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Charles de Meaux, producteur d’Apichatpong Weerasethakul et réalisateur épisodique (Shimkent Hotel), raconte ici l’histoire semi autobiographique d’un jockey qui, exilé à Macao, tente de devenir un champion malgré les magouilles de la mafia locale. Par tempérament indépendant ou par nécessité budgétaire, l’auteur bouscule quelques règles élémentaires de narration et utilise la voix off pour compenser les ellipses. Sinon, le vécu du personnage est assez bien rendu grâce à l’interprétation convaincante de Nicolas Cazalé.
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Sur un scénario croisant Nous avons gagné ce soir et Lost in Translation, de Meaux vise la très chic mélancolie des grands esthètes asiatiques du cinéma contemporain tels que Hou Hsiao-hsien ou Wong Kar-wai, pour ne citer que les plus célèbres.
Pari louable de par son ambition, Stretch n’est pas sans problèmes. On regrette par exemple que le réalisateur ne tire pas plus parti de son ancrage rare dans le milieu des jockeys en filmant plus longuement les courses et les chevaux (un travelling latéral sur un cheval au galop est l’un des plus beaux plans de cinéma possibles aux yeux de votre serviteur éternellement tatoué par Ford et Walsh).
A force de (fatale) beauté froide, Stretch souffre aussi d’un déficit d’incarnation. De Meaux rencontre finalement le même type de problème qu’Hustache-Mathieu avec Poupoupidou (lire p. 76) : le culot de défranciser le cinéma français, de se frotter à des référents élevés, mais le risque de ne pas passer la barre, de souffrir de la comparaison avec les modèles élus en n’en saisissant que l’écume. -
Ceux que le PMU fait indéniablement penser à Léon Zitrone ou Pierrette Brès découvriront que l'envers du décor ressemble plus à du David Lynch qu'à un vieux Henri Verneuil. Dommage que Charles de Meaux ne tienne pas jusqu'au bout le rythme de sa course et s'essouffle bien avant la ligne d'arrivée. Reste une atmosphère suffisamment intrigante pour attiser la curiosité.
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Une belle ambition, qui consiste notamment à faire un film hybride entre tradition et modernité, acteurs européens et asiatiques, quelques belles scènes tournées sur les champs de courses, la présence fantômatique de l'acteur américain David Carradine, dont ce sera le dernier rôle au cinéma, tout cela est à mettre au crédit d'un film qui, hélas, ne tient pas vraiment ses promesses, donnant l'impression de se défaire au fur et à mesure que l'action progresse.
Scénario chancelant, incarnation défaillante, vicissitudes diverses sur le tournage et rafistolages incertains sont les principaux écueils à l'origine de ce résultat.
C'est par ailleurs le troisième long métrage de cet amateur de paris forts qu'est Charles de Meaux, qui contribua en tant que producteur à faire connaître en France Apichatpong Weerasethakul, récent récipiendaire de la Palme d'or au Festival de Cannes en mai 2010.
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Le scénario - un candide pris au piège de son arrivisme - n'est pas très original. Ce drôle de polar parvient, tout de même, à étonner : le milieu, celui des courses, est rarement traité au cinéma ; le décor, ce Las Vegas chinois, aussi. Sans oublier la présence fantomatique de David Carradine dans son dernier rôle... Les rituels très précis des hippodromes, les codes de la mafia chinoise, Charles de Meaux les filme avec le soin d'un documentariste. Sa mise en scène, très esthétique, quasi expérimentale par moments, capte à merveille l'atmosphère de ce petit bout d'Asie à part, entre langueur et violence... Producteur ambitieux (d'Oncle Boonmee..., notamment, Palme d'or du festival de Cannes 2010), Charles de Meaux prouve qu'en tant que réalisateur il est un outsider à suivre.
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(...) Stretch, film singulier, sinon précieux, tourné dans le milieu des jockeys et des parieurs, rarement dépeint au cinéma. L'occasion pour Nicolas Cazalé (Le Fils de l'épicier) de prendre à bras le corps, un rôle de choix dans un univers visuel inattendu et bien rendu, avec David Carradine - décédé à Bangkok en juin 2009 lors de ce tournage - en cerise sur le gâteau… Résolument perverse, l'intrigue est accrocheuse et peu convenue, traversée de bout en bout par une violence invisible. Mais entravée par un épilogue qu'on aurait voulu moins allusif.
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Stretch ne raconte pas comment un promotteur jockey a consumé son talent à Macao, mais juste comment un cinéaste maladroit y a cramé son budget.
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L'amoncellement de micro-échecs à tous les étages est tel qu'en route on en oublierait presque à quel point le film manque de direction d'acteur. Les deux Nicolas, Cazalé et Duvauchelle (le protagoniste et son meilleur ami, jockey lui aussi), s'effacent sous des dialogues effroyablement indigents, et les personnages de la longue partie asiatique sont aussi caricaturaux qu'imprécis. Complétant ce casting franco-chinois, la présence incongrue et fantomatique de David Carradine intriguait sur le principe. L'embarras face au traitement de son personnage (Carradine, s'il faut le rappeler, est décédé durant le tournage) est à la mesure de l'hésitation du cinéaste, qui ne sait s'il faut l'exclure dans les marges du récit ou lui conférer une aura de deux ex machina pour aboutir, en deux séquences rachitiques, à un non-choix (un de plus) involontairement cruel. La funeste anecdote, cependant, donne étrangement lieu à l'un des moments les plus intéressants du film, qui l'intègre abruptement à son récit en glissant un flash radio évoquant la disparition de l'acteur. Vertige fugace qui verse un peu de réalité dans la fiction et, pendant quelques secondes, installe dans le film un peu du trouble qui le reste du temps lui fait cruellement défaut. Quelques secondes à l'échelle d'un film d'une heure trente : c'est peu de choses, mais c'est toujours ça de pris.