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Dans le paysage cinématographique français, il n’y a bien que Quentin Dupieux pour oser faire un film sur un pneu psychopathe amoureux d’une humaine… C’est gonflé et on aime ça. Loin du copier-coller des recettes hollywoodiennes ou de la soupe que l’on nous sert sur grand écran depuis trop longtemps, Rubber est rafraîchissant en tout point. Le challenge pour le critique est alors de vous donner envie d’aller voir cet ovni sans en dire trop et vous gâcher la surprise. Comédie ? Thriller ? Road movie ? Romance ? Le film de genre à la sauce Dupieux c’est 1h20 en roue libre avec une image issue d’un appareil photo numérique et un acteur principal hors du commun. En bref, Rubber c’est un gros délire qui ne redoute pas la crevaison.
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En surface, le mélange de raideur théorique et de divertissement parodique de Rubber revisite tout un pan de la mythologie cinématographique américaine et lance, entre autres, des clins d’oeil appuyés à Psychose et au Zombie de Romero. En profondeur, il cherche à déjouer les attentes d’un public gavé de malbouffe filmique. Si le surréalisme de Dupieux impose que l’on vienne à lui, son humour déjanté et son rejet du commercialement correct forcent le respect.
Toutes les critiques de Rubber
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Il n'y a aucune raison d'aimer Rubber. C'est pour ça qu'on l'adore.
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Une vraie bizarrerie. La photo est assez unique, le film ayant été réalisé avec un appareil photo muni d'un mode caméra. La définition très "numérique" et les flous intenses rendent l'ensemble encore plus singulier.
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L'arty Quentin Dupieux prouve qu'en termes d'esthétique, il sait créer son propre univers, un no man's land venu du fin fond du monde. Mais trop en dire serait outrageux : Rubber est un film gonflé, qui marche comme sur des roulettes, ne tourne pas rond et pneu importe la vraisemblance du tout : allez le voir !
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Armé d'un appareil photo numérique Canon 5D Mark II pourvu d'une fonction vidéo très satisfaisante, Dupieux a visiblement bénéficié d'un tournage si léger qu'il en devient poreux au réel, ceci précisément parce que les artifices sont montrés comme tels. Il peut alors filmer la naissance à la vie de son pneu comme un documentaire animalier qui place le spectateur (nous), dans un contrat de croyance que plus rien ne viendra entamer (ok, c'est bidon, alors pourquoi ne pas jouer quand même le jeu et accepter la personnification d'un pur objet inerte ?) Ce jeu avec le spectateur est peut-être ce qu'il y a de plus réjouissant ici, tant il réinvestit le plaisir de simplement voir, et d'attendre, fébrile, qu'il se passe quelque chose, bref, de tout accepter.
Cette manière de s'inventer comme un work-in-progress donne au film toutes les excuses, lui permet de se chercher, d'autant qu'il laisse vraiment le spectateur participer, comme ses doubles à l'écran, à l'élaboration sauvage d'un film qui manque chaque fois de se défaire sous ses yeux. Rubber veut finir et semble ne jamais pouvoir le faire, mais finit quand même par trouver la sortie en laissant entrevoir sa suite : le pneu se réincarne en tricycle et lève une armée de ses congénères à l'assaut des collines d'Hollywood. Qu'il poursuive sa route là-bas ou ailleurs, nul doute en tout cas qu'on n'a pas fini de suivre le cinéma de Dupieux. -
Saisie dans un désert baigné de taches de soleil huileuses, typique de l'esthétique western de Dupieux, la partie « pneumatique » de Rubber, convainc plus que l'attirail théorique accolé à ce revenge-movie californien. Comme s'il ne croyait pas complètement à son idée farfelue, ou qu'il voulait s'en dédouaner, Dupieux intègre systématiquement un commentaire méta-critique à son récit, l'annulant à mesure qu'il progresse via les séquences de mises en abyme avec les spectateurs : fausseté du spectacle, clins d'œil potaches, etc. La croyance en Robert le pneu vengeur s'en trouve amoindrie.
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Rubber est peut-être son film le plus théorique, opérant - nous l'avons dit - une mise en abîme directe du spectaculaire, tout en développant à travers les exploits de cet être en caoutchouc, la science du no reason. Une science qui élève l'absurde au rang des beaux-arts et permet, en début et en fin de parcours, une tirade jouissive. Ce joyeux bordel est dangereusement rythmé aux sons électroniques et atmosphériques de Mr Oizo, alias Dupieux himself, et Gaspar Augé, la moitié de Justice. Courez voir l'objet intelligent que voilà ! Jouissif.
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Le plus du film : Hé bien c’était déjanté, drôle, original. Percutant. On a beaucoup rigolé. Certaines répliques sont hilarantes et les comédiens très bien dirigés. Les fans des séries B jusqu’à Z adoreront cette comédie macabre, mâtinée de polar, tout en subtilités pittoresques.
