Avec son œuvre marginale, à contre-courant des standards du cinéma français, le cinéaste a brillé pendant plus de 50 ans avec des films ambitieux devenus cultes au fil du temps.
Michel Deville est mort, et avec lui toute une histoire du cinéma français. Une histoire à contre-courant, en rapport avec une certaine idée de la Nouvelle Vague, bien que le cinéaste en était complètement externe, avec une série de films souvent discrets, presque confidentiels.
Au début de sa carrière, dans les années 1950, alors qu’il est au beau milieu de sa vingtaine, Michel Deville fait la rencontre d’Henri Decoin, cinéaste phare du cinéma français des années 1930 et 1940, qu’il va accompagner sur plusieurs projets dans la décennie qui suit, notamment sur le culte Razzia sur la chnouf, qui réunissait les figures de l’époque, Jean Gabin, Marcel Dalio, et Lino Ventura.
Il enchaîne avec un premier film en 1958, Une balle dans le canon, co-réalisé avec Charles Gérard. En 1961, il crée sa propre société de production, Éléfilm, qui va lui permettre de réaliser Ce soir ou jamais, premier long-métrage mémorable dans lequel brillait la figure mystique d’Anna Karina.
S’ensuivent Adorable Menteuse (1962) , Lucky Jo (1964) ou encore Tendres Requins (1967), films relativement méconnus dans le paysage français, avant de connaître un premier grand succès en 1968 avec Benjamin ou les mémoires d’un puceau, conte transgressif se déroulant au XVIIIe siècle dans lequel Pierre Clémenti découvre sa sexualité au contact des grandes “dames” du cinéma français Catherine Deneuve et Michèle Morgan.
Les films de Deville continuent d’explorer le couple sous toutes ses formes au cours des années 1970 et 1980, toujours dans une idée de cinéma entre transgression et légèreté, avec L’Ours et la Poupée (1970), Raphaël ou le Débauché (1971), Le Mouton Enragé (1974), avec Jean-Louis Trintignant et Romy Schneider, ou encore Eaux Profondes, toujours avec Trintignant, en 1981.
C’est toutefois le novateur Dossier 51, film d’espionnage devenu culte au fil du temps, malgré un succès modeste dans les salles de cinéma, qui fera la renommée du cinéaste, lui permettant au côté de Gilles Perrault de remporter le prix du meilleur scénario aux César 1979.
La carrière de Michel Deville continue à se dérouler au fil des années 1980 et 1990 au travers de films toujours plus corrosifs, où la sexualité s’affiche ouvertement, comme dans Nuit d’été en ville, où Marie Trintignant et Jean-Hughes Anglade sont nus durant la totalité du film, mais également avec Péril en la demeure et La Lectrice, sommets des années 1980, bijoux d’analyses autour du couple et du désir.
Au cours de sa carrière, Michel Deville aura récolté deux Prix Louis-Delluc (en 1967 pour Benjamin ou les mémoires d’un puceau et en 1988 pour La Lectrice), ainsi qu’un César du meilleur réalisateur tant attendu en 1986 pour Péril en la demeure. Le cinéaste est mort le 16 février à l’âge de 91 ans.
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