-
La filmographie d’Alexandre Aja a quelque chose de fascinant et de paradoxal : depuis vingt-cinq ans qu’il réalise, ses films ont toujours eu à la fois le feeling enthousiaste et maladroit des premières fois, et la sûreté due à l’expérience de l’artisan passionné. Aucun artiste n’est obligé au changement ou au bouleversement ; au contraire, c’est presque rassurant de savoir qu’Aja tourne ses films avec du métier mais surtout le plaisir d’un fan d’horreur à qui on vient tout juste de donner les clefs de son premier long-métrage. Mother Land est donc d’abord un bon film-concept, du style que l’on fait pour se faire remarquer, ou, mieux, pour se donner un genre. Nous sommes dans une baraque paumée dans une forêt southern gothic où rôdent d’affreux esprits sataniques. Pour protéger ses deux enfants (Anthony B. Jenkins et Percy Daggs IV, deux petites révélations), une femme (Halle Berry, toujours au top) ne peut sortir de la maison en « bois sacré » qu’une fois reliée à celle-ci à l’aide d’une solide corde… C’est un film de survie, qui ressemble beaucoup à une version bis du Village : comme le grand film de Shyamalan, Mother Land se nourrit à la même source (La Quatrième dimension et ses contes moraux imbibés de fantastique), mais cherche plutôt le plaisir de la série B… jusqu’au moment où celle-ci craque, et prend des détours inattendus et réjouissants. Ajoutez à cela des créatures formidables et un super score signé Rob, et vous obtenez un film réellement aussi réussi qu’un bon premier film.