Genre Homme
Avis

Biographie

Né à Leipzig en 1926, de parents juifs commerçants, Edgard Hilsenrath connaît une enfance aisée jusqu'à l'arrivée d'adolf hitler au pouvoir, qui change considérablement la vie de sa famille : brimades à l'école, situation matérielle de plus en plus délicate. Après s'être adressé, sans succès, au consul des Etats-Unis pour obtenir des visas d'immigration (c'est le début de Fuck America), son père envoie, en juillet 1938, sa femme et ses enfants dans leur famille en Roumanie. Edgar vit selon les traditions du judaïsme, dans un shtetl typique d'Europe de l'Est, où il écrit ses premiers romans d'adolescents. Mais en 1941, les Juifs de Sereth sont déportés à Mogilev-Podolsk, un ghetto ukrainien de plus de 50 000 personnes, rapidement vidé par le choléra, le typhus, la famine et le froid. A la libération du ghetto par l'Armée rouge, Hilsenrath gagne la Palestine. Il connaît l'expérience (non concluante) des kibboutz et erre durant deux ans, d'une ville à l'autre, accumulant les petits boulots. Son sionisme tiédit rapidement : il ne retrouve pas le paradis juif perdu à Sereth. L'idée d'un grand roman sur l'expérience du ghetto naît au milieu de l'année 1945, mais il ne sait comment l'aborder.En 1947, après avoir rejoint ses parents à Lyon, il est transformé par la lecture d'Arc de triomphe d'Erich Maria Remarque et commence son roman : en France, puis à New York, où il a suivi son frère en 1951. Pour pouvoir se consacrer à l'écriture, il travaille là-bas comme garçon de café, livreur ou gardien de nuit, quelques jours ou quelques heures par semaine, et réduit ses besoins à l'essentiel. Il écrit la nuit dans des cafétérias juives. En 1958, il obtient la nationalité américaine et termine Nacht, roman d'un réalisme cru. Il a mis dix ans. Tout au long de l'écriture, il a cherché des contacts dans l'édition américaine et européenne. Ce n'est qu'en 1964 qu'il signe avec les éditions Kindler, à Munich... Mais le directeur marketing, estimant que le peuple allemand n'est pas mur pour une approche aussi crue de la shoah, sape la sortie du livre. Sur les 1200 exemplaires du tirage, la moitié est réservée à la presse et aux libraires. Nacht, épuisé en trois semaines, n'est pas réimprimé. A l'inverse, aux Etats-Unis, le livre, paru en 1966 chez Doubleday, reçoit un écho très positif. Au printemps 1971, The Nazi and the Barber est un succès de librairie encore plus massif. Malgré ces succès, la vie d'Hilsenrath change peu au cours de ces années américaines. Jusqu'à son départ pour l'Allemagne, en 1975, il est serveur dans un delicatessen. Il travaille au noir, ne paie pas d'impôts et reçoit chaque soir son salaire en liquide. En vingt-cinq ans, il n'est pas parvenu à nouer d'attaches dans ce pays : il est toujours l'émigré européen. Il décide de rentrer en Allemagne, où il cherche à nouveau un éditeur. Plus de soixante maisons d'édition le refusent jusqu'à ce qu'en 1977, Helmut Braun, petit éditeur de Cologne, relève le gant. Der Nazi und der Friseur est publié pour la première fois en allemand, et un article du Spiegel rend l'auteur célèbre du jour au lendemain. Nacht reparaît en 1978, Fuck America sort en 1980. Le Conte de la pensée dernière, qui reçoit en 1989 le prix Döblin, donne des ailes à Hilsenrath... Les prix s'accumulent, ainsi que les succès et les signes de reconnaissance institutionnelle. En 2003, commence la publication aux éditions Dittrich des dix volumes de ses oeuvres complètes.Les thèmes de ses livres ? Le Ghetto (Nacht), l'immigration (Fuck America), les tragédies des Arméniens (Le Conte de la pensée dernière)... Le tout sur un mode burlesque, ou grotesque, d'une verve parfois rabelaisienne, puisant dans les légendes juives, et trouvant dans le conte, ou le mythe, une forme d'expression privilégiée : moyen de combattre l'oubli tout en mettant l'horreur à distance. © éditions Attila