Ce qu’il faut voir en salles
L’ÉVÉNEMENT
KAAMELOTT- PREMIER VOLET ★★☆☆☆
De Alexandre Astier
L’essentiel
La suite tant attendue de Kaamelott au cinéma ne s'adresse-t-elle qu’aux fans de la série mythique d'Alexandre Astier ?
Douze ans après l'ultime épisode du Livre VI de Kaamelott à la télé, voici enfin le retour du roi. Mais si Kaamelott, premier volet est parfois très drôle grâce à son gang d'actrices et d'acteurs parfaits, Astier peine à accomplir la promesse de cinéma épique qu'il promettait à travers le changement d'échelle, en passant du petit au grand écran. C'est dommage, mais ça ne veut pas dire qu'on n'attend pas la suite avec impatience.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A ADORE
BONNE MERE ★★★★☆
De Hafsia Herzi
Hafsia Herzi- réalisatrice monte d’un cran à partir d’un scénario plus carré que Tu mérites un amour mais toujours traversé par ce qui fait sa force : sa capacité à laisser la vie envahir l’écran comme si sa caméra n’existait pas pour ses comédiens (tous insensés). De bruit, de fureur, de fous rires et de douceur. Voilà comment décrire le cinéma d’Hafsia Herzi qui s’impose comme un auteur à part entière en seulement deux films. « Tant que je suis debout, je resterai solide », dit son héroïne. Un mot qui prend tout son sens pour définir cette maman de famille nombreuse des quartiers Nord de Marseille, femme de ménage qui veille telle une louve sur une tribu riche en personnalités tranchantes et amputée momentanément d’un fils en prison. Bonne mère est le portrait de cette résistante qui plie mais ne rompt pas. Le regard qu’Hafsia Herzi pose sur elle est bouleversant d’humanité mais dépourvu d’angélisme. Son film bouillonne mais se s’agite jamais en vain. Vivement le troisième !
Thierry Cheze
Lire la critique en intégralitéONODA, 10000 NUITS DANS LA JUNGLE ★★★★☆
De Arthur Harari
En 2016, Arthur Harari signait ainsi avec Diamant noir un thriller tendu dans le milieu des diamantaires à Anvers. Le cinéaste va ici plus loin. En l’occurrence, sur une île du Pacifique en 1944, remontant le fil d’une aventure hors norme, jusqu’en 1974. Trente ans de la vie entre parenthèses d’Hiro Onoda, soldat japonais en poste à Lubang dans les Philippines qui refusa d’accepter la fin de la Seconde Guerre Mondiale et la reddition de son pays. Le film d’Harari, sec et distancié, regarde son anti-héros s’accrocher à sa propre réalité à travers un récit qui va peu à peu se délester de tout ornement narratif pour vivre au présent cette abnégation. Sa mise en scène précise, découpée avec soin, parvient à se jouer du mystère d’un être insondable mais dont l’entêtement aussi absurde soit-il, a tout d’une quête sacrificielle. Onoda est un film de survie, d’aventure, japonais aussi dans la pureté qu’il dégage. Un film d’Arthur Harari surtout, dont on retrouve cette formidable capacité à faire corps avec son personnage.
Thomas Baurez
Lire la critique en intégralitéA L’ABORDAGE ★★★★☆
De Guillaume Brac
A l’abordage (qui sort sur grand écran après sa diffusion sur Arte) séduit immédiatement par sa fraîcheur. Pas de name dropping ici, que des nouvelles têtes (toutes issues du Conservatoire). Dans un cinéma français ultra cartographié, les terres vierges sont trop peu nombreuses. Cet « abordage », c’est donc d’abord celui-là, la conquête d’un espace où les objets, les choses et les corps, dévoilent quelque chose d’inédit d’où émane inévitablement une pureté sauvage. Félix, le protagoniste n’a soif que de rencontres. C’est un corps en mouvement, intrépide. Brac n’est pas Kechiche. Il ne cherche pas à sonder jusqu’à épuisement la fièvre qui régit les corps entre eux. Il intervient très peu. Ils ont cependant en commun cette façon d’interroger la société à travers un brassage social qui dessine en creux le visage d’une France encore prisonnière de ses préjugés. Des individus que rien ou presque ne prédestinaient à se rencontrer, trouvent un point d’accroche sans avoir de compte à rendre à personne. Surtout pas au film lui-même, délimité par des frontières que les cinéastes ont voulu perméables. Et on se régale se jeter à l’eau avec ses personnages.
