Pour son deuxième long métrage de cinéaste, Louis Garrel s’envisage à nouveau en antihéros romantique.
Hier déjà, dans Les Deux Amis, Louis Garrel était Abel et portait le fardeau d’une amitié mise à mal par un trop-plein de lui-même. Clément (Vincent Macaigne) le lui reprochait sans ambages : « Tu ne me plais plus ! » Abel encaissait mais restait, conscient qu’au-delà de sa personne dont il ne peut se délester, il y a l’autre à préserver. C’est sûrement ça être fidèle. Abel est de retour. Toujours Garrel. Toujours fidèle. Trimballé à gauche et à droite par une maîtresse faussement indécise (Laetitia Casta) et une jeune adulte enamourée qui doit éprouver l’objet de ses désirs (Lily-Rose Depp). Au milieu de ce nouveau trio, Abel a pour lui l’assurance innée du héros, du guerrier romantique, mais dans une version 2018, le panache en sourdine. Louis Garrel devant, derrière et à l’écriture, épaulé par Jean-Claude Carrière, affirme un peu plus son univers de cinéaste. Un cinéaste qui sait ce qu’il doit à ses pairs et père, ne s’en cache pas mais avance avec ses propres armes. L’une d’entre elles fait un peu défaut ici. L’acteur a un potentiel comique sans équivalent dans notre paysage où tout se dessine avec les mêmes traits. Il descend de Keaton pour le sens du rythme, de Léaud, le contrôle en plus, et parvient à tirer tout le potentiel des mots et des situations qu’il met en place. Témoin, cette séquence d’ouverture, baignée d’une lumière chaude que n’aurait pas reniée Manoel de Oliveira, où Abel se fait éconduire par sa maîtresse avec un naturel tellement confondant qu’il vire au vertige poético-burlesque. Cette note-là fait merveille. Dommage qu’elle soit un peu moins jouée par la suite.
L'homme fidèle, en salles le 26 décembre 2018
Commentaires