas (du Gentleman d’Epsom de Grangier à Turf d’Onteniente), le prisme choisi a toujours été celui du parieur ou des entraîneurs. Issu d’une famille de cavaliers (mais sans jamais avoir monté lui-même), Julien Menanteau s’en empare ici en changeant d’angle. Il prend celui des lads, qui donne son titre à son premier long métrage de fiction : ces apprentis jockey qui en constituent la face cachée en sachant que sur cent d’entre eux qui s’engagent dans une formation sport-études pour en faire leur métier, un seul touchera le Graal. Ils forment la classe ouvrière de ce milieu, acceptent de trimer comme des chiens en quête, souvent, d’un ascenseur social car ils sont majoritairement issus de milieu défavorisés.

Venu du documentaire, Menenteau porte un regard précisément extrêmement documenté sur ce monde méconnu mais révèle aussi ici un vrai sens de la fiction, un goût pour le romanesque. Et ce à travers le destin mouvementé de son jeune héros, découvrant le monde des courses avec une passion qui va de pair avec la frustration qu’il ressent au fur et à mesure de son ascension de jockey quand il comprend qu’il court certes pour gagner mais d’abord et avant tout comme un pion qui sert avant tout les intérêts de ses patrons et ceux qui les financent. Et dans ce rôle, Marco Luraschi, doublure de François Civil pour toutes les scènes à cheval des Trois Mousquetaires et qui jouait Pierre Durand/ Guillaume Canet jeune dans Jappeloup, épate pour sa vraie première grande composition sur grand écran.

Sortie le 19 mars 2025