Super-héros malgré lui
Julien Panié

Philippe Lacheau et Julien Arruti reviennent sur les origines de leur nouveau film.

Mise à jour du 13 juin 2022 : Alors que Super-héros malgré lui est à présent disponible en DVD et blu-ray, retour sur la création de la nouvelle comédie de la Bande à Fifi (Babysitting, Alibi.com...). En début d'année, Philippe Lacheau et Julien Arruti présentaient ce projet de parodie de super-production à la Marvel dans Première. Flashback.

Interview du 17 janvier 2022 : Retour à l’Alpe d’Huez ! Après une cuvée 2021 annulée pour cause de Covid, le festival international du film de comédie de l’Isère revient en grande forme dès ce soir. Au programme pour l’ouverture de cette 25e édition, Philippe Lacheau et toute sa bande, venus présenter en avant-première Super-héros malgré lui. L’histoire de Cédric (Lacheau), acteur raté qui décroche sur un coup de chance un rôle dans un film de super-héros. Après avoir emprunté la voiture de tournage, il est victime d’un accident qui lui fait perdre la mémoire. Encore vêtu du costume et entouré des accessoires du film, il croit réellement être un justicier masqué… Après son adaptation de Nicky Larson, Philippe Lacheau revient à l’abattage de gags potaches avec un drôle d’objet, quelque part entre comédie romantico-parodique et film d’action. Un mélange des genres que nous racontent l’acteur/réalisateur et son compère Julien Arruti.

Comment naît un film de la bande à Fifi ? C’est un concept avant tout ?
Philippe Lacheau
 : Il n'y a pas de règle. L'idée de Super-héros malgré lui, on l'a eue il y a au moins cinq ou six ans. Sauf qu'à la base, il ne s'agissait pas de faire un film sur les super-héros mais plus de détourner La Mémoire dans la peau. On s'est dit qu'il y avait un axe de comédie à trouver avec le sujet de l'amnésie et donc à la base, c’était une vraie parodie de Jason Bourne : l'histoire d'un acteur qui tournait un film d’espionnage, perdait la mémoire et se prenait réellement pour un espion. En l'écrivant, on s'est dit que pour la suite, il allait revivre la même chose mais sur le plateau d'un film de super-héros.

Julien Arruti : Et en fait l’idée était si bonne qu’on est repartis du début, on a tout réécrit.

PL : On trouvait ça plus drôle et plus fou de parler de super-héros. Et surtout, ça nous amenait tout un univers.

C’est pour ça que le film n’est pas une vraie parodie de films de super-héros, comme on aurait pu le croire.
PL
: Non, ce qui nous intéressait surtout c'était l'histoire de la perte de mémoire.

JA : C'est le « malgré lui » qu'on trouvait cool. Plus que de faire un vrai film de super-héros.

PL : Et ça rend l'histoire un peu plus originale qu'une simple parodie, avec un super-héros loser... Et puis ça avait déjà été un petit peu fait avec Hancock. Le sujet était essoré. 

JA : Ça parle peut-être plus à tout le monde d'avoir comme personnage principal un mec de tous les jours qui se prend pour un super-héros.

Comme Nicky Larson, Super-héros malgré lui contient de nombreuses scènes d’action. C’est quelque chose d’assez nouveau dans vos films.
PL : Mais à chaque fois ça se prêtait au sujet. Ce n'est pas une envie de faire de l'action pour faire de l’action, de forcer le scénario pour que ça rentre. Pour autant, c'est vrai qu'on aime bien ça, ça ramène de la « production value » comme on dit. C'est du bonus : le but est d’abord de faire rire les gens. Je sais qu'aux États-Unis, dans des productions comme Fast & Furious, ils commencent par définir les grosses scènes d'action du film, et ensuite ils construisent l'histoire autour. Nous on ne fait pas ça, mais il est vrai qu'une scène qu'on trouve cool, on va essayer de la mettre dans le film.

JA : Par contre il arrive qu’on construise des scènes autour d'une vanne. Quand on a un super gag, on se dit qu'il faut réussir à l’inclure. Mais de manière naturelle, pour que ce soit pas tiré par les cheveux. Surtout pour moi (Il se marre en frottant son crâne chauve).

Mais l’arrivée de l’action dans votre cinéma est très raccord avec votre humour souvent basé sur le slapstick.
JA
: T'appelles ça comment ?

Le slapstick, une forme d'humour physique. C'est une chose à laquelle vous réfléchissez beaucoup ?
PL
: Pour vous dire la vérité, je préférerais qu'on soit meilleurs dans les vannes de dialogues.

Parce que dans votre esprit c'est moins noble, l'humour « physique » ?

