-
En septembre 1985, Andrew Carter Thornton II ancien agent des stups passé de l’autre côté de la barrière, met son avion sur pilote automatique et balance au-dessus de la Géorgie plusieurs sacs de sport contenant des dizaines de kilos de cocaïne. Puis il saute à son tour : pas de chance, son parachute se bloque et Thornton s’écrase au sol comme une pierre. Deux mois plus tard, un ours découvre l’un de ses « colis » et en dévore une partie. L’ursidé décède une vingtaine de minutes après l’ingestion. Un fait divers rocambolesque qui a un moment agité l’Amérique, mais pas vraiment de quoi nourrir un film de fiction. Jusqu’à ce que le scénariste Jimmy Warden ne décide de s’en emparer, transformant l’ours en junkie énervé et quasiment doté de super-pouvoirs sous l’effet de la cocaïne. Pitch rigolo pour une comédie gore, où l’animal (en effets spéciaux numériques assez réussis) va défoncer tour à tour des criminels qui veulent récupérer le reste de la drogue, des flics à leur poursuite, des mômes qui ont fait l’école buissonnière et des touristes qui n’ont rien demandé.
Voilà qui fait beaucoup de monde, mais ça commence plutôt pas mal, avec un petit couple de randonneurs surpris par ce Crazy Bear (improbable adaptation française du titre original, Cocaine Bear) au beau milieu de la forêt. Madame se fait charcuter, l’hémoglobine coule à flots, monsieur hurle de trouille et se tire, le ton est donné. Sauf que les choses se gâtent dès que le script se pique de faire autre chose qu’un jeu de massacre purement ludique : la réalisatrice Elizabeth Banks voudrait tendre vers un Fargo sanguinolent et cartoonesque, mais a dans les pattes une galerie de personnages désaccordés, parfois à la limite de la parodie (le policier proche de la retraite qui vient d’adopter un petit toutou ridicule ; la garde-forestière adepte de la gâchette). Le film cherche constamment son ton, pas assez débile pour fonctionner comme un pastiche, beaucoup trop sérieux pour amuser la galerie. Résultat : personne ne croit vraiment à cette affaire, pas même les meilleurs (Alden Ehrenreich en bandit en deuil, idée intenable au sein de cette histoire ; Keri Russell dans la peau d'une maman à la recherche de sa fille…).Crazy Bear souffre par ailleurs d’un problème de rythme ahurissant - au bout d’une heure, on serait prêt à supplier que ça s’arrête -, hérité d’un montage bancal qui tue dans l’oeuf les rares bonnes vannes du scénario. Sacré gâchis.