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Le cinéaste de La mémoire dans la peau revient avec The Wall, un film de guerre qui confirme son statut d’auteur particulier.

Doug Liman est un cinéaste insaisissable. Depuis 2002, il trace son sillon dans le registre du blockbuster explosif avec la plupart du temps comme toile de fond la guerre ou l’affrontement armé. C’était le cas du premier volet des aventures de Jason Bourne, La Mémoire dans la peau, dans lequel il transfigurait Matt Damon en action man amnésique luttant contre la CIA. Trois ans plus tard, Liman donnait dans le glamour chic et l’espionnage choc en faisant s’affronter Brad Pitt et Angelina Jolie dans Mr. et Mrs. Smith. Et en 2010, Sean Penn dans Fair Game se retrouvait à défendre son travail d’investigation face à l’administration Bush alors en plein conflit irakien. A chaque fois, une même histoire : le destin d’individus englués dans des sales guerres et qui doivent choisir entre la raison d’état et la vérité… Dans The Wall, c’est Aaron Taylor-Johnson qui incarne un GI devenu la cible d’un sniper invisible en plein désert et qui se retranche derrière un mur pour entamer un dialogue avec son ennemi.

Seul contre tous

Ce dispositif génial, qui place le film quelque part entre Phone Game (le suspens dans un lieu clos) et Le Désert des tartares (l’attente existentielle) sert à questionner la place du personnage, à la fois en tant qu’individu, et en tant que représentant de l’armée américaine. Exactement comme dans La Mémoire dans la peau. Derrière chacun de ses films, se cachent au fond des thématiques plus profondes que le postulat de départ. Sous couvert de raconter la guerre, ses enjeux et ses dommages collatéraux, Doug Liman tisse des odyssées personnelles et introspectives, hautement politiques. Si Jason Bourne élimine ses rivaux de la CIA, il est avant tout à la recherche de sa mémoire et de son passé. Dans Fair Game, le personnage de Sean Penn veut laver son honneur en faisant éclater la vérité sur les manigances du gouvernement. Et dans The Wall, l’attente du héros est un prétexte. Qui est-il vraiment ? Quel trauma fuyait-il en s’engageant dans l’armée américaine ? C’est dans son immobilisme existentiel que réside toute la force des récits de Liman : une quête personnelle menée par des personnages très humains. Trop humains.

Mais ces problématiques sont à chaque fois mises en scène de manière explosive. Doug Liman est un réalisateur en phase avec son époque. Lorsqu’il réalise le premier Jason Bourne, nous sommes un an après les attentats du 11 septembre. Dans ce contexte, Liman redéfini les contours du film d’espionnage des années 2000 en ancrant sa fiction dans une modernité contemporaine. Plus viscérale, plus puissante. Dans The Wall, contrairement aux blockbusters pyrotechniques, tout est affaire de tension. Après une exposition filmée par une caméra en mouvement, l’action reste fixée dans un espace restreint, sans pour autant donner l’impression de surplace. Liman transforme un film de guerre classique en un affrontement viscéral et un dialogue en temps réel avec la mort. Un nouveau classique.

The Wall sort en salles le 7 juin. Bande-annonce :