Le moins du film : Une chouette idée de court-métrage ne donne pas forcément un très bon long. Au bout d’un moment, cette histoire de pneu tueur tourne un peu en rond, et les mises en abymes successives ne font que souligner le peu d’épaisseur dramaturgique du film. -
Road movie aussi déjanté que son héros, « Rubber » est une comédie de l’absurde baignée d’humour noir, un film un chouia gore, une histoire d’amour. Premier défi, gagné : donner vie et personnalité à un héros aussi inexpressif qu’un pneu. Le second : ne pas donner d’explications. Ce à quoi nous engage un prologue hilarant : pourquoi E.T. est-il marron ? Pourquoi, dans « Love Story », les personnages tombent-ils amoureux ? Etc. Parce que. No reason. Tourné avec un appareil photo numérique, ce film inclassable à la photo superbe se dote aussi d’une philosophie : du pneu amoureux ou en colère ou de ceux qui se délectent de ses massacres, qui est le plus humain ? Le voyeurisme rend fou et peut coûter cher.
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par Yann Lebecque
Privé de toute surprise, puisqu'est annoncé dès le départ que ce à quoi nous allons assister est aléatoire et insensé, Rubber s'étire alors en longueur, nous laissant spectateur d'un métrage à la trop belle image, chaque cadrage recherché servant à souligner l'inanité de l'ensemble (...) L'ennui gagne rapidement sur l'intérêt, et le seul tour de force du film est de faire paraître cette petite heure et demie horriblement interminable.
Ce vaste gag, versant obscur de l'aimable Bibendum, n'en reste pas moins poliment potache.
Dupieux maîtrise les codes du road-movie et du film de serial-killer qu’il désosse joyeusement. Il fait d’un archétype de policier ricain un théoricien de l’absurde, matérialise public et critique par une foule de gens debout en pleine nature observant l’action à travers des jumelles et signe une mise en abîme stylée, hypnotique et très drôle sous couvert de film de genre blagueur. Entre Buñuel, Blier, Monte Hellman et les Monty Python, « Rubber » est une « éclate » qui ne se dégonfle jamais.
Cette histoire absurde, le Français Quentin Dupieux (« Steak ») — alias le DJ et producteur musical Mr Oizo — la raconte au premier degré, testant à chaque instant la croyance du spectateur : va-t-il gober ça? La réponse est oui.
Expérimental, drôle, bancal, tantôt bluffant, tantôt vain, « Rubber » se révèle franchement déconcertant. Et gonflé.
Intégralement tourné avec un Canon EOS 5D Mark II, Rubber prouve par ailleurs que l’on peut tourner un long-métrage avec un appareil photo. Visuellement, il offre en effet des plans fabuleux (les couchers de soleil) et une intéressante profondeur de champ. Hélas, si on se souviendra de Rubber comme l’un des premiers (le premier ?) films réalisés avec un APN, on risque de très vite oublier cet exercice de style qui se regarde le nombril. Pour son prochain, on espère que Dupieux tranchera et plongera la tête la première dans la fiction. Steak et certaines images de Rubber ont prouvé qu’il avait un vrai sens du cinéma.
Connu pour ses talents de musicien électro sous le surnom de Mr. Oizo et pour sa créature, la peluche jaune Flat Eric, Quentin Dupieux avait déjà réalisé un premier film barré : Steak, en 2007, sorte de Grease passé à la moulinette de Massacre à la tronçonneuse, où il n'y avait, bien sûr, aucun steak, mais les comiques Eric et Ramzy. Ici, le petit malin va encore plus loin dans le non-sens. « Pourquoi, dans le film JFK, le président des Etats-Unis est-il assassiné par un inconnu ? » « Pourquoi, dans Massacre à la tronçonneuse, personne ne va jamais aux toilettes ? » « Pourquoi, dans Love Story, les deux personnages tombent-ils amoureux ? » : autant de questions, posées très sérieusement, face caméra, par le shérif (poilant Stephen Spinella) au début du film. « No reason. » Pourquoi un pneu télépathe ? Pas de raison non plus si ce n'est une mise en abyme surréaliste et facétieuse du cinéma, à la fois comme mensonge et comme miroir déformant : dans le film, une bande de spectateurs passifs suit avidement les méfaits du pneu avec des jumelles, avant de se jeter comme des zombies sur un repas empoisonné et... en mourir. Rubber ou un épatant dérapage contrôlé.
Radiale et radicale, cette comédie à l'humour aussi noir que la gomme d'un Michelin est une curiosité qui, malheureusement, ne tient pas la route. Ça démarre sur les chapeaux de roue d'un surréalisme goguenard, mais la bonne idée de départ est un peu courte pour un long-métrage. Le film finit par tourner en rond puis par se dégonfler.
Troisième long métrage du musicien Quentin Dupieux plus connu sous le nom de Monsieur Oizo, Rubber mélange ainsi la parodie et l'absurde, avec une petite dose de mise en abyme et de réflexion sur le spectacle lui-même, dimension symbolisée ici par un groupe de spectateurs coincés dans le désert et assistant aux exploits du pneu tueur et les commentant.
Entre dessin animé et détournement surréalisant, Rubber est une curiosité conceptuelle et nonsensique à la fois.