Une version revue et corrigée du Cyrano de Bergerac de Rostand dans l’Amérique d’aujourd’hui. Une romcom au charme fou
Une romcom qui cite Platon, Camus, Sartre, Casablanca et Les Ailes du désir… Voilà un geste kamikaze. Car en cas de ratage, ces références peuvent vous conduire très vite tout droit au cimetière des prétentieux. La réalisatrice Alice Wu ne verse jamais dans cet écueil et signe à l’inverse un film ludique, malin. Bref réjouissant. Découverte avec Saving grace – inspiré par son propre quotidien de lesbienne au cœur de la communauté sino-américaine – elle revisite ici Cyrano de Bergerac en jouant avec les genres et les sexes. Son Cyrano à elle s’appelle Ellie, lycéenne introvertie et intello qui – d’abord pour l’argent, ensuite par plaisir – va aider un de ses camarades de classe, adorable mais un peu balourd, à déclarer par sa plume (ou plutôt ses SMS) sa flamme à celle qu’il aime. Un petit jeu qui se complique quand le cœur d’Ellie s’emballe à son tour pour cette même jeune femme, très populaire dans leur lycée, quasi- fiancée et issue d’une famille ultra- religieuse. Autant de détails qui vont complexifier ces petits jeux de Cyrano, Christian et Roxane des temps modernes. L’intrigue paraît cousue de fil blanc. Elle l’est en partie. Mais ce voyage en terrain connu se déguste cependant sans modération. Pour précisément cette manière dont Alice Wu s’inscrit pleinement dans un genre ultra- codifié en s’évertuant à creuser l’écriture de ses personnages – et leurs contradictions - plutôt que chercher à renverser la table. Ce qui donne naissance à une oeuvre profondément attachante, célébrant le droit à la liberté d’aimer qui on veut sans verser dans le piège du film-manifeste.
Commentaires