Ce qu’il faut voir cette semaine.
L’ÉVÉNEMENT
THE CLIMB ★★★★☆
De Michael Angelo Covino
L’essentiel
Une comédie aussi attachante que grinçante autour d’une amitié toxique entre deux hommes, subtilement écrite et mise en scène par Michael Angelo Covino, une révélation.
Ce fut l’une des belles surprises de ce Festival de Cannes 2019 qui restera décidément un millésime d’exception. Pourtant, sur le papier, ce premier long métrage américain avait tout du parfait petit fayot qui cochait deux cases, rendant sa sélection inévitable. Il s’ouvre sur les pentes du col de Vence, non loin de Cannes, ce qui en fait de facto une sorte de régional de l’étape. Ses deux personnages principaux s’emploient à les gravir à vélo, péché mignon du patron de la sélection, Thierry Frémaux !
Thierry Cheze
PREMIÈRE A AIMÉ
TERRIBLE JUNGLE ★★★☆☆
De Hugo Benamozig et David Caviglioli
Jeune chercheur étouffé par une mère possessive, Eliott décide, pour s’en libérer, de partir étudier un peuple mystérieux d’Amazonie appelé les Otopis. Sauf que cette mère, inquiète pour ce fils qu’elle juge inapte à évoluer dans ces terres hostiles, décide de partir à sa recherche au cœur de la forêt amazonienne. Déjà coréalisateurs en 2019 du court-métrage Ma Bataille, Hugo Benamozig (diplômé de la FEMIS section scénario qui a participé à l’écriture de la première saison de Platane) et David Caviglioli (journaliste à L’Obs) s’essaient pour la première fois au format long avec ce film d’aventures sous influences multiples, de Tintin à Y a-t-il un pilote dans l’avion en passant par OSS 117.
Thierry Cheze
TIJUANA BIBLE ★★★☆☆
De Jean- Charles Hue
On connaît Jean-Charles Hue pour ses deux magnifiques longs métrages au cœur de la communauté yéniche, La BM du Seigneur et Mange tes morts : Tu ne diras point. Mais on sait moins que depuis plus de 15 ans, il s’est pris de passion pour Tijuana, ville mexicaine située à la frontière américaine, où il se rend quasiment une fois par an et qui lui a déjà inspiré plus d’une demi-douzaine de courts métrages documentaires. Avec Tijuana Bible, il passe en mode fiction mais une fiction évidemment parfaitement documentée au point que la frontière avec la réalité y paraisse en permanence extrêmement poreuse.
Thierry Cheze
L’OISEAU DE PARADIS ★★★☆☆
De Frédéric Farrucci
À Tahiti, Tevi, jeune assistant d’un député, dragueur et inconséquent, est chargé de veiller sur Yasmina, sa cousine maorie qui semble dotée de pouvoirs mystiques (elle serait maudite d’après sa famille). Entre magouilles politico-immobilières, drame familial, faits divers et légendes océaniques, on se balade d’une ambiance à l’autre et on se perd un peu en chemin. Mais le réalisateur Paul Manate parvient à tisser, en photographiant une Tahiti contemporaine peu vue à l’écran, une jolie ambiance lumineuse, un peu onirique et détendue (les night-clubs de Papeete versus le grand air insulaire et ensoleillé), qui rattache son film à ses cousins amazonien Los Silencios ou thaïlandais Manta Ray, dans laquelle il est justement assez agréable de se paumer.
Sylvestre Picard
PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ
T’AS PÉCHO ? ★★☆☆☆
D’Adeline Picault
Pour “pécho” une fille, Arthur ne trouve rien de mieux que de lui demander des cours de séduction moyennant finance. Ce pitch vous dit quelque chose ? C’est grosso modo celui -inversé- de la série Sex Education dans laquelle le héros, Otis, dispense ses conseils en sexologie aux lycéens de son bahut. Le premier film d’Adeline Picault pousse la comparaison jusqu’à introduire un personnage secrètement gay (loin tout de même de l’excentrique Eric dans la série de Laurie Nunn) et amoureux de son meilleur ami. Beaucoup moins audacieux et frontal que Sex Education, T’as pécho ? réussit finalement mieux ses portraits d’adultes : la mère seule dépassée (Sophie-Marie Larrouy), son amant maladroit (Macaigne) et le père intransigeant envers sa fille (Ramzy Bedia) naviguent joliment entre tendresse et dérision.
