Issu d'une famille juive modeste, Donskoï réussit à s'instruire à la faveur de la révolution d'Octobre. Intéressé par la psychiatrie, il entreprend, après sa démobilisation, des études de médecine. Cette activité trop accaparante ne lui permet pas de s'adonner à la musique, au football et à la boxe, ses violons d'Ingres ; aussi change-t-il de voie. Il étudie le droit et en obtient un diplôme. Bien que peu motivé par sa nouvelle profession, il l'exerce quelque temps dans des branches relevant de la criminologie et de la défense politique, notamment à la Cour suprême d'Ukraine.À partir de 1925, ses diverses expériences se fondent et se concrétisent dans ce qui devient sa vocation : le cinéma. Il écrit une pièce, l'Aube de la liberté, et un recueil de nouvelles, les Prisonniers, portant sur l'activité clandestine dans certains milieux pendant la guerre civile. Il élabore, sur un thème voisin, son premier scénario, le Dernier Rempart, qu'il ne met toutefois pas en scène. Il entre, en 1926, à l'Institut de cinéma de Moscou, dans la classe d'Eisenstein.Travaillant comme assistant monteur dans le nouveau studio Byelgoskino, il y réalise en 1927 la Vie (izn), un essai cinématographique demeuré inachevé. La même année, il mène à terme Dans la grande ville (V bol om gorode), son premier long métrage. Ce film nous narre une tranche de la vie d'un poète d'extraction paysanne qui se fixe en ville. Donskoï, cinéaste rural par excellence, en profite pour caricaturer certains aspects du comportement des nouveaux bourgeois de la NEP. En 1928, il achève, avec la collaboration de l'écrivain Mikhail Auerbach, le Prix d'un homme (Cena eloveka). Après quelques bandes comme le Dandy le Gommeux (Pion, 1929) ; l'Autre rive (uoj bereg, 1930) et le Feu (Ogon, 1931), où Donskoï apprend son métier, il élabore, en 1934, avec le concours de Vladimir Legochine, le Chant du bonheur (Pesn'o sast'e), considéré comme la meilleure réussite de sa première période. Le film traite, avec humour, de l'éveil des peuples vivant sur les zones frontalières ainsi que de leur adaptation à la nouvelle vie. Cette veine de l'uvre de Donskoï se retrouve également dans les Romantiques (Romantiki, 1941) et dans Alitet s'en va dans les montagnes / la Loi de la Grande Terre (Alitet uhodit v gory, 1950), deux films massacrés par la censure stalinienne.L'adaptation des uvres biographiques de Maksim Gorki, en une trilogie demeurée célèbre l'Enfance de Gorki (Detstvo Gor'kogo, 1938) ; En gagnant mon pain (V ljudjah, 1939) et Mes universités (Moj universitety, 1940) , marque l'entrée de Donskoï dans la sphère des maîtres du 7 art soviétique. Les préoccupations humanistes de l'écrivain trouvent un saisissant écho dans la description de la société paysanne russe du XIX siècle esquissée par le cinéaste. De l'enfance à la jeunesse, Alexis Pechkov le futur Gorki prend conscience, successivement, de l'oppression domestique de la cellule patriarcale, de la dureté du monde du travail et de la difficulté de s'instruire pour les pauvres. Pratiquement, tous les thèmes que l'on retrouve ultérieurement dans l'uvre de Donskoï sont ici présents : croyance fervente et presque mystique en l'homme ; héros effacés mais jamais résignés ; peinture à gros traits, sous forme de tableaux, de la Russie prérévolutionnaire ; présence du double visage positif de la femme (cf. la grand-mère protectrice et la jeune bourgeoise initiant Alexis à la lecture). Le metteur en scène réalise trois films, pendant les hostilités, liés au problème de la guerre : Et l'acier fut trempé (Kak zakaljalas stal, 1942), l'Arc-en-ciel (Raduga, 1944) et Tarass l'indompté/ les Indomptés (Nepokorennye, 1945). Ici, la générosité s'efface un peu devant l'horreur ; à ce titre, le portrait de la résistante dans l'Arc-en-ciel est bouleversant. À la combattante succède, dans Varvara ou l'Institutrice au village (Sel'skaja uitel'nica, 1947), la pionnière de l'éducation (les deux rôles que le créateur impartit à la femme soviétique), thème omniprésent dans la filmographie de Donskoï. Après l'incident d'Alitet s'en va dans les montagnes, il reste six ans sans tourner, à l'exception d'un documentaire sportif : Nos champions (Nai empiony, 1950).Par la suite, le cinéaste investit à nouveau, avec une fidélité modelée à sa vision personnelle, l'uvre de Gorki : la Mère (Mat , 1956) et Thomas Gordeiev (Foma Gordeev, 1959). Il réalise en 1958 un film phare, plus lyrique et débridé que les autres, le Cheval qui pleure (Dorogoj cenoj), qui n'est pas sans anticiper, par son envoûtant panthéisme, sur les Chevaux de feu (1965) de Sergueï Paradjanov. À l'opposé d'un grand nombre de pionniers du cinéma soviétique, le style de Donskoï, toujours sobre, n'a pratiquement pas varié de la trilogie à Thomas Gordeiev. Son enracinement culturel foncièrement ukrainien, son humanisme actif, son inspiration située dans le passé (la meilleure fa¿con d'éclairer le présent selon lui) ont gardé à son uvre une unité qui lui a permis de traverser, sans compromis, les périodes les plus noires et d'échapper aux fluctuations des modes idéologiques. Par ailleurs, Donskoï est essentiellement un réalisateur du parlant ; et son emploi moderne de la profondeur de champ fait de lui, à l'instar de Renoir ou de Welles, un cinéaste contemporain. Les années 60 voient l'affadissement de ses thèmes, qui frisent parfois la mièvrerie : Bonjour les enfants (Zdravstvujte, deti, 1962) ; la Dévotion d'une mère (Vernost materi, 1967).