Men in Black III
Sony

La comédie de SF revient dimanche soir sur TFX.

Après le carton -et la déception critique- de Men In Black 2 en 2002, il aura donc fallu dix ans à Men In Black 3 pour sortir de son trou noir et trouver le chemin des salles obscures. Problèmes de script, d'egos, de tournage, d'acteurs ? Tout cela à la fois ? Il aurait fallu l'aide des Hommes en noir pour faire un tri définitif dans les rumeurs folles et autres théories conspirationnistes pour faire toute la lumière sur la genèse chaotique de MIB3. Qui, a l'arrivée, est pourtant d'une surprenante qualité. En attendant la déclassification des archives de Sony/Columbia, mettez vos lunettes noires afin d'éviter d'être flashé par le neurolaser effaceur de mémoire des MIBs.
Par Sylvestre Picard.

Men in Black III : ils remettent le costume dimanche soir sur TF1

La vague du premier Men In Black
Juillet 1997 : Men In Black, le film gagne 590 millions de dollars de recettes mondiales pour un budget de 90. Un succès mérité. Avec sa mythologie conspirationniste qui parodie -et enterre- gentiment X-Files, son style synthétisant les codes de Tim Burton (un score signé de Danny Elfman, le collaborateur attitré de Burton), les SFX impeccables de Rick Baker, son script de bon vieux buddy movie (Tommy Lee Jones joue le vieux blanc "I'm too old for this shit" tandis que Smith fait le jeune black volubile), le film est d'une fraîcheur et d'une efficacité redoutable. Bref, tout était prêt pour instaurer Men In Black en licence durable : deux suites immédiatement signées, un jeu vidéo, quatre saisons d'un dessin animé diffusé sur WB Kids de 1997 à 2001. Et, of course, le succès de la chanson du générique de fin interprétée par Smith, et au refrain qui se voulait prémonitoire : "here come the Men In Black" -les Men In Black débarquent.


Pourquoi David Schwimmer a refusé le rôle principal de Men in Black

Men In Black 2, carton mais bidon 
En 1999, le flop de la nouvelle collaboration Sonnenfeld/Smith, Wild Wild West (adaptation grand écran de la série télé Les Mystères de l'ouest, vendue comme un Men In Black western-steampunk) prouve que le duo ne transforme pas tout en or. Et démontre surtout que le public voulait plutôt Men In Black 2, qu'il faudra attendre quatre ans. Bien que mis en porte-à-faux avec l'image du Will Smith d'alors (qui venait d'être nommé à l'Oscar pour Ali de Michael Mann), le film explose au démarrage (87,2 millions de dollars le week-end de sa sortie, le record en son temps) avec une sortie stratégiquement placée au week-end férié du 4 juillet 2002. Au final, pourtant, les chiffres de MIB2 sont plutôt décevants : le film ne récolte que 190 millions de dollars aux Etats-Unis. Il se fait en effet défoncer par le public et la critique, déçus par un script hyper paresseux ne retrouvant à aucun moment la fraîcheur du premier -le scénariste David Koepp s'était d'ailleurs barré de MIB2 pour aller bosser sur le scénario de Spider-Man de Sam Raimi. Le pire ennemi du film fut toutefois le 11-Septembre : à la suite des attentats, Sonnenfeld a dû retourner une nouvelle fin, qui se déroulait initialement dans le World Trade Center. 

Le caméo de Michael Jackson ne fut pas non plus apprécié puisque le King Of Pop n'était pas du tout en odeur de sainteté à cette époque ; le tournage commence avec 30% du scénario... Au final, MIB2 est un succès financier. Commence alors la longue et douloureuse phase de préproduction de MIB3. Qui va durer jusqu'en 2009, du fait de ses acteurs qui semblent reporter le projet aux Calendes grecques. Will Smith continue de rester le number one d'Hollywood (I, Robot, Je suis une légende sont d'énormes succès public) et Tommy Lee Jones persévère dans le cinéma d'auteur yankee (Dans la vallée d'Elah, No Country For Old Men), tout en découvrant la réalisation avec le remarqué Trois enterrements. Bref, du trio vainqueur de MIB, c'est le réalisateur Barry Sonnenfeld qui semble avoir le plus besoin de s'y remettre. Sonnenfeld a fait un énorme four avec son film Camping Car (2006) avec Robin Williams, tout comme avec l'éphémère mais remarquée série Pushing Daisies (2007-2009).


