Toutes les critiques de Rien à foutre

Les critiques de Première

  1. Première
    par François Léger

    Cassandre, 26 ans, hôtesse de l'air dans une compagnie low-cost, vit au jour le jour au rythme des vols, des escales, des sourires forcés aux passagers, des cuites en boîtes de nuit et des rendez-vous Tinder d’un soir. Un quotidien sans passé et sans lendemain, une fuite en avant perpétuelle qui ressemble à s’y méprendre à une anesthésie générale. Rien à foutre, donc. Très beau titre de film - qui marche aussi bien en anglais : Zero Fucks Given - pour ce premier long signé Julie Lecoustre et Emmanuel Marre. Depuis les coulisses pas très réjouissantes de l'aviation à bas coûts (qui n’ont jamais été filmées aussi crûment), le duo dresse un portrait générationnel drôle et mélancolique, construit sur une réalisation à la frontière du documentaire (beaucoup d’improvisations et d’acteurs non-professionnels). Procédé efficace qui rend justice au travail impressionnant d’Adèle Exarchopoulos, comme plongée dans son monde intérieur, incarnant en sourdine le bouillonnement d’une crise existentielle. Chaque sourire ou hésitation est un indice de plus pour tenter de percer le mystère de Cassandre, vide de sens et ayant renoncé à peu près à tout. Le film aurait pu (dû ?) en rester là, mais la jeune femme sera bientôt rattrapée par la patrouille dans une deuxième partie beaucoup plus convenue, où un traumatisme originel dont on se serait volontiers passé est dévoilé. Rien à foutre, ou presque : le plan final, solaire et malin dans son cadrage, rattrape aisément ces quelques erreurs de parcours.