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 A Cannes où il avait été présenté en ouverture de La Semaine de la critique, Les Anarchistes avait bénéficié d'un joli petit buzz. Nous sommes en 1899 et Wajeman relate le parcours d'un flic infiltré dans les cercles anarchistes de la fin du XIXème siècle. Violence, amour et trahisons... Ce qui frappe d'abord à la vision de la bande-annonce c'est la beauté du cadre et de la palette. Les Anarchistes ressemble à un beau tableau d'époque, mais sans jamais viser la fresque pompière. Des corps qui se frôle, un gros plan sur des visages, des décors clos, un coin de salon : le cinéaste part de détails, de récits intimes et intériorise l'action. On est dans une toile de Caillebotte (et pas que pour ce gris caractéristique) ou de Pissaro, dans les Cahiers Rouges de Vuillaume ou un bouquin de Calet  : on partage le quotidien des personnages, du peuple.Mais tout ça ne fait pas un bon film. Au mieux, un beau setting. La vraie belle idée qui transparaît clairement dans ces images, c'est que Wajeman a voulu mêler la violence du sentiment (amical et amoureux) à celle du combat politique. Le rythme de la bande-annonce épouse celui du film puisque, à mesure que la lutte s'intensifie, que le danger grandit, Les Anarchistes passe d'un rythme lent, étal, factuel, à une nervosité et à un emballement du discours et de l'action qui enfièvre la pellicule. Ca n'est possible que par la grâce des comédiens ici surpuissants. Wajeman avec un art du portrait (quasiment graphique), fait exister ses principaux personnages et les transforme en véritables héros. Tahar Rahim, flic infiltré de plus en plus empêtré dans ses contradictions; Adele Exarchopoulos, Louise Michel passionnée, belle à mourir, Swann Arlaud, habité, orgueilleux, impressionnant de conviction, de violence et de mystère... Tous fébriles, tous formidables.Finalement, cette bande-annonce donne un reflet fidèle du film : on arrête la vidéo, non pas avec l'envie d'aller foutre le feu à la banque du coin, mais plutôt avec celle d'aimer passionnément. Avec le sentiment d'avoir pris un bain de nostalgie romantique, avoir emprunté les chemins d'une époqueComme disait Courbet : "tous ces rêves ont fui et bientôt nous serons condamnés à baser notre avenir sur le souvenir". C'est aussi (surtout) de cela que parle Les Anarchistes