Thomas Baurez
Lire la critique en intégralitéPREMIÈRE A AIMÉ
OLD ★★★☆☆
De M Night Shyamalan
Old emprunte son sujet à une bande dessinée, Château de sable de Frederik Peeters et Pierre Oscar Levy : sur une plage exotique, des vacanciers réunis par hasard le temps d'une excursion se mettent à vieillir de façon accélérée. Une demi-heure vaut une année. Pourquoi, comment ? En fait, la raison (car il y en a une, et elle sera expliquée dans les quinze dernières minutes d'ailleurs pas terribles) n'est pas du tout le sujet du film. Ce qui intéresse Shyamalan, de toute évidence, c'est d'orchestrer ce petit chaos temporel avec une gourmandise un brin vicieuse, plutôt que de mettre en place le mécanisme à twist qui serait sa marque de fabrique.
Faisant pousser le film dans son territoire habituel de fantastique, sur la frontière crépusculaire où normal et anormal se chevauchent, Old est une série B tordue où le cinéaste parvient à glisser ses obsessions : guettez les apparitions de la couleur violette, et aussi du cinéaste lui-même, dans le cadre, par exemple. Et certains passages, grâce au couple formé par les excellents Gael García Bernal et Vicky Krieps, font surgir de l'émotion au moment où l'on s'y attend le moins, au milieu de ces jeux de cadres appuyés (beaucoup d'amorces et d'arrières- plans), de travellings manipulateurs. Sans trop spoiler -vous comprendrez quand vous le verrez- Old devient très rigolo quand on l'envisage comme un reflet bisseux de La Jeune fille de l'eau, où le cinéaste se met tout autant en scène, mais pas comme un auteur maudit incompris des critiques mais comme lui-même : un réalisateur définitivement plus malin que les autres.
Sylvestre Picard
Lire la critique en intégralitéSWEET THING ★★★☆☆
De Alexandre Rockwell
On avait découvert Alexandre Rockwell et son goût pour les personnages bancals en 1992 grâce à In the soup avec le regretté Seymour Cassel. Dans la foulée, il y eut Somebody to love, un sketch de Groom Service, Louis & Frank et puis… plus de nouvelles de ce côté- ci de l’Atlantique où aucun de ses films suivants n’ont été distribués. On accueille donc Sweet thing comme le retour d’un cinéaste qui n’a jamais vraiment tenu les espoirs placés en lui. Et ces retrouvailles ne manquent pas d’éclat. Huit ans après avoir filmé sa fille et son fils, enfants, dans Little feet, Rockwell les retrouve ados dans ce portrait en noir en blanc d’une famille dysfonctionnelle du Massachusets. Vue donc par le prisme de ce duo qui va tenter de se construire – avec l’aide d’un autre jeune garçon en quête de liberté - entre un père aimant mais alcoolo (Will Patton, déjà présent dans In the soup), une mère partageant désormais la vie d’un homme violent aux instincts de prédateur sexuel et la galère de la pauvreté au quotidien. Le sujet n’est pas d’une originalité renversante mais c’est la façon empathique dont Rockwell s’en empare qui fait mouche. Son refus de tout misérabilisme, sa foi en un happy end en dépit de tous les obstacles, auquel il parvient à nous faire croire. Sweet thing a des allures de premier film par sa fougue adolescente. Celle qui fait croire qu’on raconte pour la première fois des histoires que tant d’autres ont traité. Et ce charme-là, doublé d’une BO où Van Morrison côtoie Billie Holiday et Arvo Pärt et du charisme insensé de Lana Rockwell suffisent à notre bonheur.
