La série dystopique tourne en rond, revient sur ses pas, hésite et Elisabeth Moss ne sait plus quelle grimace faire pour jouer la souffrance sacrificielle.
Bien sûr que The Handmaid's Tale a été une grande série. Evidemment qu'elle a mérité ses nombreux prix et qu'Elisabeth Moss nous a retourné le bide, au fil d'une allégorie brutale des dérives de notre monde, de plus en plus extrême et puritain. Mais ça fait aussi un bon moment que The Handmaid's Tale a perdu sa force originelle. En fait, depuis qu'elle a dépassé le livre de Margaret Atwood (à la fin de la saison 1), la série est sur le déclin. Saison après saison, l'écriture faiblit et la narration se fait plus fragile. Pourtant, après la conclusion haletante et prometteuse de la saison 3, on espérait que le drama allait enfin franchir un cap avec la saison 4 (à voir en France à partir du 29 avril sur OCS Max). Malheureusement ce n'est pas le cas. Au fil des trois premiers épisodes qui nous ont été donnés de voir, l'histoire de La Servante écarlate laisse la désagréable impression de faire du surplace. Pire encore, elle sonne par moment comme un éternel recommencement éreintant. Attention spoilers !
On y retrouve June à Gilead, blessée, mais secourue par ses camarades servantes en cavale. Après qu'elle a réussi son coup en faisant évader une centaine d'enfants vers le Canada, l'ancienne esclave de Fred est devenue l'ennemie public n°1 de la théocratie. La milice de l''Oeil est à sa recherche. Alors elle se planque dans une ferme isolée, chez la toute jeune Épouse d'un vieux Commandant dépassé. La petite Mrs Keyes (Mckenna Grace) n'a que 14 ans mais elle a déjà subi les pires violences sexuelles. Elle est prête à aider June dans son opération résistance, qui va rapidement tourner au fiasco...
Parce que les auteurs de The Handmaid's Tale n'osent pas toucher au cadre. Ils refusent de renverser la maison. Ils ne veulent pas faire de June une combattante révolutionnaire, hésitant ostensiblement à passer au chapitre suivant naturel de l'histoire, c'est à dire celui du réseau souterrain capable de faire vaciller Gilead. C'est évidemment ce que tout le monde attend (depuis un moment déjà). Et peut-être qu'on y arrivera avant la fin de la saison 4. Mais en attendant, au bout de trois heures, force est de constater que la série s'obstine dans son carcan dystopique, où la souffrance humaine sert de spectacle principal. Elle tourne en rond, tergiverse et revient même carrément sur ses pas quand June se fait arrêter... et torturer pour la énième fois ! De grimaces suppliquantes en regards furibonds, Elisabeth Moss sort ses plus beaux visages déformés face à Tante Lydia, pour jouer une forme de passion expiatoire usée jusqu'à la corde.
À force de procrastination, la narration s'embourbe. La réalisation aussi. Et certains twists apparaissent de plus en plus improbables (toute la partie avec Nick a de quoi laisser perplexe). La série est comme coincée. Comme comprimée par une obligation de choquer. Avec ses châtiments incessants infligés aux femmes, The Handmaid's Tale a perdu toute ambition de divertissement. Voire d'émotion. Et au passage, toute capacité à interpeller l'opinion. La série n'a plus grand chose de nouveau à dire et de toute façon, le message ne passe plus.
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