"C'est mon meilleur film " : Pourquoi Spike Lee était si fier de Do the Right Thing
Splendor Films
Do the Right Thing : La confrontation
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Do the Right Thing : La confrontation
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Do the Right Thing : Le combat
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Do the Right Thing : La musique
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Do the Right Thing : La souplesse
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"C'est mon meilleur film " : Pourquoi Spike Lee était si fier de Do the Right Thing
Do the Right Thing : La confrontation
Do the Right Thing : La confrontation
Do the Right Thing : Le combat
Do the Right Thing : La musique
Do the Right Thing : La souplesse

Do the Right Thing : La confrontation

"Je ne me considère pas comme un acteur. Je suis avant tout un auteur-réalisateur. Un cinéaste. Je joue dans mes films uniquement parce que ça me permet de les monter financièrement. Quand je donne un scénario à un studio, on me pose trois questions. Combien ça va coûter ? Quelle est l'histoire ? Est-ce que vous allez jouer dedans ? Je savais, en écrivant Do the Right Thing, que j'allais interpréter Mookie, le livreur de pizzas. Le personnage est présent mais ne parle pas beaucoup parce que je ne voulais pas me mettre en avant. Faire l'acteur ne représente pas vraiment une difficulté pour moi. Quand je joue, Ernest Dickerson, mon directeur de la photographie, que je connais depuis l'école de cinéma, sait ce dont j'ai besoin, et si je ne le fais pas correctement, nous recommençons. En revanche, être metteur en scène, c'est plus épuisant. Il faut prendre des décisions tous les jours, et le rythme de vie change du tout au tout. J'ai tourné Nola Darling n'en fait qu'à sa tête  en douze jours et, comme c'était mon premier film, j'ai dû tout faire moi-même. Pour Do the Right Thing, j'ai eu un budget d'un peu plus de six millions de dollars et bien que ce soit un film produit par un grand studio (Universal), nous avons eu le contrôle total pendant les huit semaines de tournage. Ca tombe bien, je ne conçois pas travailler autrement !"

Do the Right Thing : La confrontation

"Nous sommes dans la pizzeria de Sal (Danny Aiello), qui se tient à gauche avec l'un de ses fils, Pino (John Turturo). Ca représente une enclave italienne dans ce quartier noir et l'endroit où va se focaliser la violence de la dernière partie du film. Ce qui était important, c'était de montrer l'interaction entre les races et les cultures qui se côtoient. Prétendre que tous les Américains sont égaux, quelle que soit leur couleur de peau ou leur religion, est purement et simplement un mensonge. Un énorme mensonge. C'a toujours été faux et je tenais à ce que le public ressente cette horreur qui survient à la fin du film. Si on ne parle pas des problèmes de racisme aujourd'hui, la situation ne pourra qu'empirer. Je ne me fais pas d'illusion : l'Amérique n'a pas le monopole du racisme. Mais nous sommes des opprimés, nous, les Noirs d'Amérique. Même si Michael Jackson est le numéro un en musique, même si Eddie Murphy est une énorme star et même si le meilleur joueur mondial de basket est noir, il ne faut pas se leurrer. Il nous faut sans cesse nous défendre. Pour l'anecdote, j'avais écrit le rôle de Sal pour Robert De Niro qui a finalement refusé de faire le film. Avec raison, parce que son statut de star aurait sûrement déséquilibré le film. Il m'a suggéré Danny Aiello qui s'est révélé un choix bien meilleur. Pendant le tournage, des gens venaient même lui commander des pizzas !"

