Le cinéaste espagnol adapte Cocteau et crée pour Tilda Swinton un cocon à sa démesure. Trente minutes d’exercice de style exaltant.
Un homme et une femme. Un cinéaste et une actrice. Pedro Almodóvar et Tilda Swinton. Et autour d’eux, des fantômes. Celui de Jean Cocteau, dont la pièce créée en 1930 est ici portée à l’écran. Et celui de l’ex du personnage campé par la comédienne, qu’elle a toujours dans la peau et dont elle attend qu’il vienne récupérer ses valises, pour acter définitivement une rupture qui lui est insupportable.
Cela fait un moment que le cinéaste tourne autour de La Voix humaine qu’on voyait interprété par le personnage de Carmen Maura dans La Loi du désir et qui l’avait inspiré pour Femmes au bord de la crise de nerfs en 1988. Mais cette fois- ci, Almodóvar s’en empare pleinement pour une pépite de 30 minutes où, loin de chercher à se libérer de toute théâtralité, il l’assume pleinement. Ici, les décors de studio sont apparents, semblables à un musée imaginaire de ses influences. Et cette artificialité épouse le monde que chacun se crée lors d’une rupture subie. La Voix humaine dresse le portrait de ce que signifier aimer, quand soudain on ne l’est plus. Le vide impossible à combler. La flamme impossible à raviver. Un monde qui s’écroule comme ce décor finira par partir en fumée mais sans complaisance, ni pleurnicherie. Souffrir oui mais avec superbe. Et qui mieux que Tilda Swinton, capable dans un même un geste d’une extravagance fascinante et d’un dénuement infini, pour incarner ces sentiments contradictoires ? Le feu et la glace mêlés pour une agonie sentimentale qu’Almadovar s’approprie en faisant écho à toutes les héroïnes riches en blessures qui ont peuplé son cinéma.
De Pedro Almodóvar. Avec Tilda Swinton. Durée : 0h29. Disponible le 19 mars en VOD et DVD.
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