Men in Black 3... dix ans plus tard
Finalement, l'insistance paye et la production du film est officiellement lancée par Sony le 1er avril 2009 -ça ne s'invente pas. Le scénariste Etan Cohen (Tonnerre sur les tropiques) est embauché. En juin 2010, le studio engage David Koepp pour réécrire le script. Puis, en novembre, Jeff Nathanson (Rush Hour 2 et 3, Attrape-moi si tu peux...), qui avait déjà travaillé avec Koepp sur Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal, vient à la rescousse du scénario. Qui finit officieusement par trouver son pitch dans un épisode du dessin animé télé Men In Black, The Head-Trip Syndrome, diffusé en décembre 1997 et dans lequel un alien voyage dans le temps afin d'éliminer les fondateurs des MIB. Le choix de placer l'intrigue dans les années 60, avec un jeune agent K, était loin d'être innocent : il s'agissait de prévoir le fait que Tommy Lee Jones risquait de ne pas rempiler... Même si aujourd'hui, Sonnenfeld dit que ce pitch compliqué de voyage dans le temps est la principale raison du long développement du film depuis 2002. Ben tiens !

Alors que le film vient de commencer son tournage, le script n'est pas terminé. "Sur le plateau, des scénaristes devaient écrire les dialogues juste avant  que les acteurs ne jouent", cafte le maquilleur Rick Baker. Sonnenfeld, en mars 2012 (soit quelques mois seulement avant la sortie de MIB3), déclare au magazine Empire qu'"en commençant le film, on savait que le deuxième et le troisième acte n’étaient pas finalisés". Tout cela ralentit le tournage, et surtout augmente le coût du film. D'un budget prévu de 200 millions (alors que MIB2 en avait coûté 175), le film passe à 215 hors promo et pub. On est toutefois loin d'une "explosion" du budget, comme la rumeur essaie de le faire croire.

La valse des acteurs
Au printemps 2011, alors que le tournage fait un break (officieusement de peur de ne plus pouvoir profiter d'une aide fiscale de la part de la ville de NY), Sharlto Copley (District 9) décline -sans doute pour des raisons financières- le rôle d'un alien halluciné pouvant voir l'avenir et est remplacé par Michael Stuhlbarg (A Serious Man). Rip Torn, qui joue Z, le chef des MIBs, est également absent du film. Torn, connu pour ses problèmes d'alcool et son comportement erratique, a été condamné en décembre 2010 à une peine de deux ans et demi de prison pour avoir commis un cambriolage à main armée. Le scénario fait alors mourir son personnage, et place Emma Thompson à la tête des MIBs (Alec Baldwin, un temps envisagé pour le rôle, a préféré tourner la comédie musicale Rock Forever avec Tom Cruise). Au temps pour les rumeurs qui parlent d'acteurs partis en claquant la porte d'un tournage supposément chaotique... On a également beaucoup parlé de la caravane perso de Will Smith, longue de 16 mètres, qui aurait gêné les New-Yorkais lors du shooting : un incident finalement tout à fait mineur mais qui fut porté en épingle par la presse, qui y voyait un symptôme des problèmes du tournage. Tournage qui s'achève fin 2011, pour une sortie prévue fin mai 2012.

Un résultat miraculeux
Avec tous ces antécédents, on pouvait donc s'attendre à ce que Men In Black 3 se plante en beauté. Et pourtant : incroyablement fun et fluide, bourré de fulgurances pop (les sauts dans le temps de Will Smith, assez dingues et tirant à merveille parti de la 3D), retour à la fraîcheur du premier film avec ses gags doucement subversifs (la scène du chocolat au lait va sans doute rester)... "Parfois, un tournage se passe en douceur, mais en découvrant le résultat sur grand écran, vous vous dites 'Merde, qu'est-ce qui s'est passé ? Où est le film génial qu'on était censés faire ?' D'autres fois, comme avec Men In Black 3, dont la genèse a pourtant été complexe et très politique, la surprise est totale et on se dit : 'vraiment ? C'est si bon que ça ?'" Cet aveu, qui vient de Josh Brolin himself dans les colonnes de Première, résume bien le feeling du film : MIB3 est victime de sa réputation.

Au final, Sonnenfeld a livré un blockbuster assez clean et propre, qui ne porte que très peu les stigmates de ses dix ans de gestation douloureuse (seul Etan Cohen est crédité au générique en tant que scénariste). Un véritable exploit en soi. "Back in time", proclame la tagline US du film. Soit "de retour dans le passé" (c'est un bon film familial à l'ancienne), mais aussi "de retour à temps". Juste à temps.

Bande annonce :        


Et depuis ? Un nouveau Men in Black est sorti durant l'été 2019 au cinéma, soit 7 ans après la sortie du III, mais le casting a été chamboulé. Ce sont à présent Tessa Thompson et Chris Hemsworth, déjà partenaires dans Thor 3, qui en sont les héros... est c'est assez oubliable.

Men in Black International : Rien de neuf [Critique]