Do the Right Thing : Le combat

"Lui, c'est Ossie Davis, l'un de mes comédiens de théâtre favoris. Dans le film, il est le maire, un clochard philosophe. Pour lui, 'the right thing', la chose à faire, c'est de désamorcer les tensions raciales avant qu'il ne soit trop tard. En vain, le film se termine par une explosion inéluctable. Je voulais faire transpirer le public et le mettre mal à l'aise. Non seulement par ce qui se dit dans le film mais aussi par ce qui se voit, comme les couleurs. Même chose avec la caméra qui bouge beaucoup. Je tenais à ce qu'elle soit un personnage à part entière de l'histoire et c'est pour cela qu'il y a de nombreux cadrages décalés et pas mal de mouvements. Le piège à éviter était d'en faire trop et de retenir l'attention des spectateurs par une virtuosité inutile au détriment du vrai message du film. A un moment, l'un des personnages lance à Mookie : "Stay black !" C'est important de ne pas oublier que nous devons ne pas nous renier et surtout nous prendre en charge. Il ne faut pas compter sur les Blancs. C'est pour ça aussi que j'ai dédié le film à des Noirs assassinés par des Blancs au cours de la dernière décennie."

Do the Right Thing : La musique

"Lui, c'est Mister Senor Love Daddy qu'interprète mon pote Sam Jackson, un acteur que j';ai rencontré pendant le montage de mon court métrage, Joe's Bed-Stuy barbershop, et que j'ai fait ensuite tourner dans ma comédie musicale, School daze. Ici, je lui ai donné le rôle du disc-jockey de la station de radio We-l-o-v-e. D'ailleurs, si la musique est si importante dans mes films, c'est que j'ai grandi avec. Mon père, Bill Lee, est musicien ; il a écrit, composé, arrangé et interprété la musique originale de mes trois films. Francis Ford Coppola et Martin Scorsese ont complètement influencé ma manière de voir les films, à cause, justement, de l'utilisation qu'ils font de la musique et du son. Ils m'ont également inspiré par leur travail et leur manière de s'accommoder du système hollywoodien sans pour autant, à une époque du moins, transiger sur leurs choix artistiques. Mais quand je réfléchis bien, je dirais que ce sont mes parents qui m'ont certainement le plus influencé parce qu'ils m'ont permis de devenir cinéaste en acceptant ma vocation et en m'aidant à atteindre mon but."

Do the Right Thing : La souplesse

"A gauche sur la photo, c'est ma soeur Joie qui joue la soeur de Mookie, le personnage que j'interprète. A chacun de mes films, je lui donne un rôle plus consistant. Elle est prometteuse. A droite, c'est Ruby Dee. Pour moi, elle représente la sagesse et peut-être aussi la conscience de la rue de Do the Right Thing. De sa fenêtre, ou sur le pas de sa porte, elle surveille tout. Depuis longtemps et pour longtemps encore. Je tenais absolument à l'avoir dans mon film. Ce que j'attends d'un acteur, c'est avant tout une totale disponibilité et une compréhension de son personnage. Parce qu'au cours du tournage le scénario peut toujours être modifié en fonction de l'inspiration du moment. Nous avons tous beaucoup improvisé pendant le tournage de Do the Right Thing : certains acteurs inventaient des dialogues qui étaient meilleurs et plus appropriés que ceux que j'avais écrits dans le scénario. C'est quelque chose qui, non seulement ne me dérange pas, mais me stimule plutôt. Je trouve que le processus de création doit toujours garder une certaine souplesse."

Le film revient à la télévision en ce lundi soir.

Arte vient de démarrer son cycle festival de Cannes, même si l'édition 2020 a été reportée. Spike Lee devait en être le président du jury, 31 ans après y avoir présenté Do the Right Thing, programmé à 22h45 sur Arte.

"C'est mon film le plus politique, mon meilleur film. Le plus drôle et aussi le plus dramatique. Je suis là pour dénoncer une injustice". Première avait rencontré le réalisateur à l'époque, juste après Cannes, où son film coup de poing avait été présenté, apprécié, mais oublié au palmarès, pour un arrêt sur images. Le cinéaste commentait Do the Right Thing à travers quelques photos et posait tout de suite les enjeux :"Je suis noir. Je fais des films sur les Noirs et pour les Noirs". L'histoire a prouvé que son public était plus large que ça et, une génération plus tard, son récit de la journée la plus chaude de l'année au coeur de Brooklyn est toujours culte.
Propos recueillis par Jean-Paul Chaillet

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