Thierry Cheze
PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ
BLOODY MILKSHAKE ★★☆☆☆
De Navot Papushado
La petite Sam a 8 ans quand sa mère Scarlet, tueuse à gages, se voit contrainte de l’abandonner pour la protéger. Suivant ses traces, elle va elle- même devenir une experte dans ce domaine jusqu’à ce qu’elle retrouve face à un dilemme : rester loyale à son employeur, La Firme, ou sauver la vie d’une… petite fille de 8 ans. Son choix de privilégier la deuxième option va alors l’entraîner dans une cavale où elle va voir ressurgir sa mère et recevoir l’aide de ses anciennes associées pour s’en sortir vivantes. Cette série B pop et survoltée assume pleinement ses influences tarantinesques et multiplie les scènes d’action bourrées d’inventivité et d’explosivité jouées avec un plaisir contagieux par Karen Gillan (Jumanji : Bienvenue dans la jungle), Lena Headey (la Cersei Lannister de Game of thrones) et le trio explosif Angela Bassett- Michelle Yeoh- Carla Gugino. Tout se gâte par contre dès lors que les flingues se taisent pour laisser place aux dialogues et plus largement à un scénario bien moins travaillé que les chorégraphies des scènes précitées. Les deux heures du récit souffrent donc de trous d’air réguliers qui ne viennent cependant pas gâcher totalement le plaisir pris devant les exploits de ces badass de compétition.
Thierry Cheze
LA CONSPIRATION DES BELETTES ★★☆☆☆
De Juan José Campanella
Voilà 12 ans et son Oscar du film étranger pour Dans ses yeux qu’on était sans nouvelle de Juan José Campanella qui a entre-temps surtout œuvré comme réalisateur de série. Son retour se fait sous la double influence affichée de Boulevard du Crépuscule et d’Arsenic et vieilles dentelles à travers l’histoire de quatre amis (une ex- star de cinéma, son mari, un réalisateur et un scénariste) vivant dans une même grande maison qu’un jeune couple sans scrupules va tenter par tous les moyens de récupérer. Campanella adore ses personnages, vieilles canailles au mauvais fond réjouissant… Mais hélas un peu trop tant le temps de présentation de ces derniers et d’installation de son récit paraît interminable et nuit à la puissance comique de cette farce noire savoureusement amorale qui se déploie dans sa dernière ligne droite. Avec une demi- heure de moins, on tenait un grand film.
Thierry Cheze
Retrouvez ces films près de chez vous grâce à Première GoLOUXOR ★★☆☆☆
De Zeina Durra
Louxor est un film qui ne se donne pas facilement. Un portrait de femme façon puzzle dont on découvrira au final que pas mal de pièces ont volontairement été cachées. Son héroïne s’appelle Hana. Médecin britannique, elle travaille dans l’humanitaire, arrive seule à Louxor, une ville qu’elle semble connaître comme sa poche mais dans laquelle elle erre comme pour se reconstruire et où elle va croiser un homme qu’elle a aimé. Son passé ? Ce qui la hante ? Ce qui la mine ? On ne le saura vraiment jamais. Le jeu tout en intériorité puissante de son interprète, la toujours impeccable Andrea Riseborough participe à cet intriguant mystère qu’on aurait cependant aimé moins opaque ou à l’inverse encore plus radicalement abscons pour être pleinement séduit. Sur la longueur, Louxor peine à choisir son camp et laisse un goût d’inachevé.
