Affiches sorties de film mercredi 6 avril 2022
Ad Vitam/ Diaphana/ Universal

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
EN MÊME TEMPS ★☆☆☆☆

De Benoît Délépine et Gustave Kervern

L’essentiel

Compilant les clichés lourdingues sur certains excès de la société, le duo de réalisateurs au cinéma volontiers hirsute, signe une comédie réac mal fagotée. 

Laurel et Hardy. D’un côté un maire de droite, de l’autre, un élu écolo. Une nuit trop arrosée va rapprocher ces deux contraires au-delà du raisonnable. Voilà donc Jonathan Cohen (à droite) et Vincent Macaigne (à gauche), contraints au road-movie nocturne dans une ville de Province sans âme pour réparer ce qui doit l’être. Dans le même temps, des activistes féministes pas très finaudes sévissent dans le coin et, prises de remords, tentent de sauver nos deux infortunés larrons qu’elles ont mis dans ces sales draps. Fidèle à leur cinéma bricolo-rigolo vaguement anar, le duo Delépine-Kervern entendent dézinguer la norme. Mais outre que rien n’est vraiment drôle, que retenir d’un tel programme ? Que droite et gauche, c’est du pareil au même ? Que les écolos et les féministes nous cassent les oreilles ? C’est con et triste, sûrement involontaire de la part des deux cinéastes. A vite oublier.

Thomas Baurez

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

CONTES DU HASARD ET AUTRES FANTAISIES ★★★★☆

De Ryüsuke Hamaguchi

Une jeune femme qui découvre que sa meilleure amie vient d’entamer une liaison, sans le savoir, de son ex. Une jeune mère qui reprend ses études et tombe sous le charme d’un professeur- auteur à succès qui, en repoussant ses avances, provoque en elle une infinie douleur. Une méprise qui permet à deux femmes de se réconcilier avec un être perdu. Trois histoires indépendantes mais liées par un thème commun : le sentiment amoureux et les dédales qu’il emprunte entre passé et présent, au fil des hasards et des coïncidences, pour devenir le fil conducteur – parfois euphorisant, parfois douloureux - de nos vies. Habitué des récits au long cours (5h17 pour Senses, 3h pour Drive my car), Hamaguchi s’aventure sur le terrain du film court comme l’enchaînement de trois nouvelles. Mais sans ne rien perdre de tout ce qui fait la puissance tranquille et le charme envoûtant de son cinéma : l’infinie délicatesse de sa réalisation, son goût des longs dialogues d’une poésie infinie et des personnages féminins passionnants de complexité.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A AIME

LES BAD GUYS ★★★☆☆

De Pierre Perifel

Derrière ces Bad Guys, derniers nés de l’écurie Dreamworks, il y a un réalisateur français formé à la prestigieuse école des Gobelins de Paris, Pierre Perifel. Il adapte ici les aventures des personnages issus d’une série de livres de l’auteur australien Aaron Blabey. Les « vilains » en question sont des animaux (un loup, un requin, un piranha, un serpent, une tarentule) spécialistes de braquages qui vont tenter de se racheter une virginité pour les beaux yeux d’un cochon d’Inde à l’exemplarité incertaine. Mené avec une belle énergie, le scénario parie sur des rebondissements permanents faisant feux de tout bois au risque de l’épuisement. Si la réalisation, comme l’animation, ne brillent pas par leur originalité, l’efficacité est indéniable. En v.o, Sam Rockwell fait du beau boulot. En v.f ., c’est Pierre Niney qui s’y colle. « Dès 6 ans », nous dit-on.

Thomas Baurez

ABUELA ★★★☆☆

De Paco Plaza

Un top model madrilène revient chez elle pour s’occuper de sa grand-mère malade, et… C’est à peu près tout. Bon, il y a un petit twist fantastique, mais rien de réellement méchant ni bouleversant. En fait, ce n’est pas l’enjeu d’Abuela, qui évacue vite quelques thématiques contemporaines qui auraient pu être un peu reloues. Il suffit juste au film de mettre en scène une jeune femme et une vieille pour créer un effet de terreur absolument fascinant : celui provoqué par la perspective de devoir s’occuper de nos ancêtres en fin de vie. Ayant définitivement tourné le dos à la saga de zombies REC, Paco Plaza vit en réalisateur solo sa meilleure vie : Verónica était déjà un épatant petit film de possession 80’s. Abuela creuse le même sillon, en convoquant les grandes figures du ciné d’exploitation (Jess Franco, Jean Rollin) sans jamais s’y soumettre.

Sylvestre Picard

EMPLOYE/ PATRON ★★★☆☆

De Manuel Nieto Zas

Un jeune patron agricole uruguayen (Nahuel Perez Biscayart, excellent), débordé entre son boulot et son bébé à la santé fragile, engage un ado de 18 ans, tout juste papa lui aussi, qui a besoin d’argent pour subvenir à sa famille. Leur faible différence d’âge permet un rapprochement immédiat dans un deal où chacun y trouve son compte, jusqu’à ce qu’un accident tragique ne vienne tout renverser. Le film social sur les rapports de classe se mue alors en thriller avec un employé qui, par son statut de victime, possède un outil de contre- pouvoir contre son boss. Employé- patron raconte cette relation avec un sens aigu de la montée en tension, un goût pour le hors champ et les échanges de regard qui en disent plus que mille mots. Et malgré une ultime ligne droite trop téléphonée, l’ambiguïté prenante qui y règne en maître hisse le film au- dessus de la moyenne.

