Imaginez un film sur des lamas réalisé par Steven Spielberg. Vous aurez une idée assez juste de Nés en Chine. A l’origine il s’agit d’un documentaire sur les animaux rares de l’Empire du Milieu commandé par Disney. La panthère des neiges, le panda, le singe doré et les grues du Japon. Les quatre animaux magiques du Kung Fu captés dans leur environnement, traqués par les caméras et les drones. C’est très beau, très cinégénique et la voix-off pédagogique (la marque des films Disney Nature) fait vaillamment son office. Le message écolo est passé, les enfants sont contents, Mère Nature peut dormir sur ses deux oreilles…
Majesté de l’image
Pourtant il y a quelques instants qui détonnent, des moments étrangement majestueux. Cette manière de filmer la panthère qui grimpe la roche comme Patrick Eidlinger ; des séquences qui confinent parfois à l’abstraction (les pandas que la caméra transforme en seigneur de la jungle ou le vol des grues qui devient une calligraphie céleste). Il y a aussi cette célébration de la vie ou ce qu’il en reste dans un environnement hostile, le danger qui rôde à chaque instant et que la caméra densifie (le duel entre la panthère et le yak dans un final tétanisant). C’est la marque de Lu Chuan qui, avec Kekexili et City of Life and death, deux films hallucinants de violence et de splendeur, s’était imposé comme un super-auteur asiatique. Il avait disparu des écrans occidentaux, jusqu’à ce qu’on lui commande cette fresque. Tout en respectant la charte Disney Nature, il réussit à imprimer un étonnant feeling à ce film animalier.