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Vite, toujours plus vite. Arboré par la Corée du Sud depuis trente ans, ce leitmotiv économique n’est pas sans risques. En témoigne la tragédie du Sewol, ferry surchargé dont le naufrage a coûté la vie de plus de 300 personnes en 2014. La déshumanisation de ce capitalisme effréné a récemment inspiré un film de zombies (Dernier Train pour Busan). Kim Seong-hun choisit l’option plus réaliste du film catastrophe. Un automobiliste se retrouve brutalement enseveli sous un tunnel. L’accident déclenche un tsunami émotionnel entretenu par les médias. Mais à mesure que l’opération de sauvetage s’éternise – très coûteusement – vient sourdre une cruelle question : la vie de cet unique survivant mérite-t-elle d’être sauvée ? Le réalisateur de Hard Day répond par une satire politique efficace (bien que peu subtile), tout en ruptures de tons, mais surtout par l’empathie qu’il parvient à susciter pour son héros captif, jouant avec brio de la gestion de l’espace exigu, à la fois visuellement (gros plans étouffants) et acoustiquement (chaque caillou a sa note). Aussi impressionnantes que sporadiques, les scènes d’action semblent presque secondaires. Le cinéaste leur préfère les détails d’apparence plus anodine : ici, la présence incongrue de fluides corporels dans le cadre policé d’un blockbuster, là, un tapis roulant obligeant l’épouse du héros à marcher à reculons pour visionner le journal télévisé – avec l’idée d’une vie désormais condamnée au surplace. Une puissante fable humaniste.