- Téléramapar Pierre Murat
Débarrassé (provisoirement ?) de sa prétention à vouloir refléter la complexité du monde, ce mauvais philosophe est redevenu un bon conteur. Et donc le voilà qui mêle joyeusement les intrigues et multiplie les références. (...) Bref, parce qu’il est fidèle à ce qu’il est, on le sent ravi de ce qu’il fait. L’astuce suprême, c’est d’avoir appelé son film Roman de gare. Allez lui reprocher une partie de campagne caricaturale, à mi-chemin entre farce à l’italienne et adaptation fauchée des Misérables ! (...) Dès lors, on s’amuse de tout, sans rien prendre au sérieux, même pas le chabadabada final entre un homme et une femme, puisque ces deux-là seront forcément guettés par d’autres illusions, d’autres disputes, d’autres mensonges…
- Fluctuat
Ça fait longtemps que claude lelouch ne crée plus l'événement, bien au contraire. Pourtant ce grand cinéaste de la transparence ne mérite pas si peu d'estime. Avec Roman de gare, il prouve encore qu'il est peut-être le seul cinéaste français vraiment populaire.
Chaque nouveau film de Claude Lelouch provoque presque instantanément une sorte de réflexe chez la critique. Plus qu'un préjugé ou un a priori, c'est comme si on avait affaire à une condamnation sans jugement, une pure formalité, un principe. On déteste Claude Lelouch, c'est évident. Il est notre bouc émissaire, celui dont les films rendent forcément plus intelligents ceux qui les snobent du fait justement qu'ils se croient plus intelligent que les films. Devant un Lelouch, on ne peut être que plus malin, voire faire le malin et se jeter comme une bête sur son cinéma, souvent avec complaisance et facilité. On pourra dire que Lelouch l'a parfois un peu cherché, c'est vrai, mais il y aussi un malentendu. Il n'y a pas moins roublard qu'un film de Lelouch, pas plus honnête, pas plus transparent. Lelouch c'est du cinéma littéral, et ça, la littéralité, la critique aime la lui faire payer.La littéralité c'est justement tout ce que la critique déteste, sauf quand il y en a mais qu'elle ne la voit pas ou la prend pour autre chose (comme dans Boulevard de la mort, film de l'année). La critique préfère les métaphores, elle croit que ça la rend plus intelligente alors que c'est seulement une manière de se croire plus intelligent. Question d'axe où tout se renverse. Alors que chez Lelouch tout est visible, c'est le règne de l'hyper visibilité. Comme dans Roman de gare, grande mise à plat du thriller. Un polar neutre, roman blanc, éclairé, lumineux, comme s'il fallait chasser ombres et fumées en noir et blanc d'Hollywood. Le titre, bien entendu, est ici toute la clé de la non énigme du récit et du film comme concept. Faire un polar comme on écrit un best-seller, un film populaire, avec ficelles énormes et fausses pistes en série, si possible le plus platement du monde. Platement mais pas mollement.Roman de gare n'est donc pas un film à clé, il ne s'enveloppe d'aucun mystère ou de très peu d'énigmes même s'il semble en semer beaucoup. Si Lelouch conserve pourtant une intrigue à tiroirs, joue avec nos préjugés ou le scénario pour respecter les règles afin de nous laisser mener l'enquête, tout est résolu d'avance et surtout sans conséquence. Cette manière de dire qu'il n'y a rien d'autre à faire que regarder, sans s'embarrasser d'un discours qui aurait pu divaguer vers la métaphore de la littérature comme crime, seul Lelouch en est capable en France. Car Roman de gare ne prend pas le genre comme prétexte. Cette histoire d'un nègre (Dominique Pinon) qui cherche à se séparer de l'auteur (Fanny Hardant) pour laquelle il écrit les livres ne prétend à aucun discours. Pour Lelouch il n'y a qu'un seul plaisir qui compte, qu'un seul plaisir à donner, ceux des mécanismes, comment ils se créent, existent et éventuellement s'entretiennent. Comment ils sont repris au fil même du récit par des personnages qui ont eux-mêmes conscience de participer à son évolution.La seule clé à saisir dans Roman de gare est détenue par Audrey Dana répétant à l'envi qu'elle est une midinette. Autant dire qu'un rien la submerge d'émotion jusqu'à la grâce, que la naïveté et le romanesque la touchent plus que tout, qu'elle est à l'image de cette histoire. C'est là tout le cinéma de Claude Lelouch, sa complaisance et son excuse peut-être, mais surtout sa singularité. Ses meilleurs films sont la démonstration de son côté midinette qui est plus qu'une joie béate de faire du cinéma. Ainsi, sans autre horizon que son titre, Roman de gare dévoile de quoi est faite cette littérature. C'est du cinéma de gare que Lelouch filme, sans jamais le dénigrer ou s'excuser pour le prendre par un autre bout et prétendre à l'intelligence. Une telle littéralité est rare au cinéma. Savoir se tenir ainsi au diapason d'une culture populaire sans s'y vautrer, sans condescendance ou maniérisme mais toujours en restant à la bonne distance, ça frôle l'élégance. Roman de gare
De Claude Lelouch
Avec Dominique Pinon, Fanny Hardant, Audrey Dana
Sortie en salles le 27 juin 2007
Illus. © Les Films 13
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- Lire la chronique de Boulevard de la mort, de Quentin TarantinoEllepar Michel PalmiériUne intrigue candide, où coïncidences et quiproquos s'enchaînent en une structure fluide qui mêle personnages et auteur(s), vraie vie et fausse fiction, cinéma grand public et littérature populaire. Lelouch utilise la souplesse du tournage en caméra HD pour concentrer son attention sur la direction d'acteurs étonnants, Dominique Pinon à contre-emploi, et une jeune comédienne éblouissante, Audrey Dana, son visage d'ange déchu et présence écrasante. En s'éloignant de Paris, le réalisateur retrouve ici la grâce innocente de ses bonnes années.