Christophe Narbonne
HOTEL BY THE RIVER ★★☆☆☆
De Hong Sang-soo
Le Sud-coréen Hong Sangsoo tourne sans s’arrêter. Du coup, lorsque vous regardez alors qu’il vient tout de juste de présenter en compétition à la Berlinale The Woman Who Ran, voilà que déboule dans les salles un « petit » film de derrière les fagots (du festival de Locarno en l’occurrence !). On peut enlever les guillemets car oui, c’est un petit HSS qui se ronronne un peu. Dans un hôtel, un père un peu largué attend la venue de ses deux fils. Il y a aussi une jeune femme qui va aussi se retrouver seule au bar. On boit, on mange, on discute, tout ça nimbé d’un beau noir et blanc. HSS n’a pas son pareil pour ausculter les dérives accidentelles ou préméditées du quotidien. Le dispositif faussement simpliste dit plus de chose qu’il n’y paraît. Mais dans le cas présent, c’est un tantinet redondant et affecté. En attendant le suivant, on y va quand même.
Thomas Baurez
DREAMS ★★☆☆☆
De Kim Hagen Jense
Voir un film d’animation venu du Danemark n’est pas si courant. Storyboarder aguerri, formé par Disney, le réalisateur Kim Hagen Jensen propose avec Dreams un conte initiatique sur les difficultés à vivre la famille recomposée. Son héroïne, Minna, bouleversée par l’arrivée de sa demi-sœur, va découvrir qu’elle peut changer la réalité en interférant dans les rêves. Ce pitch à mi-chemin entre Coraline et Inception est assez prometteur, mais le résultat est plus conformiste. On regrette que l’animation soit aussi impersonnelle (de la 3D comme on en voit si souvent dans les productions télé) et que les scènes de rêves ne soient pas plus inventives. Si vous avez aimé Vice Versa, vous y retrouverez les ingrédients qui font de Dreams, un sympathique film familial qui sera très apprécié des 7-12 ans.
Sophie Benamon
BLANCHE NEIGE, LES SOULIERS ROUGES ET LES SEPT NAINS ★★☆☆☆
De Hong Sungho
Des princes transformés en nains après qu’on leur a jetés un sort viennent au secours d’une princesse, jeune fille potelée transformée en une beauté craquante par ses souliers rouges… Animateur coréen passant pour la première fois à la réalisation, Sungho Hong revisite ici le conte de Blanche- Neige en s’amusant de l’obsession du paraître. Le résultat se révèle aussi sympathique que divertissant en dépit d’une animation guère révolutionnaire (semblable souvent à du sous- Shrek) et d’une impression que le récit n’arrive jamais à se déployer dans la dinguerie que laisser augurer ses premières minutes. Le message, un peu trop martelé, prime en quelque sorte ici sur les messagers et ce Blanche neige revu et corrigé reste trop scolaire pour convaincre, jusque dans l’utilisation a minima de la vista comique de Melha Bedia pour la voix de l’héroïne. A réserver aux plus jeunes donc.
Thierry Cheze
THE VIGIL ★★☆☆☆
De Keith Thomas
Découvert à Gérardmer, ce premier long nous entraîne à Brooklyn le temps d’une nuit angoissante. A court d’argent, son héros accepte d’assurer la veillée funèbre d’un membre de la communauté juive orthodoxe qu’il vient de quitter et va se retrouver aux prises à des phénomènes surnaturels. A la lecture de ce pitch et malgré l’utilisation d’une mythologie juive peu habituelle dans ce genre de films, l’originalité ne semble guère étouffer ce n-ième héritier de L’Exorciste dont les jumpscares ne font guère sursauter tant ils semblent juste obéir à un respect pur et simple d’un cahier des charges. Par son travail sur le son et une utilisation habile des plans séquences, Keith Thomas se révèle certes doué à créer une atmosphère sous tension. Mais elle est mise à mal par une utilisation maladroite de flashbacks lourdingues révélant les traumas tout aussi lourdauds de son héros.
Thierry Cheze
Reprise
Inception, de Christopher Nolan
Pluie noire, de Shôhei Imamura
Les Adolescentes, d’Alberto Lattuada
Guendalina, d’Alberto Lattuada
Commentaires