PL : Non, parce que ça coûte moins cher ! Franchement, si t’es fort en vannes de texte, que tu ne mets que des punchlines et que le film est hilarant, j'achète. Parce que tu tournes beaucoup plus vite et le film coûte beaucoup moins d'argent ! Nous, on a un souci - enfin, je ne sais pas si c'est un souci -, c'est que les vannes qui nous viennent sont plutôt visuelles et compliquées à faire. Donc on met beaucoup de temps à les tourner. Du coup, parfois, on essaie de trouver plus de punchlines.

JA : Mais je crois aussi que quand les gens viennent voir nos films, il s'attendent aussi à voir du gag, du burlesque...

Vous avez toujours conscience de ce qui va faire marrer votre public ? Vous pensez vos films comme ça ?
JA
: Non, on pense déjà à ce qui nous fait marrer nous… et on croise les doigts pour que ça plaise au public.

PL : Et quand on a terminé le scénario, on se fait des pronostics sur ce qui fera le plus rire dans le film. On annote le scénario et c'est amusant de voir qui s'est planté.


Nicky Larson - Philippe Lacheau : "La comédie, ce n’est pas une science exacte"

Est-ce que vous avez conçu Super-héros malgré lui comme une sorte de retour en arrière, après Nicky Larson qui n’a pas été le carton attendu ?
PL :
Non. Et puis il y a plein d'analyses possibles sur Nicky Larson. Quand on a annoncé le film, on s'est fait défoncer comme ça n’était jamais arrivé. On était choqués. Ça a été dur de tourner avec ça en tête. Mais le vent a changé de sens une fois que le film est sorti. On nous pose la question tout le temps aujourd’hui : « Quand est-ce qu'il y aura une suite ? » Disons qu’on a peut-être pris un mauvais départ, qu’on a mis du temps à convaincre les gens.

JA : On a été déçus mais on a un peu relativisé au contact des professionnels du milieu qui nous disaient qu'il n'y a pas beaucoup de films français qui font 1,7 million d’entrées. On était un peu des enfants gâtés, habitués à faire deux ou trois millions.

PL : Et puis - on va dire que ce sont des excuses de mytho - mais il y a eu une météo spectaculaire en février 2019, il faisait 20 degrés ! Et tu sais que quand il fait beau comme ça, la fréquentation s’écroule. S'il n'y avait pas eu trois semaines de beau temps - et c'est Sony qui nous le dit -, on faisait les deux millions. En plus Alita et Escape Game sont sortis en même temps et ils s'adressaient un peu au même public.

Quelle est votre cible, justement ? Qui est votre public ?
PL
: On a plutôt un public de jeunes.

JA : Ados, pré-ados.

PL : Même jusqu'à 25 ans, mais en tout cas ce sont des gens qui ne n’avaient pas forcément entendu parler de Nicky Larson. Le public qui connaissait était plus âgé, de jeunes adultes qui ont des enfants en bas âge. Et ce sont ceux qui vont le moins au cinéma !

JA : Le mélange action/comédie était peut-être aussi un peu déroutant pour le public. Pas mal de gens ont dû se questionner.

PL : La promesse n'était peut-être pas claire. Mais après on a fait découvrir Nicky Larson à toute une nouvelle génération. Ça nous a aussi peut-être ramené un nouveau public qui ne regardait pas nos films, qui ne nous calculait pas.

C’est intéressant cette idée de « promesse claire », car tous vos films se focalisent un concept extrêmement défini. 
PL
: C'est vrai qu'on aime bien les films à concept, l’idée forte qu'on va étirer tout au long d’un film. Maxime Saada, le patron de Canal+, nous a dit : « Ce qui est bien avec vos films, c'est qu'on peut les résumer dans un ascenseur ! » Mais en tant que spectateur, j'aime ça aussi. Quand on me pitche un film, j'aime bien me dire : « Oh putain bonne idée, j'ai envie de le voir ».

Mais c’est peut-être aussi cette simplification qui vous empêche d’élargir votre public. J’ai l’impression que vous avez un noyau hyper solide de fans, et que ce sont eux que vous cherchez avant tout à contenter.
JA
: Quand on écrit, on ne pense pas à ça. On essaie d'écrire une histoire qu'on veut voir jusqu'au bout, avec de gros gags non-stop. On ne réfléchit pas au public ou à la cible. On écrit comme on a toujours écrit. C'est pour ça qu'on a un public qui nous suit : on reste fidèle à ce qu'on aime faire.

PL : Et si on avait réfléchi comme ça on n'aurait pas fait Nicky Larson. Parce que sur le papier, c'était pas gagné.

JA : On va peut-être faire un film coquin, histoire de changer de cible (Rires.)

PL : Une comédie érotique, mais familiale !

Philippe Lacheau en tournage d'Alibi.com 2