Le réalisateur tchadien de Grigris signe un documentaire saisissant sur les terribles années Hissein Habré.
A la façon d’un Rithy Panh (L’image manquante) ou d’un Joshua Oppenheimer (The Act of Killing), cinéastes préoccupés par la résilience à l’échelle d’une nation, Mahamat-Saleh Haroun (Prix du Jury en 2010 pour Un homme qui crie) filme les rescapés du régime du dictateur tchadien Hissein Habré, qui s’est malheureusement distingué au cours des années 80 en torturant et en massacrant son peuple avant de se réfugier au Sénégal. Ce documentaire éprouvant mais digne recueille à la fois les paroles des victimes et le combat d’une association pour assigner Habré en justice. Il se clôt d’ailleurs sur l’ouverture du procès à Dakar, le 20 juillet dernier, dont nous connaîtrons le verdict le 30 mai, quelques jours après la fin du Festival de Cannes qui offre au film une vitrine méritée.
Quête de justice
Porte-parole du cinéaste, un intellectuel, qui a survécu à la torture, va à la rencontre de ses infortunés compagnons, qui ont perdu la vue, l’usage de leurs jambes ou une partie de leurs facultés mentales. Plus que la vengeance, c’est un désir de justice qui les anime, le seul à même de panser des plaies dont ils porteront les stigmates toute leur vie. Leurs témoignages sont bien sûr édifiants mais surtout nourris d’une incompréhension face à la barbarie, qui interroge sur la nature humaine et ses dérives. La confrontation, mise en scène avec un souci de neutralité heureux, entre une victime et son bourreau révèle combien l’obéissance aveugle, l’effet d’entraînement et l’excès de zèle sont désastreux. On le savait déjà mais c’est toujours bien de le rappeler. CN
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