Il n’y a pas que New York, Las Vegas, L.A. ou Chicago dans la cinéphilie américaine. Strictly Criminal nous rappelle que Boston a été le cadre de quelques très grands films noirs. Anthologie en dix titres.
L’étrangleur de Boston (1968)
Richard Fleischer autopsie l’affaire Albert Da Salvo, plombier schizo qui terrorisa la ville de Boston dans les sixties en semant la mort sur son passage – il assassina treize femmes par strangulation. Utilisation géniale du split-screen, qui traduit aussi bien la schizophrénie du tueur que la paranoïa qui grandit dans la ville. L’un des trois ou quatre plus grands films de serial-killer jamais tournés.
L’affaire Thomas Crown (1968)
Boston et le split-screen étaient décidemment à la mode en 1968. Steve McQueen organise un super casse en costume trois-pièces et emballe Faye Dunaway au passage. La belle vie. Du ciné-bulle de champagne, aussi cool et superficiel que L’étrangleur de Boston est blafard et angoissant.
Les Copains d’Eddie Coyle (1973)
Un voyou plus très jeune (Robert Mitchum) est contraint de moucharder pour éviter la prison… Adaptant un polar de George V. Higgins, ancien procureur qui connaissait le petit monde des malfrats de Boston comme sa poche, Peter Yates, le réalisateur de Bullitt, alterne longues plages de conversations maussades et scènes de casse affolantes de tension. Un vrai chef-d’œuvre, injustement méconnu.
Têtes vides cherchent coffre plein (1978)
Le titre français craint un peu (en VO, c’est « The Brink’s Job ») mais a le mérite de souligner le côté très « laid-back », détendu, de ce film que William Friedkin tourna pour faire amende honorable après les excès mégalos (et le gros bide commercial) de Sorcerer. Une reconstitution du braquage de la Brinks, dans les années 50, par une bande de gangsters à la petite semaine, avec Peter « Columbo » Falk au sommet de sa gloire seventies.
Les Anges de Boston (1999)
Un agent du FBI cinglé (Willem Dafoe) traque deux frangins irlandais (Sean Patrick Flanery et Norman « The Walking Dead » Reedus) qui ont du sang sur les mains et du houblon dans les veines. Un rip-off de John Woo et Guy Ritchie, qui bida à sa sortie avant de se construire un destin culte en DVD. On n’a pas les chiffres mais on imagine qu’une grosse partie des galettes s’est écoulée dans le Massachussets.
Mystic River (2003)
L’amour et la colère, l’individu et la communauté, la loi et le désordre… Un grand Eastwood, le portrait tourmenté et dérangeant d’une ville gangrenée par le crime et rongée par la culpabilité. Première adaptation d’un livre de Dennis Lehane au cinéma, avant Gone Baby Gone, Shutter Island, Quand vient la nuit, et Live by night, le prochain Ben Affleck.
Les Infiltrés (2006)
Scorsese délocalise à Boston un néo-classique hong-kongais (Infernal Affairs). Le légendaire patron du crime organisé de la ville, Whitey Bulger (dont Strictly Criminal raconte l'histoire), sert de modèle à Frank Costello, génie du mal démoniaque et flamboyant incarné par Jack Nicholson. Deux stars locales (Mark Wahlberg et Matt Damon) sont devant la caméra, mais le plan final n’est sans doute pas la meilleure publicité faite à la ville – un rat devant la Chambre des Représentants, le symbole d’une Amérique viciée, répugnante et corrompue.
Gone Baby Gone (2007)
Au mitan des années 2000, alors qu’il est au fond du trou, Ben Affleck retourne se faire une santé à Boston, la ville où il a grandi, et dont il racontait déjà la beauté prolo dans son script de Will Hunting. Il s’empare d’un bouquin de Dennis Lehane, place son frangin Casey devant la caméra (en détective à la recherche d’une fillette disparue) et prouve au monde entier qu’un réal’ pas manchot se cachait derrière l’ex boyfriend de J-Lo.
The Town (2010)
Le deuxième épisode du come-back de Ben Affleck suit le même modus operandi que Gone Baby Gone. L’adaptation d’un bon petit polar (Prince of Thieves, de Chuck Hogan), quelques scènes d’action qui tabassent, de la fierté working-class blessée, une nouvelle ode à sa ville chérie. Du cinoche idéal pour le samedi soir.
Equalizer (2014)
La série culte des années 80 se déroulait à New York, Antoine Fuqua la réinvente à Boston pour son adaptation sur grand écran. Un peu longuet, un peu crétin, mais quand même un peu fun, le film repose entièrement sur le charisme monstre de Denzel Washington, extraordinaire en super-vigilante qui écume les bas-fonds et dessoude les bad guys à coups de tournevis.
Strictly Criminal de Scott Cooper avec Johnny Depp, Joel Edgerton, Benedict Cumberbatch sort en salles le 25 novembre.
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