Universal Pictures International

Tentative de réhabilitation d’une figure mal-aimée du christianisme, croquée comme une figure proto-féministe dans ce film-sermon assommant.

Pâques approche, et les films religieux sont de sortie. En attendant l’arrivée sur les écrans la semaine prochaine de Paul, apôtre du Christ (avec Jim Caviezel – le Jésus de Mel Gibson – dans le rôle de Saint Luc !), voici Marie Madeleine. Le récit de la vie de l’une des premières disciples du Christ, longtemps assimilée à une pècheresse, mais peu à peu réhabilitée par l’Eglise et dépeinte ici en figure proto-féministe. A temps pour résonner avec le mouvement #MeToo, donc, mais néanmoins empêché pour l’instant de sortie aux Etats-Unis – le film devait être distribué là-bas par la Weinstein Company. Le casting assemblé autour du couple star Rooney Mara / Joaquin Phoenix fleure bon l’euro-pudding des familles : Denis Ménochet, Tchéky Karyo, Ariane Labed, Tahar Rahim, Chiwetel Ejiofor, Jules Sitruk… Le réalisateur Garth Davis, lui, avait déjà démontré dans la première saison de Top of the Lake (qu’il a co-signé avec Jane Campion) et dans Lion (son film à Oscars sur un enfant égaré entre l’Inde et l’Australie) un réel talent pour saisir des paysages majestueux, et c’est encore ce qui frappe ici – l’arrivée de Jésus et ses apôtres à Jérusalem est un moment vraiment impressionnant. Mais au-delà de sa force “topographique”, le film apparaît sans vie, terriblement mou, baignant dans une atmosphère sinistre, jamais illuminé par la présence tristounette de Rooney Mara.

Jésus Christ est un hippie
Dans le rôle de Jésus, Joaquin Phoenix était supposé être l’autre grosse attraction du film. A quoi allait bien pouvoir ressembler l’interprète de Johnny Cash en fils de Dieu ? Le seul authentique hippie du ciné US en prophète de Nazareth ? Phoenix joue le Christ comme un musicien psychédélique en plein retour d’acide, roulant des yeux, marmonnant ses répliques, l’air de planer à quelques centimètres au-dessus du sol. Une perf’ intrigante, mais constamment reléguée en marge du cadre et du récit. C’est finalement Tahar Rahim qui livre l’interprétation la plus convaincante de l’ensemble, héritant du rôle toujours payant de Judas (remember Harvey Keitel dans La Dernière Tentation du Christ), qu’il joue comme un fan déçu par son idole. Il est le seul à faire passer un semblant de vie dans ce livre d’images pieuses. Pour voir un vrai bon film de Joaquin Phoenix, attendre plutôt la sortie de Don’t worry, he won’t get far on foot la semaine prochaine, où l’acteur est un autre JC touché par la grâce (le dessinateur John Callahan), mais loin d’être un saint.