Jesse Eisenberg porte ce drama existentialiste d'une grande finesse et d'une acuité troublante.
On est toujours le héros de sa propre histoire. Mais cela n'en fait pas une vérité pour autant. Toby Fleishman va le découvrir de manière abrupte dans Anatomie d'un divorce, une nouvelle série qui débarque cette semaine sur Disney +, plusieurs mois après sa diffusion américaine sur la chaîne FX. Un drama au titre français brutalement évocateur et qui, comme son nom l'indique, raconte en détail l'histoire d'un mariage qui n'a pas tenu la distance.
Toby, chirurgien dans un hôpital de New York, vient de se séparer de Rachel, avec qui il a passé les 15 dernières années de sa vie et avec qui il a eu deux beaux enfants. Vivant aujourd'hui dans un petit appartement, tentant de se reconstruire à 40 ans, Toby jongle avec la garde de ses gamins une semaine sur deux. Sauf que cette semaine, Rachel n'est pas venue récupérer les petits comme prévu. D'ailleurs, elle ne répond même plus au téléphone. Les jours passent et Toby commencent à devenir fou en imaginant que son ex-femme est en train de se la couler douce avec son amant, le laissant tout gérer à la maison. De toute façon, depuis que sa carrière a décollé, Rachel est plutôt obsédée par les promotions que par la vie de famille. Plus intéressée par la réussite sociale que par le simple bonheur du quotidien...
Toby rumine. Toby fulmine. Et il nous fascine. Au fil d'une voix off exquise, Jesse Eisenberg fait son Woody Allen avec un naturel déroutant. Héritier évident d'un Harry dans tous ses états à Manhattan, il déambule dans les quartiers chics de l'île, l'air hagard, bousculé dans ses certitudes mais trimbalant son spleen avec une certaine autosatisfaction. Quarantenaire en quête de sens, en quête d'amour, en quête de lui-même, il questionne ses choix passés et son avenir incertain avec une anxiété magnétique. Une forme de gêne et de maladresse, à la fois agaçante et terriblement touchante, jusqu'au point de bascule...
Parce qu'Anatomie d'un divorce change soudain de perspective. S'approchant de la conclusion qu'on imaginait si bien se mettre en place après le premier épisode, la série - adaptée du livre de la journaliste américaine Taffy Brodesser-Akner - adopte dans ses derniers chapitres l'autre point de vue. Celui de Rachel, jouée par une Claire Danes toujours aussi insaisissable. L'autopsie de ce divorce révèle alors d'autres symptômes inattendus, et la série prend alors tout son sens en injectant une dose de sensibilité féminine, prenant les tropes du genre à contre-pied. Comme une manière de dépoussiérer Woody Allen et de confronter sa vision du monde à notre époque, la série bascule dans un prisme féminin désarmant, qui offre une approche totalement nouvelle à cette fameuse crise existentielle. Notre perception a évolué. Preuve que la mort de ce mariage méritait bien une autopsie approfondie.
Anatomie d'un divorce, en 8 épisodes, à voir sur Disney + à partir du 22 février 2023.
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