Pour l’avant-dernier film de la compétition, Elia Suleiman signe avec It must be heaven, un film burlesque et poétique qui rappelle Jacques Tati
It must be heaven sera-t-il l’invité de dernière minute du palmarès? Une chose est sûre, la poésie du quotidien d’Elia Suleiman fait du bien après le réalisme cru d’Abdellatif Kechiche. Et si les deux réalisateurs sont inspirés par les « fesses des femmes dans Paris » et les boîtes de nuit, ils ne le traduisent pas de la même manière… Il y a beaucoup de Monsieur Hulot (création iconique de Jacques Tati) dans le personnage qu’interprète Elia Suleiman. Chapeau visé sur la tête, lunettes qui soulignent son look de Droopy, le réalisateur promène sa dégaine nonchalante, sans dire un mot, à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil.
It must be heaven commence là où Le temps qu’il reste (précédent film du réalisateur) finissait. À Nazareth. La mère du réalisateur est morte ; il a investi sa maison autant, imagine-t-on, pour la ranger que pour y retrouver ses racines. Là, notre héros découvre que son voisin vient cueillir ses citrons, tailler et arroser son arbre sans lui demander son avis. Le film suit les déambulations dans la ville de témoin désabusé. C’est souvent drôle, parfois ironique et souvent désespéré.
En quête d’un producteur
Puis, Elia Suleiman prend l’avion (dont les turbulences donnent lieu à une séquence de comédie très réussie) et se retrouve à Paris en plein été à la recherche d’un producteur. Le cinéaste récompensé par le prix du jury du Festival de Cannes pour Intervention Divine en 2002 sent immédiatement pleins d’affinités avec la ville Lumière. Est-ce là le paradis dont il a rêvé ? Les filles sont belles et les flics mesurent les terrasses. Mais le producteur refuse de financer son film qu’il ne trouve « pas assez palestinien ». Le voilà parti à New-York, terre de tous les possibles, où son identité le ramène à une position de combattant qui va faire peur à la productrice de films qu’il entrevoit.
Des cadres parfaits
Elia Suleiman aborde beaucoup de thématiques dans ce film : la violence policière, le climat de tension mondial, l’exil, l’affirmation d’une identité. Certaines plus subtilement que d’autres. Ce qu’il réussit parfaitement, en revanche, c’est sa mise en scène. D’une précision folle, ses cadres sont d’authentiques bijoux de composition. Avec son directeur de la photographie Sofian El Fani (La vie d’Adèle, Timbuktu…), il propose des photographies décalées de la vie comme ce char du 14-Juillet qui déboule dans une petite rue de la capitale. On est ravi en tout cas de voir que le cinéaste a retrouvé la grâce qui faisait la réussite d’Intervention Divine.
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