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Pendant quarante-cinq minutes, on pense tenir le grand film de ce début d’année. Une comédie d’actu qui capte l’air du temps et sur laquelle flotte un parfum de réel entêtant, marié à des effets poétiques et un sens de l’observation suraigu. Comme toujours chez Leclerc, il y a cette incroyable capacité à mêler politique, autobiographie et douceur. Il est question cette fois-ci de l’école et surtout de nos fantasmes, de nos peurs et crispations quand il s’agit de confier nos gamins à une institution qui dévisse. Sofia et Paul partent vivre en banlieue et mettent leur môme dans le collège public. Ce qui paraissait au début totalement naturel va se révéler héroïque, puis suicidaire... Baer est impeccable dans le rôle d’un quinqua punk très à cheval sur ses principes mais jetlagué côté réel, et Leila Bekhti parfaite en working girl qui a compris qu’il vaut mieux s’adapter que se prendre des murs. L’ensemble est attachant et regorge de trouvailles, de rebondissements et de chouettes moments de cinéma (la fête de quartier où tous les mecs ont la trace de rouge à lèvres sur la joue laissée par le personnage de Bekhti). Pourtant ça coince au bout d’un moment, quand il s’agit de raconter une histoire, de quitter le stade de l’observation pour fabriquer un film. Leclerc finissant par s’embourber dans les clichés idéalistes ou la morale convenue. Mais comme dans Le Nom des gens, il faut reconnaître que, à force de se moquer à la fois de notre société, de notre époque et de nous, il se dégage du film quelque chose de sympathique, une noirceur aussi, qui finit par toucher. Peut-être pas le grand film de ce début d’année, mais pendant un moment, une satire gonflée.