Affiches Films à l'affiche mercredi 6 septembre 2023
SND/ StudioCanal/ Les Films du Losange

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
VISIONS ★★☆☆☆

De Yann Gozlan

L’essentiel

Yann Gozlan s’essaie au thriller hitchcockien avec Diane Kruger. Au risque de privilégier la forme au fond…

Une commandant de bord long courrier au professionnalisme hors pair, menant une existence parfaitement réglée aux côtés de Guillaume (Kassovitz, un peu absent), son mari protecteur. Les vols et les "jet lag" à répétition commencent à perturber le rythme biologique de la jeune femme, et particulièrement son sommeil. Un jour, par hasard, elle recroise la route d’Ana, photographe avec qui elle a eu une aventure passionnée vingt ans plus tôt. Estelle est loin d’imaginer que ces retrouvailles vont l’entraîner dans une spirale cauchemardesque et faire basculer sa vie dans l’irrationnel… Sous l’influence de Hitchcock, Lynch et Nolan, Gozlan filme donc le vertige de cette femme qui ne fait plus la différence entre le rêve et la réalité. Hagard ou fébrile, Diane Kruger incarne cette héroïne duelle et s’en sort bien même si le film ne lui en donne pas tout à fait les moyens, négligeant trop l’enjeu émotionnel et jouant la carte de la virtuosité pour épater son spectateur. Dommage.

Pierre Lunn

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

LE CHÂTEAU SOLITAIRE DANS LE MIROIR ★★★★☆

De Keiichi Hara

Drôle de trajectoire que celle de Keiichi Hara : au fil des ans, son Miss Hokusai (2015) fait définitivement figure d’exception, dans la production animée japonaise comme dans la propre filmographie de son réalisateur. En signant ce biopic d’une artiste mélancolique qui se demandait si l’on pouvait rester à l’écart du monde, Hara se demandait peut-être si l’on pouvait faire un film qui puisse se tenir à l’écart du monde, comme un sanctuaire. Suivant ce coup de maître, Hara avait tourné Wonderland : Le Royaume sans pluie, une gentille et inoffensive odyssée de fantasy, fatalement un peu décevante. Et au fond, Le Château solitaire dans le miroir peut se regarder comme le récit de cette impossibilité. Une bande d’ados japonais se retrouve propulsée via leurs miroirs dans un monde parallèle reposant sur d’énigmatiques mécanismes. Et le film de nous frapper en plein cœur, pas par sa technique (classique) mais bien par sa charge émotionnelle. On s'attendait à voir un gentil conte ? Raté ! Décidément, Hara est un drôle de cinéaste.

Sylvestre Picard

LE CIEL ROUGE ★★★★☆

De Christian Petzold

Ondine est né du désir de Christian Petzold de faire un film d’été. Mais éà sa sauce, loin de la l’insouciance habituellement associée au genre. Et le feu qui commence à se développer autour de la maison où se déroule l’action qui en donne le la. Celui d’une menace d’abord invisible qui va se rapprocher de ce lieu choisi par deux amis pour leurs vacances. Deux potes que tout oppose – Félix, photographe hédoniste et Leon, écrivain obsédé par son deuxième roman – et qui auront la surprise de découvrir sur place Nadja (Paula Beer, divine) la nièce de la propriétaire. Une cohabitation qui sera celle de tous les dangers pour des cœurs prêts à s’embraser aussi vite que la campagne environnante. Œuvre la plus accessible de son auteur, Le Ciel rouge est aussi un grand film cruel autour de l’amertume, construit autour de Leon, un de ces personnages qu’on adore détester (Thomas Schubert, impressionnant), imbu de lui- même, qui va passer à côté de tout à force justement de son incapacité à regarder et des autres. Au fil d’un scénario riche en rebondissements distillés avec soin, Peztold signe une tragédie aussi bouleversante que malaisante.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A AIME

TONI EN FAMILLE ★★★☆☆

De Nathan Ambrosioni

Le film s’ouvre avec Toni (Camille Cottin) au volant d’une voiture voit toute sa smala composée de cinq ados, s’entasser dans l’habitacle. A la radio une chanson résonne, vieux tube dont on comprend qu’il illustre l’heure d’une gloire éphémère pour Toni, jadis vedette de la chanson. Les enfants chantent ce morceau qu’ils connaissent forcément par cœur mais l’animateur rompt brutalement l’enthousiasme général et balance un commentaire sur le caractère censément ringard du titre en question. Sur le visage de Toni, s’imprime une douleur, celle du temps qui a passé et la renvoie à ce rôle de mère solo, recroquevillée sous le poids de sa progéniture. Toni en famille entend raconter comment cette super héroïne du quotidien va essayer de réapprendre à rêver pour elle. Le cinéaste qui raconte ça a seulement 23 ans et c’est déjà son deuxième long métrage après Les Drapeaux de papier qui faisait déjà de la cellule familiale un refuge et une prison. Ce nouveau film parvient avec délicatesse à faire exister et coexister cette myriade de personnages et de cerner leurs préoccupations communes. L’intelligence du cinéaste est de croire jusqu’au bout que cette émancipation ne s’oppose pas forcément à cette idée de groupe.

