Le film signé James Mangold, qui sera le dernier de Harrison Ford dans la peau d'Indy, sort ce mercredi. Alors, ça vaut quoi, Le Cadran de la destinée ?
Toutes les bonnes choses ont une fin, et dans le cas d'Indiana Jones on avait extrêmement peur que la franchise n'ait déjà atteint sa date de péremption en 2008, au moment de la sortie du très mal aimé Royaume du crâne de cristal. Mais pouvait-on raisonnablement penser que Disney n'allait pas, à un moment ou un autre, rouvrir la marmite à vieille carcasses pour en extraire l'un des plus grands héros de cinéma de tous les temps ? Ultime tour de piste de l'aventurier (c'est Harrison Ford lui-même qui le dit), ce cinquième volet intitulé Le Cadran de la destinée avait à peu près autant de chance de se vautrer dans la nostalgie cheap que d'offrir à Indy des adieux dignes de son statut. Bonne nouvelle : si le film n'atteint jamais les sommets des trois premiers de Steven Spielberg sur les terrains de l'action et du timing comique, James Mangold (Copland, Le Mans 66, Logan...) s'approprie élégamment Indiana Jones, entre grand spectacle et modernisation astucieuse de la légende.
Tout commence par une scène d'une grosse vingtaine de minutes où Harrison Ford est rajeuni numériquement - le résultat est stupéfiant mais encore loin d'être parfait – pour lui permettre de retrouver sa bouille de La Dernière Croisade : nous sommes pendant la Seconde Guerre mondiale et Jones tente de mettre la main sur un artefact convoité par Hitler. Sans rentrer dans le détail (ce serait vraiment dommage), ce long prologue sert à mettre en place le MacGuffin du film (le fameux cadran inventé par Archimède et disparu depuis 2 000 ans) et son grand méchant, le nazi Jürgen Voller (Mads Mikkelsen, comme un poisson dans l'eau). Une mise en bouche, avant que l'on ne retrouve Indy en 1969, à New York. Le héros, vieillissant, vit désormais seul dans son petit appartement et est sur le point de prendre sa retraite de professeur d'archéologie. C'est ce moment que choisit sa filleule, Helena Shaw (Phoebe Waller-Bridge, épatante de fraîcheur et d'énergie), pour débarquer soudainement dans sa vie et lui proposer de retrouver le cadran sur lequel son père faisait une fixette... One last ride, comme dirait l'autre.
Étrangement mal à l'aise sur le terrain de l'action - les courses-poursuites sur fond vert ratées et interminables -, Mangold a l'excellente intuition de se questionner sur l'importance d'Indiana Jones en tant que héros, confrontant le mythe et ses valeurs au matérialisme ambiant. Mais Indiana Jones et Le Cadran de la destinée est surtout un long-métrage obsédé par le temps qui passe, les regrets et la déliquescence. À la fois celle de son héros et de son acteur principal, qui assume à l'écran son grand âge (80 ans, quand même), là où Star Wars le forçait - sans jamais y parvenir - à (re)jouer les héros faussement fringants.
C'est la plus belle idée d'un film traitant le sujet de la vieillesse du mythe sans en faire des caisses (un plan de quelques secondes sur son torse de vieux monsieur ; un dialogue de Waller-Bridge qui démontre toute la flamboyance de sa jeunesse ; une escalade douloureuse au cœur d'une grotte). Un fil rouge tenu jusqu'à la scène finale, et surtout durant un troisième acte fichtrement casse-gueule sur le papier, mais qui fonctionne miraculeusement. Un vrai moment d'émerveillement, quasi enfantin, comme la franchise n'en avait jamais connu jusqu'ici. Et qui justifierait presque à lui seul l'existence de ce Cadran de la destinée.
Indiana Jones et le Cadran de la destinée, le 28 juin au cinéma.
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