Première
par Gérard Delorme
Après L’Orphelinat (2008), Juan Antonio Bayona réalise, avec ce second film, un saut qualitatif considérable et confirme sans aucune réserve son statut de surdoué. Jamais une catastrophe n’avait été représentée avec autant de force et de réalisme pour servir un mélodrame d’une puissance également exceptionnelle. Le film est divisé en deux parties. La première, avec Naomi Watts, conjugue film catastrophe et récit de survie avec une intensité qui confine au cinéma d’horreur. Le choix des moyens (des effets pratiques et mécaniques, de préférence aux images de synthèse) était essentiel pour montrer toute la violence de l’épreuve endurée. La seconde partie, avec Ewan McGregor, aborde les aspects plus humains de ce qui se passe après le désastre, l’accent étant mis sur le drame et le suspense. L’une et l’autre témoignent de la grande flexibilité d’un cinéaste qui, à la différence de ceux qui trouvent leur confort en se limitant à un registre unique, n’a pas peur d’explorer tous les genres cinématographiques pour en exploiter les ficelles. À chaque fois, il pousse les potentiomètres au maximum. Il lui arrive même de flirter avec les limites de la manipulation dans son utilisation de l'angoisse (Ewan McGregor retrouvera-t-il ses enfants ?), mais c’est en pleine connaissance de cause – après tout, il raconte une histoire vraie. Le cinéaste ne fait qu’exercer son pouvoir de metteur en scène et sa démonstration est magistrale
The Impossible se laisse inexplicablement déborder par une dernière partie trop improbable, accumulant coups de théâtre, leçon de mièvre philosophie ou cours de catéchisme édifiant, un penchant pour le prêchi-prêcha qui laisse perplexe. Pas au point d'assécher un incroyable savoir faire, mais suffisamment pour le rendre un peu mécanique, laisser deviner certaines coutures de fabrication et ainsi atténuer le supplément d'âme qui aurait fait de The Impossible, un immense film