Alors qu’Aquaman 2 sort ce mercredi, on fait le grand "saw" avec James Wan, son artisan en chef, pour qui "Hollywood est un drôle de concept".
Première : Aquaman et le Royaume perdu sort à une période compliquée pour le cinéma de superhéros et les films DC plus particulièrement...
James Wan : Vous voulez dire que c’est moins la fête qu’avant? (Rires.) J’ai décidé de prendre ça du bon côté : j’ai eu la chance de participer à cet univers-là, de faire partie de quelque chose qui me dépasse. Mais bon, en fait, ça n’a pas vraiment d’importance, parce que je considère que mes Aquaman n’ont jamais réellement été des films de super-héros.
Dans quel sens ?
Disons qu’ils n’ont ni la structure ni le look des films de super-héros traditionnels. Donc, peu importe ce qui se passe dans l’univers partagé, mes films se déroulent dans leur propre monde. Du moins, c’est comme ça que je choisis de le voir. Par exemple, les thèmes d'Aquaman 2 m’imposaient une ambiance façon L'Île mystérieuse de Jules Verne, avec plein de monstres beaucoup plus flippants que dans le premier.
Ça vous semble vraiment nécessaire de vous détacher du plan des studios pour préserver votre style ?
Hum... Je vais vous le dire autrement : j’ai besoin de me rattacher à des choses auxquelles je crois. Certains l’oublient, mais mon premier film, c’est Saw, un truc à un million de dollars! Je ne suis pas né dans le blockbuster. Et un film à gros budget, c’est beaucoup de pression et de stress. Mais si je trouve des éléments qui me relient aux personnages, alors ça me reconnecte à une forme de réalité. À de l’humain, quoi. Le reste, ce n’est que du bruit. C’est ainsi que j’arrive à percevoir Aquaman comme un film sur un solitaire qui cherche à réunir sa famille. Ce qui génère chez moi des visions de cinéma plus personnelles. Ce n’est pas vraiment une méthode pour garder mon style, mais ça me guide.
La "superhero fatigue", théorisée depuis une grosse dizaine d'années, semble cette fois bien installée. Le public répond moins présent qu'avant aux films super-héroïques. Ça vous fait peur ?
Non, car c’est logique. Je me souviens avoir vu un documentaire sur les Bee Gees, qui ont lancé la mode du disco et rendu ce genre musical très populaire. Et puis, soudain, presque toute la musique qui sortait n’était que du disco. Au bout d’un moment, les gens en ont eu marre. Après 10 ou 15 ans, ils ont eu envie d’autre chose et c’est bien normal. De la même manière, pendant une période pas si éloignée, on disait que le cinéma d’horreur n’avait plus la cote. Ce qui était faux. C'est juste qu’il en va ainsi des modes : il y a des moments où le genre est très populaire, puis ça redescend. Et tout ce qu’il faut pour que ça redécolle, c’est un ou deux bons films qui font venir le public. Les spectateurs d’aujourd’hui sont bien plus gâtés, ils ont des tas de films de super-héros parmi lesquels choisir. Quand j’étais plus jeune, on avait le Superman de Richard Donner, les Batman de Tim Burton ou Punisher avec Dolph Lundgren (Rires.) Et c’était à peu près tout ! Mais maintenant, l’offre est infiniment plus grande et les gens sont plus exigeants. C’est tout à fait compréhensible, et j’entends que ça devienne répétitif. C’est pour ça qu’il est important, quand on fait un film en se basant sur une franchise, de trouver le truc unique que personne n’a déjà vu auparavant.
Vous pesez plusieurs milliards au box-office ; pourtant, vous restez une personnalité étonnamment discrète. Ce qui est très rare dans l’industrie à ce niveau de succès...
C’est lié à ma personnalité. Je trouve aussi que Hollywood est un drôle de concept. Je ne traîne dans le milieu que pour le travail. Je ne vais pas aux fêtes, je fréquente très peu de gens... Quand je ne tourne pas, je suis chez moi avec ma femme et mes chiens, et je joue aux jeux vidéo. (Rires.) Je refuse de mettre le doigt dans cette folie que la réussite peut engendrer. On a tous entendu des histoires de cinéastes qu’on admire et qui sont en fait des connards et des trous du cul sur un plateau. Je ne veux pas que ça m’arrive. Tu n’es jamais obligé de te comporter comme un con vis-à-vis de tes équipes... Le succès, c’est super parce que ça me permet de continuer à faire des films et de mettre le pied à l’étrier de jeunes réalisateurs que je produis. Je vis pour raconter des histoires, mais je garde bien à l’esprit que tout ça n’est que du cinéma.
Aquaman et le Royaume perdu, de James Wan, avec Jason Momoa, Patrick Wilson, Amber Heard… Au cinéma le 20 décembre. Regardez la bande-annonce :
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