Thierry Cheze

INEXORABLE ★★★☆☆

De Fabrice du Welz

Le point de départ d’Inexorable se situe quelque part entre Théorème et La Main sur le berceau : le quotidien d’un romancier en panne d’inspiration, de son épouse et de leur petite fille, est perturbé par l’arrivée d’une jeune femme, Gloria, dans leur immense demeure des Ardennes… Même si on devine très vite comment tout ça va finir (mal), la longue mise en place du nouveau Fabrice du Welz est idéale de tension et d’ironie chabroliennes. La photo granuleuse de Manu Dacosse (« shot in glorious Super Kodak 16mm », précise le générique), dessine un monde inquiétant, vicié, comme pourri de l’intérieur, un univers de giallo où tout menace constamment de partir en vrilles meurtrières. Les comédiens sont tous très investis, à commencer par un Benoît Poelvoorde des grands jours, tour à tour touchant, ambigu et pathétique, qui emmène le film bien au-delà du simple exercice de style. 

Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

A LA FOLIE ★★☆☆☆

De Audrey Estrougo

Quelques mois après Suprêmes, son biopic consacré aux jeunes années de NTM, revoici un nouveau Audrey Estrougo dans les salles. Et cette fois- ci la réalisatrice a choisi de placer un trio féminin au centre de son récit. En l’occurrence une jeune femme qui, pour l’anniversaire de sa mère, vient passer quelques jours dans la maison de son enfance et y retrouve sa sœur souffrant de schizophrénie et régulièrement traversée par des accès de violence incontrôlable qui a rendu depuis toujours complexes ces relations familiales. Réussi dans son entame pour sa montée en tension qui vous prend aux tripes, A la folie finit par nous perdre à trop vouloir multiplier les personnages (le père, un petit ami…) et les histoires (une agression sexuelle vécue enfant…) dans l’histoire en seulement 78 minutes. La simplification à outrance de la psychologie ces pièces rapportées à ce qui constitue le cœur vibrant d’A la folie conduit à une trop grande artificialité de certaines situations, d’autant plus préjudiciables quand il s’agit comme souvent ici de pousser les curseurs à fond, avec la succession des crises. Dommage car le duo Virginie Van Robby- Lucie Debay se sort haut la main de ces obstacles mis sur leur route.

Thierry Cheze

O FIM DO MUNDO ★★☆☆☆

De Basil da Cunha

Le film débute par un baptême et se termine par un enterrement. Les accords lancinants d’un orgue d’église accompagnent les deux cérémonies. Ils reviennent cycliquement tout au long du récit dans un mélange de solennité et de torpeur, de sacré et de désespoir. « Les gars, vous sentez cette odeur d’ordures qui plane dans l’air ? » se demande Spira, 18 ans dont huit passés en maison de correction. Le voilà de retour au quartier de Reboleira, un bidonville lisboète où les perspectives ne dépassent les montagnes de détritus. Le cinéaste scotché aux visages de ses protagonistes réduit encore un peu plus l’espace. Le récit assez convenu finit malheureusement par se retourner contre le propos supposé du film, présentant ce territoire maudit comme un coupe-gorge où la population n’a pas d’autres choix que de s’entretuer. Au milieu de ce chaos les amants sacrifiés font pâles figures. « La fin d’un monde » dit le titre.

Thomas Baurez

LIBERTAD ★★☆☆☆

De Clara Roquet

Découvert à la Semaine de la critique, ce premier long met en scène Nora, une Espagnole de 15 ans qui voit débouler dans sa vie paisible, le temps d’un été, Libertad, une Colombienne de son âge dont le tempérament aventureux provoque son basculement accéléré vers l’âge adulte. Le film raconte le temps des premières amitiés à la vie à la mort, des premières amours aussi avec, en filigrane l’ombre des premiers deuils (la mère de Libertad a été engagée pour veiller sur la grand-mère de Nora, atteinte d’Alzheimer) et des relations qui se tendent avec les adultes (proche de sa mère, Nora regarde d’un œil curieux les échanges entre Libertad et la sienne, qui se retrouvent après des années d’éloignement). Ce récit initiatique bourré de charme reste hélas un peu trop dans les clous pour s’échapper d’un genre ultra- codifié qu’on sent ses remarquables interprètes prêtes à bousculer, sans n’avoir jamais vraiment la main pour y parvenir.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N'A PAS AIME

LA NUIT AUX AMANTS ★☆☆☆☆

De Julien Hilmoine

Il est à une semaine de se marier quand il la croise, un soir, au bord de l’eau. Ce qui commence comme de la drague va donner lieu à une nuit ensemble, une seule, pleine de désir et de questionnements sur la tragédie de l’amour. Voilà à peu de choses près tout ce qui agitera La Nuit aux amants pendant 1 h 30. Un pensum qui se prend très au sérieux et ambitionne de détricoter le sentiment amoureux, mais qui sonne désespérément creux. On retiendra surtout la photographie léchée et les très intenses performances de Laura Muller et Schemci Lauth, qui évitent au film de sombrer dans la parodie ou le théâtre filmé

François Léger

 

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