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Révélés avec Salvo (2013), Fabio Grassadonia et Antonio Piazza poursuivent leur voie singulière avec ce film qui brouille plus que jamais les frontières entre stylisation et réalisme. L’histoire (vraie) retrace le calvaire d’un adolescent kidnappé et retenu pendant deux ans par la mafia pour faire pression sur le père informateur. Mais la fiction fait irruption sous la forme d’une amoureuse de l’écolier, qui refuse le silence et la résignation des adultes pour se lancer à la recherche du disparu. Tous les moyens sont bons, y compris ceux de l’esprit. C’est là où le film rejoint un procédé cher à Guillermo del Toro, qui consiste à soulager les vivants des réalités trop dures en recourant à la mythologie. C’est le cas ici, où les deux adolescents se réfugient dans un univers imaginaire qu’ils définissent parfois par écrit, d’autres fois sous formes de dessins. Inspirés de légendes locales, et chargés de significations symboliques, les prairies, lacs ou forêts leur servent de lieux de rendez-vous où ils se retrouvent en pensée. Les transitions entre la réalité et le fantasme sont invisibles, grâce à une mise en scène sobre et juste, qui se garde bien de céder à la tentation de la surstylisation. En Sicile, le fait divers dont le film s’inspire est dans toutes les mémoires, mais pour ceux qui ne le connaissent pas, l’horreur du dénouement est à la limite du supportable. Mais il vient à point pour réaffirmer que le salut peut se trouver dans l’imagination.