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Il y a trois ans, Belle Épine avait révélé en Rebecca Zlotowski un tempérament de cinéaste encore sous influence. Elliptique et impressionniste, ce portrait d’une jeune fille livrée à elle-même, incapable de communiquer normalement, payait un peu trop clairement son tribut à la Nouvelle Vague et à Pialat. Sur la forme, Grand Central ne dépare pas mais va plus loin : l’énergie de la mise en scène immersive (beaucoup de plans à la caméra portée, une musique hypnotique de Rob) est amplifiée par le caractère fonceur du héros, du moins au début. Car plus le film avance, plus la dérive de Gary s’accentue et plus le rythme devient staccato. La réalisatrice fait preuve d’une grande cohérence dans ses choix esthétiques, qui s’inscrivent dans la logique de cette histoire complexe où s’entremêlent de façon vibrante et incertaine la tragédie, le suspense et le désir. S’il fallait rapprocher Grand Central de quelque chose, ce serait du cinéma de Claire Denis dans cette fascination commune pour la virilité, dont est extraite la part puérile, violente et morbide. Rebecca Zlotowski filme magnifiquement les corps imparfaits (consciencieusement lavés avant et après chaque tâche) de ces hommes solidaires, plongés dans l’enfer d’une centrale nucléaire où la moindre surdose de radiations peut entraîner, au mieux, l’arrêt du travail et donc le chômage ou, au pire, une mort programmée. Toutes ces scènes dans la centrale créent des pics d’intensité dramatique qui accompagnent la lente fuite en avant de Gary, personnage ô combien romanesque, comme en témoigne son patronyme, Manda, semé tel un indice au début du film. Manda, les cinéphiles le savent bien, c’est dans Casque d’Or le nom de Serge Reggiani, prolo magnifique amoureux de Marie (Simone Signoret), une prostituée qui appartient à un autre et qui sera le déclencheur de son destin tragique. Karole, elle, n’exerce pas le plus vieux métier du monde mais s’offre facilement aux hommes, qu’elle séduit instantanément avec ses shorts et ses chandails moulants. « Si je te dis la vérité, tu vas pas le croire ; si je te mens, ça va pas te plaire », répond-elle à Gary quand celui-ci la questionne innocemment sur le nombre de ses amants. D’entrée de jeu, les braises de la passion sont là, prêtes à s’enflammer et à consumer les personnages. Les déflagrations de ce film hautement combustible, elles, résonnent longtemps après la fin du générique.
Toutes les critiques de Grand Central
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Passionnant, passionnel et transcendé par Léa Sédoux, bombesque et troublante en garçonne érotique, et Tahar Rahim puissant et tout en nuances.
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Avec brio, le deuxième film de Rebecca Zlotowski (...) raconte à la façon des maîtres du réalisme français une passion interdite aux abords d'une centrale nucléaire. Les comédiens (Léa Seydoux, Tahar Rahim, Oliver Goumet...) sont exceptionnels.
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Il y a là, à la fois, une grande intelligence et une grande virtuosité, qui font parfois oublier à la cinéaste la nécessité de nourrir ses personnages et le lien se tisse entre eux. Ce soupçon d'arbitraire est la rançon d'une impériosité qui est une qualité assez rare chez les cinéastes français.
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Si Tahar Rahim et Léa Seydoux crèvent l’écran, le personnage de Toni échappe aussi à la caricature que l’on aurait pu craindre, grâce à la finesse de l’écriture et de l’interprétation de Denis Ménochet. Décidément le cinéma français, le cinéma tout court, a besoin de films comme celui-ci.
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Cette année, la réalisatrice frappe fort avec Grand Central où une bombe anatomique (Léa Seydoux, en Silvana Mangano du XXIe siècle avec son short ultracourt) embrase les passions et jette son dévolu sur Tahar Rahim à l'ombre d'une centrale nucléaire. Attention, une œuvre sous hot tension !
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C’est la grande réussite de Rebecca Zlotowski, qui célèbre les noces improbables du réalisme social et du style.
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Tahar Rahim, Léa Seydoux, Olivier Gourmet et Denis Menochet le portent d'ailleurs avec une belle intensité. Le cinéma de Rebecca Zlotowski a de grandes chances de nous irradier encore longtemps. Et l'on ne s'en plaindra pas...
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C’est la vie qui caractérise le mieux Grand Central, film salé qui dévore les corps et les expressions de ses personnages avec une délicatesse remarquable ; film rugueux qui montre que l’amour a tout d’une centrale nucléaire.
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Tahar Rahim irradié de talent en ouvrier contaminé... par la bombe atomique Léa Seydoux, dont la sensualité embrase l'écran.
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L’histoire d’amour, solaire, se cache dans les hautes herbes vertes, au sein d’une nature luxuriante. Elle illumine littéralement le film. Autour de Léa Seydoux, époustouflante, et
de Tahar Rahim, parfait, des acteurs solides tels Denis Ménochet et Olivier Gourmet complètent le feu d’artifice. -
Zlotowski maîtrise parfaitement te ton et le tempo de cette passion amoureuse magistrale vécue dans ce cadre si atypique (...) Il y a aussi dans Grand Central, une tension qui ne cède jamais, comme un film en apnée. Tahar Rahim est d'une intensité incroyable, une nouvelle parfait dans un personnage sympathique et attachant, quand Léa Seydoux joue la partition de la bombe sensuelle qui refuse de choisir entre son compagnon et son désir d'ailleurs. Au final, entre drame social et western, l'écriture cinématographique si intense et intelligente de Grand Central lui donne un goût de grand mélo lyrique qu'on est pas prêt d'oubler.
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Tahar Rahim confère son énergie retenue ce drame passionnel, à la fois réaliste et stylisé(...)
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(...) la réalisatrice nous entraîne avec réalisme dans cette histoire aux variations certes attendues mais au cadre original, et dont le casting à fleur de peau nous entraîne dans un drame inextricable.
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Par la maîtrise du scénario, le sens de la direction d’acteurs, la force de sa mise en scène entre ces deux mondes souterrains, son style naturaliste et romantique évoque la puissance d’un Pialat et la fine psychologie des films de Jean Renoir dans la peinture à l’eau-forte d’une classe sociale quasi inconnue.
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Tahar Rahim est magnifique et percutant dans Grand Central
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Avec "Grand Central", documentaire sur le monde invisible de ceux qui "apportent la lumière", romance filmée comme un thriller, Rebecca Zlotowski, 33 ans, confirme qu’elle est, déjà, une grande cinéaste.
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Mais comme c'était déjà le cas avec Belle épine, à mesure que l'intrigue progresse, la réalisatrice ne semble plus trop savoir par quel bout prendre et surtout terminer son film.
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Un deuxième film en demi-teinte donc, mais Zlotowski confirme qu'elle est une grande cinéaste de l'ambiance.
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Machine sensible et intelligente, Grand Central donne le sentiment d’une boucle trop lisse, sans rugosité, d’un film animé par les nécessités du devoir plutôt que par celles du désir.
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(...) film raté qu’on ne saurait pour autant complètement condamner ; petit film qui a la fausse modestie de ne pas se rêver grand ; petite bombe qui n’a de crainte que d’exploser en plein vol. Et qui préfère se contenter de vivre d’amour, d’eau fraîche, et d’un peu de radioactivité.
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Malgré une critique quasi unanime, le Grand Central de Rebecca Zlotowski se révèle à nos yeux comme une romance creuse et atone, que la performance de Léa Seydoux ne porte pas vers le haut.