Toutes les critiques de Full frontal

Les critiques de la Presse

  1. Fluctuat

    Carl Bright (David Hyde Pierce) est un journaliste malheureux : il n'arrive pas à placer ces scénarios et sa femme, Lee (Catherine Keener), veut le quitter. La soeur de celle-ci, Linda, craint de finir vieille fille et doit bientôt faire la connaissance d'un homme rencontré grâce à Internet. Pendant ce temps, Calvin interprète son premier rôle au cinéma au coté de Francesca (Julia Roberts), star confirmée. Tout ce beau monde doit se retrouver pour la soirée anniversaire de Gus (David Duchovny), qui est le producteur de ce film.
    Et puis il y aussi une petite pièce de théâtre avec Hitler, 55 secondes avec Brad Pitt...etc. Nous sommes conviés à observer une journée de ces gens-là.
    Voilà les données de départ d'un film aussi ambitieux que décevant. L'objectif était de faire " un film sur les films destinés aux gens qui aiment les films " (selon le dossier de presse). De ce projet, on ne retiendra que la confusion de la formule. Elle est, hélas, un parfait résumé du chaos qui règne, pendant 2 heures, aussi bien d'un point de vue narratif que formel.Différentes histoires s'enchaînent, ou plutôt s'entrechoquent, puis se mélangent mais ne se laissent appréhender qu'au bout d'un long moment, sans forcément susciter un grand intérêt. Celle du couple est sûrement la plus réussie, grâce à Catherine Keener, excellente dans le rôle d'une responsable de ressources humaines qui décharge sa tension en humiliant ses employés. Les autres personnages laissent indifférents mais peuvent parfois avoir le bénéfice du doute (...car on n'a peut-être pas tout compris).Il faut dire que la forme employée entretient le flou initial. Comme annoncé, il y a donc un film dans le film. Celui-ci est enregistré par une caméra dite normale, alors que le reste (les 3/4) est réalisé par une caméra vidéo, donc avec un grain très différent de l'image classique, ce qui donne une image un peu sale, pas forcément agréable. Ce choix n'aide pas à s'immerger dans un film déjà peu facile d'accès. Enfin, cerise sur le gâteau, des interviews des personnages - ou des acteurs ?, ou des acteurs qui jouent des acteurs ?- sont incorporés à l'ensemble. Julia Roberts avoue qu'elle ne savait plus qui elle était censée être à ce moment-là ; nous non plus d'ailleurs, si cela peut la rassurer !On aura compris la volonté de mise en abyme de S. Soderbergh. Il y a donc un film dans le film dans le film. L'utilisation d'une caméra vidéo n'a rien d'infamant et peut amener de bonnes surprises, en principe grâce à la proximité qu'elle confère et à " l'aspect réel " qu'elle crée. Il s'agit bien de cette volonté ici puisque le réalisateur dit que " l'idée était de faire oublier qu'il s'agissait d'une fiction parce que c'est en fait un documentaire très stylisé ".
    Pour faire ce pseudo-documentaire, il a imposé certaines règles à ses acteurs afin de les responsabiliser (tourner vite - 18 jours - et en décors naturels, s'habiller, se coiffer et se maquiller par ses propres moyens). Cette approche confère à l'ensemble une certaine énergie. Ainsi, si le propos était de montrer que le microcosme hollywoodien va vite et est sous tension permanente, pourquoi pas.
    Si le film dans le film représente la schizophrénie à laquelle les acteurs ne peuvent échapper, soit.
    Hélas, l'ensemble est simplement un peu long et surtout peu intéressant. Il est difficile de se passionner pour ces petits bouts d'histoires qu'on nous raconte de façon indigeste.Soderbergh est un bon réalisateur. Il l'a déjà prouvé. Pourtant, cet exercice de style, plutôt vain, laisse dubitatif. Après les sentiers bien balisés d'un produit trop lisse (Ocean's Eleven), son envie de revenir à une technique plus simple, d'amateur selon lui, est louable. Mais un petit budget ne fait pas obligatoirement un film d'auteur. Alors, que Schizopolis (réalisé avec trois francs six sous en 1996) était une vraie réussite, pleine d'ingéniosité dans la forme et d'inventivité dans le scénario, celui-ci ne semble être qu'une déclaration d'amour envers les acteurs qu'il dirige. Il les aime, c'est évident, mais c'est tout ce que nous donne Full Frontal.Vivement le prochain, qu'il nous montre qu'il aime aussi ses spectateurs.
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