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Avec Phénomènes, M. Night Shyamalan tente pour lui et pour nous de faire oublier l'échec de La Jeune fille de l'eau. Un retour donc aux sources du fantastique théorique pas complètement réussi mais attachant.- Exprimez-vous sur le forum cinéma M. Night Shyamalan, nouveau wonderboy doué d'Hollywood au début de la décennie, avait décidé de jouer les divas pour son précédent film, La Jeune fille de l'eau. Il quittait alors Disney avec pertes et fracas, le studio mégotant sur un projet qui lui tenait très à coeur. Pas de chance, l'auteur incompris se prend son premier échec, le public ne suit pas, ou peu, et les critiques hésitent devant cette crise mystique pourtant pas si dénuée d'intérêt. Shyamalan sort abîmé de cette triste expérience, il est déçu. Pour rebondir il s'attaque à Phénomènes, un projet antérieur à La Jeune fille de l'eau. Le film est une occasion pour lui de revenir à ses bases : le suspens théorique dopé au fantastique. Chaque opus de Shyamalan tourne en effet autour d'une idée, explorée avec soin par une mise en scène néo-classique qui doit aux plus grands maîtres du suspens hollywoodien, qu'à un univers de série B surfant sans gêne sur les mystères les plus naïfs, familiers et populaires. Le cinéma de Shyamalan n'est jamais très éloigné des serial comme La quatrième dimension, cette littérature adolescente et superstitieuse où se mélangent paraboles, bazar ésotérique, science et croyances en tous genres.Phénomènes procède donc comme un retour à la formule originelle, tel un contrecoup pour renouer le contact avec le public. Le film se présente comme un mélange inattendu entre Les oiseaux d'"alfred hitchcock" rec="0", La Guerre des Mondes de "steven spielberg" rec="0", le documentaire d'[people rec="0"]Al Gore[/people] sur le réchauffement climatique et Le Vent de [people rec="0"]Victor Sjöström[/people], ce film muet de 1928 qui pour la première fois peut-être filmait une menace invisible. L'histoire est mince et débute sans préambule : alors que New York est attaqué par un étrange phénomène provoquant des suicides de masse, un professeur (Mark Walhberg, ahuri et génial) est forcé de fuir avec son épouse, un ami et sa fille. Très vite la contamination atteint toute la côte est, ils n'ont plus d'échappatoire, leurs compagnons de fortune meurent les uns après les autres, ils finiront au milieu de nulle part, cherchant à comprendre les raisons de ces mystérieux événements. Attaque terroriste ? Oui, mais non, la piste est écartée rapidement, on lui préfère celle beaucoup moins rationnelle d'une conséquence écologique, une attaque de la nature sur tous les pôles de condensation humaine.Au centre de cette fable écolo-fantastique se greffe une intrigue amoureuse entre Wahlberg et son épouse (sublime Zooey Deschanel), comme un tremplin secondaire complétant par les sentiments le climat d'incertitude général que Shyamalan tente d'installer. L'incertitude est en effet la clé de Phénomènes, davantage que la paranoïa ou l'angoisse pourtant également omniprésentes. L'inexplicable, l'irrationnel, le mystère reviennent sans cesse à la charge à travers Wahlberg, personnage égaré dans un monde indéchiffrable qu'il ne peut plus analyser mais qu'il cherche pourtant à décrypter à partir d'un raisonnement par l'impossible. Ce support théorique, Shyamalan le brode à l'image de ses films précédents, clés en main mais toujours avec cette forme de lucidité naïve de celui qui cherche à pister l'insondable. En découlent fatalement une sensation de ficelles un peu lourdes, un artifice intellectuel qui voudrait donner du sens aux images quand le récit ou le cadre se révèlent insuffisant. Il faut l'admettre, Phénomènes est inégal, peut-être le film le moins efficace de Shyamalan, le plus hésitant, mal à l'aise, comme si l'auteur voulait décidément prouver et se prouver quelque chose.Tel le magicien qui voudrait rejouer ses plus beaux tours que le public connaît par coeur, Shyamalan n'évite pas l'auto parodie, ses images sont telles un panier percé, les moments les plus supposés étranges achoppent par manque de rigueur ou d'inventivité, pire l'effet est annoncé avant même la progression du montage. Pourtant, malgré ses faiblesses et un auteur pas si roublard qu'on ne pourrait le croire, Phénomènes produit une certaine intensité, plus douce, plus discrète qu'auparavant. Difficile de croire à cette nature et au vent tellement Shyamalan a parfois du mal à filmer le décor comme menace ; mais se propage autre chose qui contamine progressivement le couple tout en conservant la simplicité du serial à un niveau plus classique, tout en transparence. Le symbolisme de la réconciliation familiale comme extension de mère nature fait naturellement un peu grincer des dents (le couple était en discorde et sans enfant), mais à la fois l'idée se révèle plutôt précieuse dans l'enchevêtrement des doutes dont les personnages sont atteints. Il faut ainsi voir ce moment magnifique où le couple se retrouve en bravant le danger, la mort environnante et invisible. Il y a là une forme très abstraite mais très pure d'éclosion des sentiments, quelque chose d'éblouissant et définitif embrassé par la grâce. PhénomènesDe M. Night ShyamalanAvec Mark Wahlberg, Zooey Deschanel, John LeguizamoSortie en salles le 11 juin 2008Illus. © 20th Century Fox - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils réalisateur, cinéma fantastique sur le blog cinéma- Shyamalan sur Flu : lire les critiques de Signes (2002), Le Village (2004), La Jeune fille de l'eau (2006)
Le JDDpar Danielle AttaliLe scénario, aussi fumeux que les précédents, surfe sur la vague de l'irrationnel et du fantastique, sur fond d'écologie cette fois. Shyamalan, issu d'une lignée de médecins, restitue un fatras de notions pseudoscientifiques et météorologiques, agrémentés d'énigmes mathématiques. Nu suspense, ni tension dramatique réelle. On est dans un film de genre raté.