Thomas Baurez

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ANTI- SQUAT ★★★☆☆

De Nicolas Silhol

Mère de famille célibataire, Inès est sur le point de se faire expulser d’un appartement avec son fils ado mais elle trouve un emploi chez la société Anti-Squat, dont l’activité consiste à loger temporairement des locataires dans des lieux inoccupés afin de protéger ces logements contre les squatteurs. Le rôle d’Inès est ainsi de recruter des résidents à qui elle doit faire respecter un règlement drastique. Et elle comprend vite que ce dispositif est davantage piloté par le profit financier que par l’empathie pour les personnes en quête d’habitat... Désireux de décrire le climat contemporain d’angoisse sociale et d’injustice économique, Nicolas Silhol (Corporate) confie à l’impeccable Louise Bourgoin le rôle d’une femme tiraillée entre la mission cynique exigée par ses employeurs et son envie de venir en aide aux résidents précaires à qui elle s’attache. Il en résulte une tension digne d’un polar urbain d’anticipation. Et malgré sa narration parfois mécanique, cette fable engagée nous plonge jusqu’au dernier plan dans une zone moralement trouble et captivante.

Damien Leblanc

LE GANG DES BOIS DU TEMPLE ★★★☆☆

De Rabah Ameur- Zaïmeche

Ce thriller social, inspiré d’un vrai braquage survenu en 2014 par un gang dont les membres étaient issus d’un quartier populaire de Seine-Saint-Denis, est vu de l’intérieur à travers un double regard : celui d’un militaire à la retraite proche des futurs bandits puis d’un homme de main expérimenté, chargé de les traquer. Dans leur ligne de mire, il y a la vie, mieux, la joie de vivre d’une bande de copains impliqués dans un braquo hautement sensible (la victime est un prince saoudien) Le film, offre un troisième axe et les regarde comme des « enfants » insouciants face aux réels enjeux et aux implications. Un « angélisme » qui tranche avec la rugosité de deux séquences dignes d’un film d’action américain. Mais loin d’une dichotomie voire d’une contradiction, Rabah Ameur-Zaïmeche, raconte ici la façon dont l’extrême violence s’inscrit dans un rapport de force complexe où la sphère sociale et culturelle, interfère dans les choix. Dans son premier long, Wesh Wesh, qu’est-ce qui se passe ?, le héros, tout juste sorti de prison, ne pouvait que constater cette déchirure politique. C’est cette même déchirure qui propulse aujourd’hui la petite bande des Bois du Temple dans un monde trop grand pour elle.

Thomas Baurez

UN AUTOMNE A GREAT YARMOUTH ★★★☆☆

De Marco Martins

C’est dans l’Angleterre de 2019, peu avant le Brexit, que Marco Martins (Saint- Georges) a situé son quatrième long. Un pays où le néo- libéralisme décomplexé transforme ses travailleurs les moins protégés en esclaves des temps modernes. A l’image de ces immigrés venus du Portugal bosser dans un abattoir de volailles. Film social documenté avec soin qui vous serre le cœur, le loachien Un automne à Great Yarmouth propose surtout un point de vue original sur son sujet. Celui de cette femme portugaise, qui, chargée de s’occuper de ses compatriotes, se vit en mère protectrice sans voir qu’elle n’est qu’une marchande d’esclaves … avant que son coup de foudre pour l’un de ces employés ne provoque en elle une prise de conscience violente. Un personnage riche en ambiguïtés et contrastes que Martins accompagne avec maestria par une réalisation refusant de céder à un quelconque misérabilisme.

Thierry Cheze

THE WASTELAND ★★★☆☆

De Ahmad Bahrami

Il semble n’y avoir ni lieu, ni époque. Il y a simplement une usine de briques, posée sur le désert iranien, avec ses travailleurs et son patron. Les dominés et le dominant. La lutte des classes, tout bonnement. Mais l’usine, accablée par les difficultés financières, s’apprête à fermer. L’Iranien Ahmad Bahrami (The Wastetown, sorti cet été) filme les travailleurs, recroquevillés, abattus, qui font tour à tour face au puissant, enfermé dans sa tour d’ivoire. Le cinéaste simplifie le dispositif, répète ses scènes à l’envi, use du noir et blanc, ajoute des visages de drame, des corps fragiles et impuissants, des patriarches de vertu, un amour caché. Et élève son film au rang de fable poétique. Se joue-là, mieux qu’ailleurs, le drame du capitalisme : le dénuement et le délitement de la communauté. C’est à la fois émacié et magistral.

Estelle Aubin

LE CHAMP DES POSSIBLES ★★★☆☆

De Aly Muritiba

Daniel, flic masculiniste de 40 balais, s’amourache peu à peu d’une relation virtuelle (on pense évidemment au Her de Spike Jonze). Mais sa quête amoureuse vire vite vers un ailleurs queer. Impossible et queer. Là-bas, dans les plaines brésiliennes, l’amour est une tradition, pas une liberté. Sans éviter tous les écueils du récit romantique, le long-métrage capte les ambiguïtés du genre et de la transition de genre, et hisse le travail de la lumière en mantra politique. On ne peut plus libérateur.

Estelle Aubin

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PREMIERE A MOYENNEMENT AIME

INSIDE ★★☆☆☆

De Bishal Dutta

On ne la voit pas, mais elle vit à l’intérieur. Une entité démoniaque dévoreuse d’âmes se nourrit des énergies négatives humaines. Une seule manière pour retenir le monstre : l’enfermer dans un bocal et le nourrir de viande crue. C’est du moins ce qu’affirme une jeune lycéenne à sa meilleure amie. Cette dernière, Samidha (Megan Suri), d’abord dubitative, finit par la croire quand le monstre vient s’en prendre à elle. De ce film signé par les producteurs de Get out, on s’attend d’abord à un vent de fraîcheur sur le genre horrifique : une intrigue d’épouvante qui tourne entièrement autour de la culture hindou, ça ne court pas les rues à Hollywood. Mais à force de screamers prévisibles intégrés à un schéma trop classique, ce qui devait être un bol d’air frais nous laisse au final une impression de réchauffé.

Sarah Deslandes

 

Et aussi

Un peu d’imagination, programme de courts métrages