Le film de Jean-Marc La Vallée revient sur M6 après Les Evadés.
Dans Wild, Reese Witherspoon se met à nu - au propre comme au figuré. Reese joue Cheryl, une accro au sexe et à l’héroïne qui décide de se désintoxiquer toute seule en faisant une randonnée de 1 700 kilomètres… Un voyage aussi spirituel que physique, magnifiquement shooté par le surdoué Jean-Marc Vallée (Dallas Buyers Club) et produit par Reese elle-même (tout comme Gone Girl de David Fincher, mais oui) d’après une histoire vraie. Car avant d’être un film, Wild est le récit de la rédemption de Cheryl Strayed, plongée dans une spirale autodestructrice après une tragédie. A sa sortie, en 2015, Première avait rencontré l'actrice et productrice de ce projet ambitieux, ainsi que la femme dont l'histoire a été adaptée au cinéma par Nick Hornby (High Fidelity). Flashback.
Première : Reese, pourquoi avez-vous choisi de faire un film à partir de Wild ?
Reese Witherspoon : J’ai eu le livre quatre mois avant sa sortie aux Etats-Unis. Je n’ai pas décroché, j’ai fondu en larmes dans l’avion où je me trouvais en lisant la fin… J’ai appelée Cheryl sitôt atterrie pour lui proposer de faire un film.
Cheryl Strayed : Ce n’est pas un hasard. J’avais envoyé directement le manuscrit à Reese via son agent. Je savais qu’il y avait du potentiel là-dedans et Reese est la seule personne à pouvoir porter un projet pareil aujourd’hui.
Reese : Ca me semble logique de produire mes propres films. Il faut profiter de cette opportunité. J’admire beaucoup Angelina Jolie pour ce qu’elle fait. Etre productrice est une extension de mon travail d’actrice. En fait je ne suis pas toute seule à produire le film, ma partenaire Bruna Papandrea fait aussi un boulot énorme dans notre compagnie Pacific Standard. C’est le développement du script qui a pris le plus de temps.
Vous avez coupé beaucoup du livre (inédit en français, NDLR) ?
Reese : Pas vraiment. Le premier montage du film durait 2h15, il dure 1h55 en final cut. On a dû épurer à peine plus. Il y a ce passage à la fin du livre où Cheryl s’effondre et livre une espèce de diatribe contre elle-même. C’est sublime, ça vous mettait à genoux mais ça ne fonctionnait pas dans le film. On ne l’a pas tourné.
Cheryl, qu’est-ce qui était le plus difficile, s’exposer avec le livre ou le film ?
Cheryl : Bonne question. Avec le film, parce que je n’avais pas de contrôle dessus. Mais ils ont été hyper respectueux, ils m’ont demandé mon avis à de nombreuses reprises… Avec le recul j’ai écrit le bouquin de façon très candide, mais en fin de compte c’était moi qui décidais des mots utilisés. Le film est la somme de trois visions : celles de Reese, de Jean-Marc et de Nick (NDLR : Nick Hornby, le scénariste). Autant de chances que ça ne marche pas. Le résultat est inespéré.
Il faut parler des scènes de sexe très frontales…
Reese : Ca m'a beaucoup angoissée de préparer ces scènes. J’ai essayé pas mal de trucs pour me calmer, comme la méditation. Et je suis même allée voir un spécialiste de l’hypnose. Ce qui m’a débloqué c’est de parler avec Cheryl, de savoir qu’elle avait confiance en moi. Si j’ai choisi consciemment de développer Wild en-dehors des gros studios c’est parce qu'on parle drogue et qu'on montre du sexe très cru. Je ne voulais pas qu’un gros studio s’en mêle et dilue la puissance émotionnelle de l’histoire. Le point crucial c’est quand même l’honnêteté de Cheryl. Qu’elle raconte tout ça à des étrangers.
Cheryl : La phrase que tu as honte d’écrire, celle que tu retires et finis par laisser, c’est celle qui choque le plus, mais c’est aussi et surtout celle pour laquelle on te remercie. Celle qui finit par atteindre les gens. Parce qu’on atteint la vérité. Et il reste beaucoup de ces phrases dans le film.
Reese : Hé, après tout, c’est moi la productrice, je peux virer ce que je veux du film ! (rires) Les scènes de sexe ne représentent que 3% du film…
Pour quelle scène Cheryl vous a le plus aidée ?
Reese : Elle était là le jour où j’ai tourné la scène de sexe dans l’allée derrière le diner. Ma fille de 15 ans aussi. Elle me demandait « est-ce qu’il y aura du sexe explicite dans le film ? Pourquoi tu fais ça ? » Je lui ai dit que si Cheryl a eu le courage d’écrire ces scènes sans se donner le beau rôle, je pouvais aussi le faire, je devais le faire. En tant qu’artiste, je devais être aussi courageuse qu’elle. Essayer des choses que je n’avais jamais essayées. La veille du tournage j’ai envoyé un mail à Cheryl, « comment tu peux me faire ça ? » (rires) C’est la troisième fois que je joue une personne ayant vraiment existé, mais c’est la première fois que cette personne est là pour m’accompagner. Je n’ai jamais rencontré June Carter Cash. Elle est morte peu de temps avant que l’on commence Walk the Line. J’ai dû regarder des centaines d’heure de vidéo sur elle, rencontrer des personnes qui l’ont connue.
Le film raconte l’histoire d’une femme qui se bat pour se réinventer. En fait c’est l’histoire de Reese productrice dans un Hollywood machiste ?
Reese : Vous allez dire que je suis naïve ou ignorante, mais je n’ai jamais ressenti de contraintes masculinistes dans ma carrière. Je ne pense pas ma carrière en termes de contrainte. Je me dis juste que je dois abattre encore plus de taf pour réussir. C’est un peu effrayant d’être productrice aujourd’hui.
Interview Sylvestre Picard
Bande-annonce de Wild de Jean-Marc Vallée avec Reese Witherspoon, Gaby Hoffmann, Laura Dern et Thomas Sadoski :
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