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C’est un premier film remarquablement maîtrisé, implacable et sec, sans pathos. Filmé à hauteur d’enfant, L’Autre Rive embrasse le traumatisme et la complexité des guerres fratricides. Le jeune héros se débrouille vaille que vaille avec une vie de « réfugié » qu’il semble avoir toujours connue. Seul son regard, dévié par un strabisme, porte la trace des années violentes et douloureuses, d’une enfance à jamais volée. Des plaines d’herbes sèches aux ruines tenant à peine debout, du pont suspendu entre deux mondes que tout sépare à une banlieue enneigée, le voyage de Tedo le mène au bout de lui-même. Puis des larmes. Une danse sauvage. Une renaissance ? En tout cas la force inébranlable de la nature, célébrée par des chasseurs qui trinquent « à la forêt, aux fleuves et aux montagnes ».
Toutes les critiques de L'Autre Rive
Les critiques de Première
Les critiques de la Presse
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Ces cinéastes de l'Est savent mieux que quiconque combien il est important que les messages circulent au rythme des images qui ne sont jamais gratuites. C'est tout l'intérêt de ce genre de réalisations qui nous changent du vide véhiculé par un certain cinéma dit "de distraction".
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C’est à travers le visage d’un enfant, merveilleux acteur au visage fermé que son strabisme rend encore plus fragile, que le réalisateur (dont c’est le premier film) nous montre les ravages d’une guerre. Le voyage initiatique de Tedo est la découverte d’un pays en ruines, où règnent violences, haine et xénophobie. En dépit de quelques brefs élans d’humanité, être un enfant n’est pas gage d’un meilleur sort : Tedo est d’abord identifié comme un ennemi. Aussi sobre que le jeu de son jeune interprète, aussi dure que ses apprentissages, cette œuvre pleine de compassion et d’humanité confronte l’innocence d’un enfant à la barbarie. Il ne suffit pas comme Tedo, de fermer ses yeux très fort pour s’en protéger.
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Chaque rencontre est porteuse de périls et Tedo ne peut compter que sur ses maigres ressources et sur la chance. Si L'Autre Rive échappe au misérabilisme et atteint ce ton rêveur (et pourtant lucide) qui le rapproche de l'univers magique des contes, c'est grâce à la présence étonnante du jeune Tedo Bekhauri, qui interprète son homonyme.
On ne sait pas si la sobriété de ses expressions, la grâce enfantine (le scénario nous dit qu'il est âgé de 12 ans, mais il a l'air beaucoup plus jeune) qui lui fait fermer les yeux quand le spectacle du monde devient insupportable, sont le résultat d'un talent d'acteur naissant ou de l'un de ces heureux accidents qui se produisent lorsqu'on emploie des enfants à l'écran.
Le fait est qu'on n'est pas près d'oublier ce petit garçon qui cherche son chemin dans un monde qui ne lui veut que du mal. -
L'Autre Rive est un road-movie, une odyssée méditative, tissée de rencontres cruelles, tragiques ou tendres. Ballotté, recueilli, perdu, minuscule, dans l'immensité du territoire des adultes, Tedo est le fil rouge d'un hommage fervent à la Géorgie, à sa beauté mélancolique et dorée, à sa lumière caressant les visages... Face à la noirceur et à la tragédie, George Ovashvili semble faire comme son petit héros, lorsque la réalité lui devient insupportable : il réinvente un monde.