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Le tableau est potentiellement désespérant, mais Solondz l’anime en reprenant son astuce de Palindromes, qui consiste à faire jouer un même rôle par différents acteurs. Ici, Michael Kenneth Williams a pris la place de Philip Seymour Hoffman, Ciarán Hinds a remplacé Dylan Baker, etc. On peut s’amuser à imaginer le même film avec les interprètes d’origine mais, au fil du temps, les personnages ont évolué, et leur nouvelle apparence reflète leur état d’esprit actuel. L’hypothèse se justifie parfaitement en ce qu’elle convoque la mémoire du précédent long métrage, tout en laissant cette suite affirmer sa propre identité. Life During Wartime est l’un des meilleurs films de Solondz, qui a mis une sourdine à la rage sarcastique qui avait tendance à se retourner contre ses personnages, les privant de crédibilité et parfois de dignité. Ici, ils apprennent à surmonter leur dégoût d’eux mêmes et, malgré la noirceur générale, on rit beaucoup.
Toutes les critiques de Life During Wartime
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Bienvenue dans l’Amérique des années Bush avec cette peinture sans fard d’Américains moyens, erratiques et frustrés, alternant autoflagellations, justifications vaseuses, vacheries feutrées, logorrhées absurdes. « Pardonner et oublier » est le leitmotiv : plus facile à dire qu’à faire quand les fantômes du passé se rappellent avec force, quand les fautes des parents bouleversent les enfants… La mise en scène élégante, l’humour - car on rit souvent - qui désamorce la noirceur du propos, la force des acteurs (de Charlotte Rampling, femme meurtrie et brutale au jeune Timmy, envahi de frayeurs et de doutes) dénudent l’être humain dans sa fragilité et sa monstruosité ordinaire.
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La « guerre » dont parle Todd Solondz est celle que chacun mène, aux Etats-Unis et ailleurs, pour survivre en milieu hostile.
Sa vision sans concession du monde moderne dans lequel se débattent des êtres fragiles témoigne d'une lucidité féroce. Le réalisateur prend ses sujets à la hussarde pour aborder des thèmes comme la religion, la mort ou la pédophilie. Charlotte Rampling ou Paul Reubens se sont mis au diapason de sa musique grinçante. Ce bonheur de causticité et d'insolence dérange parce qu'il renvoie impitoyablement le spectateur à ses propres faiblesses . Solondz rappelle que faire de son mieux n'est pas toujours suffisant pour s'en sortir. C'est en ne faisant aucun effort pour se rendre aimable que son cinéma se fait aimer.
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Avec ses discrètes références judéo-américaines, le film cristallise le marasme général d'une communauté qui a perdu ses référents, et qui s'étiole dans la misère d'une vie par procuration. Life During Wartime montre, à ce titre, la phase terminale d'un processus dont le loufoque A Serious Man, des frères Coen, diagnostiquait les premiers symptômes durant les années 1960.
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Curieux projet donc, qui intrigue au premier abord et entraîne deux types de sentiments contradictoires : soit la déception devant le manque d’inspiration d’un cinéaste qui n’avait pas donné de nouvelles depuis six ans, soit l’admiration devant l’illustration de cette fameuse légende cinéphile qui veut qu’un véritable auteur ne fait que tourner inlassablement le même film. Finalement peu importe ces deux sentiments puisque le film existe par lui-même et ne nécessite pas le fait d’avoir vu la première œuvre. Le plus important c’est que le cinéma de Todd Solondz ne change pas et continue de faire du bien. Sous des apparences toujours rêches et austères, se cache un petit bijou de comédie vacharde sur les névroses de l’Amérique. La loupe grossissante du cinéaste découvre les tabous, explose les barrières morales et libère le langage (la présence, au détour d’un plan, du « Festin nu » de Burroughs n’est pas anodine) afin d’exposer dans leur nudité la plus crue l’hystérie et l’hypocrisie maladives dont souffrent nos cousins américains. Les personnages sont clairement des archétypes qui s’aiment et se déchirent avec la même violence comme des pantins sado maso. Le principe est simple mais terriblement efficace : grossir le trait, exagérer, pour mieux dénoncer le refoulement et le paraître qui rongent les individus. Cette propension américaine (attention, d’autres civilisations peuvent être concernées) à rechercher la normalité à tous prix, à gommer et taire les tares, est admirablement disséquée par Solondz, comme dans tous ses films précédents.