Le Mondepar Jacques MandelbaumVoilà pourquoi, à rebours de ce que prétend son auteur, la principale raison d'apprécier Roman de gare, son nouveau film, est qu'on y retrouve les qualités d'un bon film de Claude Lelouch, aussi noir prétend-il être. Car Roman de gare est un film sombre, un polar qui fait de la dissimulation et de la manipulation son principal objet. (...)Tout cela est, de fait, plutôt sombre et manigancé, mais selon la touche Lelouch, à savoir que la noirceur y est d'une joyeuse douceur, que la manigance se prend les pieds dans l'invraisemblance feuilletonesque et que les acteurs sont visiblement heureux de renchérir à la limite de la caricature sur leurs qualités répertoriées, qu'il s'agisse du pathos fatal de Fanny Ardant ou de l'inquiétante étrangeté de Dominique Pinon. Un distrayant plaisir n'est est pas moins au rendez-vous.
Paris Matchpar Alain SpiraCe Roman de gare est, de loin, le meilleur film que Claude Leloouch ait réalisé depuis longtemps. On le retrouve inventif, roublard, n'hésitant pas à s'autoplangier avec une traversée de Paris à perdre tous ses points de permis (...). Maître à tisser les destins croisés, il prend le fil de chaque personnage pour nous broder une histoire qui, cette fois-ci, n'est pas cousue de fil blanc.
Pariscopepar Arno GaillardLelouch filme comme personne la fuite et le désespoir des personnages de cette belle histoire pleine de rebondissements. Sans aucun doute ce «Roman de gare» est son meilleur film depuis «Itinéraire d’un enfant gâté » et « Hasards ou coïncidences ». Le retour en douce d’une énergie et d’un désir, celui d’un cinéaste qui veut encore et toujours nous donner un rendez-vous d’amour dans une salle de cinéma. Retour en beauté sur le ring de ce cinéaste qui boxe avec les émotions et les images. Un grand cru, une bonne année.
Le JDDpar Carlos GomezLelouch, le retour. Avec une fable sur l'identité et maquillée en polar. Un homme, une femme et un crime aurait pu être le titre de ce Roman de gare, ambitieux, réussi, qui nous propose un affrontement insolite et noir entre Fanny Ardent et Dominique Pinon. Le rythme est soutenu, les clichés enjambés, et le final aussi vertigineux que l'escalier où se conclut le récit. Un regret, mais il n'est que formel: que la facture soit si dépouillée, presque crue.
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Les critiques de la Presse
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Débarrassé (provisoirement ?) de sa prétention à vouloir refléter la complexité du monde, ce mauvais philosophe est redevenu un bon conteur. Et donc le voilà qui mêle joyeusement les intrigues et multiplie les références. (...) Bref, parce qu’il est fidèle à ce qu’il est, on le sent ravi de ce qu’il fait. L’astuce suprême, c’est d’avoir appelé son film Roman de gare. Allez lui reprocher une partie de campagne caricaturale, à mi-chemin entre farce à l’italienne et adaptation fauchée des Misérables ! (...) Dès lors, on s’amuse de tout, sans rien prendre au sérieux, même pas le chabadabada final entre un homme et une femme, puisque ces deux-là seront forcément guettés par d’autres illusions, d’autres disputes, d’autres mensonges…