Thierry Cheze
PREMIÈRE N'A PAS AIMÉ
SPACE JAM- NOUVELLE ERE ★☆☆☆☆
De Malcolm D. Lee
Dans ce film écrit par pas moins de huit auteurs (dont Ryan Coogler !) et dont le réalisateur prévu a été débarqué en plein tournage, LeBron James et son fils se retrouvent, lors d’une visite aux studios Warner, piégés dans une dimension parallèle où tout l’univers du studio est contrôlé par une intelligence artificielle malveillante. Pour retrouver son fils et se sortir de ce piège, la star de la NBA va devoir remporter un match de basket contre l’équipe de cette intelligente artificielle avec l’aide de la bande des Looney Tunes, Bugs Bunnny et consorts. On se souvient que le Space Jam original avait été conçu sous influence de Roger Rabbit et jouait délicieusement avec l’univers des Looney Tunes. Avec sa suite, il est surtout question de démonstration de force côté effets spéciaux dans un scénario réduit à la portion congrue, sur fond de discours lénifiant sur la famille. Second degré et malice sont absents de Space Jam- nouvelle ère qui oublie de jouer réellement avec l’univers des Looney Tunes et entraîne Don Cheadle – en super- méchant de service – dans un numéro de cabotinage XXL qui le pose en candidat redoutable pour Razzie Awards 2022.
Thierry Cheze
Lire la critique en intégralitéSPIRALE- L’HERITAGE DE SAW ★☆☆☆☆
De Darren Lynn Bousman
Il y a plusieurs mois, les fans de la franchise torture porn imaginée par James Wan et Leigh Whannell furent un peu surpris quand ils découvrirent que Chris Rock allait développer un spin-off de la série. Depuis des années, Saw semblait aux abois, et qu’un comique reprenne le flambeau n’était pas forcément fait pour rassurer. En même temps, qu’est-ce qui définit mieux la série que les plot-twists ?
Première bonne nouvelle : c’est le vétéran Darren Lynn Bouseman qui est aux manettes. Il n’a plus à prouver son « savoir-faire » dans le domaine de l’horreur hardcore, même si on l’a connu plus inspiré. Ensuite le casting : outre Chris Rock, on trouve à l’affiche Sam Jackson et Max Minghella. Et comme pour bien montrer qu’on est ici dans un autre univers, dès le début vous ne verrez pas de Billy la marionnette et vous n’entendrez pas la voix de Kramer… A la place un masque de cochon utilise une voix modulée pour expliquer les règles du jeu.
Mais à part ces changements finalement mineurs, quelques vraies modifications changent la donne. Ici les meurtres et les séances de torture, toujours aussi impressionnantes (ou dégueulasses, au choix), importent moins que l’enquête menée par le flic incarné par Chris Rock. En suivant les progrès de l’inspecteur Zeke Banks parti à la recherche d’un nouveau tueur en série qui s’attaque aux flics, Spirale ressemble en fait à un épisode hardcore des Experts Miami plutôt qu’à un nouveau film Saw. Les âmes sensibles seront (un peu) rassurées, mais les fans de gore pourraient être déçus. Plus étrange : certaines apparitions de Chris Rock. Alors qu’on découvre en préambule une « belle » scène d’arrachage de langue, juste après, le film offre quelques minutes de Chris Rock sortant ses blagues woke à ses collègues. C’est ce mélange des genres constant qui finalement dessert l’ensemble. Il y a bien quelques dispositifs gore amusants, mais en s’éloignant de la l’ADN de la série, Spirale n’est pas le nouveau chapitre attendu. Plutôt une note de bas de page.
Pierre Lunn
DIGGER ★☆☆☆☆
De Georgis Grigorakis
Nikita vit en solitaire au cœur de la forêt, luttant comme il peut contre les compagnies minières qui, gagnant jour après jour du terrain, s’apprêtent à ne faire qu’une bouchée de lui. Les emmerdes volant généralement en escadrille, il voit aussi débarquer son fils qui, après 20 ans d’absence, vient lui réclamer sa part du terrain que sa mère décédée lui a donnée en héritage. La promesse donc d’un affrontement de générations, façon duel de western au cœur d’une nature luxuriante. Mais une promesse non tenue. Georgis Grigorakis possède un réel talent pour faire de cette forêt peu à peu rabiotée dans sa luxuriance un personnage à part entière. Mais il en oublie de creuser les deux autres, ce père et ce fils, dont, une fois les bases posés, l’évolution manque cruellement de rebondissements. On se met donc vite à attendre la fin du récit avec impatience qui le rend interminable.
Thierry Cheze
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