Le long-métrage en live action ressort en Blu-ray, agrémenté d’un documentaire inédit en France. Morceaux choisis.
Alors qu’une nouvelle adaptation du jeu vidéo de Nintendo arrivera dans nos salles le 5 avril, le film en live action Super Mario Bros. de 1993 ressort en Blu-ray et DVD. Objet hybride, kitsch et contrarié (en gros, on est entre Les Pierrafeu et Blade Runner), le film, malgré tous ses défauts, n’en reste pas moins un témoignage fascinant de son époque. Et ça tombe bien, puisque cette édition remasterisée est également agrémentée d’un sympathique documentaire, This Ain’t No Video Game, sorti en 2014 outre-Atlantique, et qui a donc mis neuf ans à arriver officiellement jusqu’à chez nous. En tout, 56 minutes pour revenir sur le tournage de Super Mario Bros. (les témoins sont plutôt francs mais les questions ne vont jamais trop les titiller non plus) avec à la clé quelques révélations.
Le film a été tourné dans une cimenterie
« New York est une très grande ville. Mais je voulais qu’on construise le décor en studio, pour que je puisse l’éclairer comme je voulais. Alors on a cherché où on pourrait faire ça, et aucun des studios d’Hollywood n’était assez grand », se souvient le co-réalisateur Rocky Morton. « On a fait des repérages à travers tous les États-Unis. Et on a fini par tomber sur cette cimenterie aux abords de Wilmington, en Caroline du Nord », précise le chef décorateur David L. Snyder (oscarisé pour son travail sur Blade Runner). Une cimenterie abandonnée, haute de cinq étages et longue de plus de 100 mètres, qui lui donnait la possibilité d’imaginer des décors « à une échelle monumentale ». Le New York du monde parallèle allait donc prendre vie ici, même si John Leguizamo (qui incarnait Luigi) reste persuadé que le lieu était toxique : il y avait dans l’air énormément de poussière de ciment, et tout le monde l’inhalait joyeusement (certains se sont mis à porter des masques pour se protéger). Snyder s’est servi des tuyaux et des colonnes qui parcouraient la cimenterie pour les inclure dans les décors du film. Et l’équipe a pu se permettre de construire en dur la rue principale où se déroule une bonne partie de l’action, ainsi que de faire des plans de caméra à trente mètres au-dessus du sol sans utiliser aucun trucage. « Il y avait 10 ou 15 personnes qui bossaient sous mes ordres, sans compter tous les sculpteurs, plâtriers et peintres. C’était un truc gigantesque à faire en dehors d’Hollywood », note David L. Snyder.
De rage, le réalisateur a brûlé son storyboard
Le tournage de Super Mario Bros. est connu pour avoir été extrêmement chaotique. Le script a été remanié de nombreuses fois avant le tournage (les réalisateurs assurent que leur première version était dans l’esprit du Batman de Tim Burton, la version finale en est loin) au point que la situation est devenue intenable pour tout le monde. Et Rocky Morton raconte que « dix jours avant les premières prises de vues, un tout nouveau scénario [leur] est parvenu », signé Ed Solomon (L’Excellente Aventure de Bill et Ted). « Il a fallu s’adapter en urgence à ce script alors que des décors et des props avaient déjà été construits. » Pire, on interdit aux cinéastes de parler au scénariste sous prétexte que le temps presse : « Ils ne voulaient pas qu’on interfère. Ils souhaitaient simplement que Solomon se concentre à réécrire le film pour un public plus jeune. » Morton, qui avait storyboardé toutes les scènes du précédent scénario validé par la production « dans le moindre détail », est sous le choc : tout ce boulot n’a plus aucun sens tant Solomon modifie leur histoire. « Je me souviens avoir brûlé mon storyboard sur le parking (…) Désormais, on allait tourner au fil de l’eau. » Sa complice Annabel Jankel se rappelle que « la pression était énorme. C’était une production incroyablement complexe », mais sans le budget et le temps qui va normalement avec. « On faisait du cinéma guérilla avec du gros matos ». John Leguizamo, qui incarnait Luigi, a mis un moment à sentir le vent tourner : « Un peu avant le milieu du tournage, on a tous compris que ça n’allait pas. ‘’Ho ho… Merde, on est sur le Titanic, c’est ça ?’’ »
Dennis Hopper a pété un plomb
Usé par les changement incessants et forcé de réapprendre ses dialogues en permanence, Dennis Hopper était devenu exécrable sur le tournage. « Ce n’est pas du tout professionnel », « c’est un scandale », hurlait-il à longueur de journées selon les autres acteurs. Et le documentaire nous apprend que quand il recevait ses pages de script le matin, il les mettait immédiatement à la poubelle, persuadé que tout aurait été modifié au moment de tourner ses scènes. Évidemment, il avait raison. Mais au bout d’un moment, voyant que cette désorganisation n’aurait pas de fin, l’acteur a pris sur lui et accepté de faire sagement ce qu’on lui demandait.
Le prologue a été ajouté au tout dernier moment
Alors que le tournage dans la cimenterie se termine, on annonce assez brutalement à Rocky Morton et Annabel Jankel qu’ils peuvent rentrer chez eux. Les dernières scènes à mettre en boîte, qui se déroulent réellement dans les rues de New York, sont tournées avec l’équipe B. Et le producteur Roland Joffé prend le rôle de réalisateur, certainement pour faire des économies… Des mois plus tard, une projection-test de Super Mario Bros. a lieu. La catastrophe : le public ne comprend pas cette histoire de monde parallèle dans lequel les dinosaures auraient survécu et évolué. Alors est prise en urgence la décision d’ajouter un prologue à moitié animé (qui n’est pas sans rappeler la séquence de l’ADN de Jurassic Park), dans lequel une voix off explique très clairement le scénario du film. L’idée de base n’en reste pas moins catastrophique (on la doit à Rocky Morton lui-même, qui pense toujours avoir eu l’illumination) mais au moins les spectateurs ne sont plus perdus.
Lance Henriksen a rencontré sa femme en crachant des Rice Krispies
Il est présent à l’écran pendant même pas trente secondes : Lance Henriksen apparaît à la toute fin de Super Mario Bros., dans la peau du roi et père de Daisy, qui avait été transformé en champignon avant même le début du film. Le producteur lui avait demandé comme une faveur de venir tourner cette scène pour une journée. « Et là je comprends que c’est un personnage qui a été en animation suspendue dans le monde des champignons, même si je ne sais pas trop ce que c’est (Rires.) ». Henriksen a alors demandé à ce qu’on lui apporte des céréale Rice Krispies pour sa scène, histoire qu’il puisse s’en mettre dans la bouche et les cracher à au « réveil » de son personnage. « Je me suis dit qu’il devait encore avoir des champignons dans les poumons ! J’en ai foutu partout. Mais la meilleure chose qui soit ressortie de ce rôle, c’est qu’en arrivant, je vois cette femme, en robe d’été, avec des jambes absolument magnifiques. Elle était superbe. Je suis allé au maquillage demander de qui il s’agissait. Bref, un an et demi plus tard, je me mariais avec elle (Rires.) » Effectivement, Henriksen s’est marié avec Jane Pollack, maquilleuse sur le plateau, avec qui il a eu un enfant. « Super Mario Bros. a fait des petits ! », rigole l’acteur, qui est bien le seul à se marrer en se souvenant du tournage.
Super Mario Bros., coffret combo DVD et Blu-ray, 24,99 euros.
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