Steve McQueen
ABACA

"Le Royaume-Uni est tellement à la traine quand il est question de représentation, c’est honteux."

Steve McQueen demande plus de diversité dans l’industrie du cinéma britannique. Après avoir dédié ses deux nouveaux films, Lovers Rock et Mangrove, à George Floyd (un Afro-Américain de 46 ans tué par un policier blanc lors d’une interpellation à Minneapolis le 25 mai dernier), le réalisateur du bouleversant 12 Years a Slave s’est exprimé dans une tribune poignante publiée dans le Guardian. Il y dénonce le manque de représentation des minorités vivant au Royaume-Uni, devant et derrière la caméra. 

"L’année dernière, je me suis rendu sur un plateau de tournage à Londres. J’ai eu l’impression de quitter un environnement, Londres, et d’entrer dans un nouveau monde, un endroit qui m’est étranger, explique-t-il. Je n’arrivais pas à croire qu’il y ait toute cette ‘blancheur’ sur le plateau. J’ai réalisé trois films aux États-Unis et c’est comme si rien n’avait vraiment changé entre temps en Angleterre. Le Royaume-Uni est tellement à la traine quand il est question de représentation, c’est honteux."

Le metteur en scène prend pour exemple le tournage de la série d’anthologie Small Axe, qu’il a réalisée l’année dernière pour la BBC et qui sera distribuée prochainement par Amazon. Une mini-série composée de six épisodes désormais montés en cinq longs-métrages, qui prennent pour décors le Londres des années 1960 - une décennie particulièrement marquée par les tensions raciales (Lovers Rock et Mangrove, tous les deux sélectionnés à Cannes, font partie de Small Axe).

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"Lorsque nous avons quitté Londres pour Wolverhampton pour tourner deux épisodes, nous avons bénéficié d’allégements fiscaux, d’avantages, de soutiens financiers, mais les seules personnes non blanches étaient les chauffeurs et un électricien, déplore-t-il. La triste réalité, c’est qu’il n’y a pas d’infrastructures pour soutenir et recruter des équipes dirigées par des minorités britanniques. Et si il n’y a pas d’infrastructures, c’est parce qu’il n’y a pas eu suffisamment de volonté et d’urgence pour les mettre en place."

Pour remédier à ce manque de représentation sur le sol britannique, le réalisateur oscarisé propose de mettre en place des quotas et encourage les sociétés de production à se tourner vers de jeunes talents de couleurs, plutôt que d’engager presque exclusivement de jeunes acteurs blancs. "Nous devons mettre en place une infrastructure qui permettra aux minorités britanniques - qui représentent 14% de la population - d’accéder à des emplois, à des programmes de formation et d’apprentissage pour aller plus loin dans leurs carrières."

"Nous avons fait de notre mieux avec Small Axe, mais ce n’était pas assez bon. La culture de l’industrie doit changer. Ce n’est pas sain. C’est mal. Et pourtant, les gens du milieu font comme si de rien n’était. Ce n’est pas normal. Rien de tout ça n’est normal. C’est manifestement mal. C’est du racisme avéré. C’est un fait. J’ai grandi avec ça. Je le sais."

Et de conclure : "Oui, j’en ai marre. Je ne veux plus jamais entendre quelqu’un dire ‘Oh oui, c’est terrible’. J’ai entendu ça une centaine de fois. Tout le monde est d’accord, mais rien ne bouge. Ce que je veux, c’est voir du changement, pas entendre des excuses. Je suis juste totalement exaspéré par ce manque d’efforts. C’est le moment pour un vrai changement."

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