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A la sortie de L’événement, son roman autobiographique où Annie Ernaux racontait son parcours pour se faire avorter clandestinement dans la France des sixties, l’auteure expliquait avoir voulu résister « au lyrisme et à la colère. » En adaptant ladite prose, Audrey Diwan voyait donc devant elle, un chemin à priori balisé sur lequel ses pas devaient tant bien que mal respecter une cadence, une humeur. Au lyrisme, la réalisatrice répond donc par une image au (presque) carré qui emprisonne un être que la caméra suit de près. « Il fallait qu’il y ait contrainte pour qu’il y ait enjeu. », affirmait jadis Chabrol scrutant Huppert faiseuse d’anges, entre quatre murs très resserrés dans son Affaire de femmes, film contretype de celui-ci. Chez Audrey Diwan, le hors champ tient lieu de menace, le cadre devenant un sanctuaire où l’héroïne – jugée impure par une époque – se protège, se bat et se tient prête. Droite surtout. Le hors champ invisible par nature, empêche l’exhibition d’une époque reconstituée et ajoute par soustraction un surcroît d’intemporalité (le combat continue). Quant à la « colère », le seul fait de voir Anne (Anamaria Vartolomei, un événement à elle-seule !) aller au bout de son combat avec les appréhensions d’une reine et un calme tout aussi souverain, il est l’expression d’une rage souterraine dont les vibrations fracturent le monde. Trois ans après Mais vous êtes fous, où là encore la menace venait de l’intérieur même d’un corps, Audrey Diwan signe un survival tendu où l’enjeu ne repose pas seulement les faits relatés mais sur l’élan qui rend une résistance à l’ordre établi possible.