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Cette générosité toute neuve rend encore plus féroce la brève rencontre, dans un bar, du père pédophile avec une femme vieillissante, en quête de sexe : Charlotte Rampling, étonnante, impressionnante. Comme les trois soeurs, cette femme cherche un homme « normal » et, dans son esprit, ça veut dire pas gay. Comme les trois soeurs, elle est un monstre, mais elle le sait. Elle l'accepte même, avec une morgue égale au mépris qu'elle se porte. Sans remords, ni regrets. « Seuls les perdants demandent pardon, c'est ça ? » lui demande celui qu'elle drague. « Seuls les perdants s'attendent à l'obtenir », lui réplique-t-elle. Voilà. Tout est dit.
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Un fois encore, Solondz entraîne son auditoire dans l'observation mélancolique, un brin sadique et très drôle, d'un monde à la dérive, comme un laborantin qui prendrait plaisir à regarder des bactéries s'entre-tuer sur la lame de son microscope électronique.
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Pour passer de l'âge « ingrat », celui du mensonge et de l'hypocrisie, à l'âge adulte et devenir un « Mensch », tous doivent crever un abcès. Un peu à l'image de Solondz qui livre ici un film plus personnel qu'à l'accoutumée, moins corseté. Plus profond aussi, explorant notamment sa judéïté avec un humour teinté de mélancolie, un peu comme les Coen qui, eux aussi souvent retranchés dans leur ton sarcastique, ont pu le faire dans leur récent A Serious Man. S'il n'a pas gommé tous ses défauts, et notamment son penchant un peu crispant pour la provoc-choque bourgeoise (pédophilie : oh le gros tabou !), le cinéaste les a au moins atténués en s'autorisant enfin une véritable tendresse pour ses personnages. Et ce, sans perdre en causticité - car on rit beaucoup dans Life During Wartime, et jaune, évidemment.
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Succession de vignettes-chocs (auxquelles il manque peut-être une véritable unité), le film est une sorte de sitcom empoisonnée. Toutefois, si le cinéaste n’a rien perdu de son redoutable sens de l’observation, le ton a changé : moins provoc, plus désespéré. Le 11-Septembre est passé par là. Internet aussi. Et l’Amérique selon Solondz marche plus que jamais sur la tête.
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Todd Solondz révèle ici la tragédie d’une famille écrasée par un idéal de "normalité" alors qu’elle se dégoûte elle-même. Fidèle à l’esprit décapant de ses films précédents – Happiness, Palindromes – sa chronique est aussi celle d’une Amérique peu encline à s’avouer ses vices et à surmonter ses peurs, prisonnière. Ajoutez à cela le plomb des attentats du 11-Septembre et des guerres qui ont suivi, c’est une atmosphère pesante et limite asphyxiante qui exsude de chaque plan. Mais occasionne, aussi, des scènes hilarantes défendues par des comédiens aussi tordus que brillants.
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Ce sont bien les seuls êtres à ne pas prêter à ricaner ici – ils sont pathétiques au sens fort –, et par-là même poignants. Cette exception mise à part, Solondz est loin de son modèle potentiel, Robert Altman, qui pouvait aller très loin dans la satire, mais dotait ses personnages d’une forme de libre arbitre et ne négligeait jamais d’introduire des nuances, voire de la poésie, dans son regard impitoyable et juste sur ses contemporains.
Revoir Shortcuts, à la fois tendre et cynique ; certes pas toujours aux mêmes moments. Il y a un monde entre Les Caractères de La Bruyère et le sarcasme gratuit. -
Une fois passée la curiosité amusée suscitée par le procédé, on se dit très vite que l'original valait beaucoup mieux que cette copie un peu vaine, dont l'absolue noirceur n'est pas non plus inédite. Face au pessimisme têtu de Todd Solondz, on passe notre tour.
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Le problème, c'est qu'on ne voit pas en quoi ces histoires renouvellent la peinture de la société américaine réalisée il y a plus de dix ans. Le film sent le réchauffé et manque cruellement de sel, en l'occurrence l'humour au vitriol de Solondz.