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Le dernier maquis raconte comment la construction d’une mosquée et le choix d’un Imam vont bouleverser les relations de travail d’un entrepôt et d'un garage. Entre réalisme documentaire et poésie pure (les échappées oniriques), Ameur-Zaïmeche transforme sa tragédie de l’immigration et du travail en une fable politique abstraite et douce. Flirtant constamment avec la comédie, le symbolisme et le tract (au pelle) brechtien, Le dernier maquis en revient toujours au facteur humain. Dans le genre drame prolétarien on ne fait pas mieux.
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- Fluctuat
Décrivant le quotidien d'une entreprise de réparation de palettes, Dernier maquis s'impose comme une brillante galerie de caractères, qui observe avec un oeil acéré le pouvoir de la parole et l'universalité des luttes. Causer, s'exprimer, libérer la parole pour mieux saisir le monde tel qu'il va : c'est une tradition ancienne du cinéma français (qui a par exemple fait merveille chez Jean Renoir), dont on observe depuis quelques années la vivifiante réactualisation. Si le multi-césarisé Abdellatif Kechiche a parfaitement su lier réinvention de la langue française et vertiges de l'identité, Rabah Ameur-Zaimeche frappe tout aussi fort avec ce Dernier maquis, qui dépeint avec grâce la circulation de la parole dans une petite entreprise. Le patron musulman, Mao, tente, à mi-chemin entre autorité et complicité, d'établir un juste rapport avec ses employés, tous originaires du continent africain. D'abord comique et burlesque (l'ubuesque épisode de la circoncision), le film s'achemine ensuite vers une gravité qui ne cède jamais au misérabilisme ; au contraire, c'est par le biais d'une esthétique et d'un rythme enjoués que Dernier Maquis confronte ses personnages aux difficultés contemporaines.Ce qui frappe ici est bien la souveraineté avec laquelle s'articulent problématiques sociales et cohérence des caractères. Si le moteur narratif du film tourne autour de l'ouverture d'une mosquée au sein de l'entreprise - offrant une solide réflexion sur les rapports liant religion, travail, communauté et individualisme - Rabah Ameur-Zaimeche transcende toute catégorisation par la flamboyante galerie d'affects qu'il dessine. Prisonnier d'aucun sujet, affranchi de tout personnage central, le film navigue avec liberté au sein de cette équipe qui répare des palettes. Le réalisateur n'oublie pas de replacer les rapports humains au sein d'une plus vaste nature en offrant un long interlude autour d'un ragondin qui s'est introduit chez les hommes. Délicat et poétique, ce passage symbolise parfaitement l'ambition de Dernier maquis : capter avec acuité les remous de l'existence, en poussant toujours plus loin la précision du regard sur l'Hexagone d'aujourd'hui. Après Wesh Wesh, qu'est-ce qui se passe ? et Bled number one, Rabah Ameur-Zaimeche ne pouvait pas mieux clôturer sa trilogie.Dernier MaquisDe Rabah Ameur-ZaimecheAvec Rabah Ameur-Zaimeche, Salim Ameur-Zaimeche, Abel Jafri.Illus. © Sophie Dulac Distribution- Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils festival de cannes, quinzaine des réalisateurs sur le blog cinéma- Lire la critique de Bled number one (2006)
Ellepar Anne DiatkineOn aimerait aimer Dernier maquis, ne serait-ce que parce qu'on a adoré les précédents films du cinéaste et qu'on ne peut pas lui reprocher d'être démagogique. Il ne cherche ni à nous plaire ni à nous émouvoir. Dernier maquis aurait pu s'appeler Entre les murs, tant on sort peu du lieu de travail. Mais le spectateur reste à la porte de cette tragédie prolétarienne.
Paris Matchpar Alain SpiraSe bornant à observer, Ameur-Zaimeche nous montre comment la religion peut servir de force de management. Mais aussi déboucher sur une lutte des classes. Confiné dans un labyrinthe de palettes rouges aux allures d'expo d'art contemporain, ce film social flirte avec le documentaire. Son rythme, bien trop lent, risque de faire "prendre le maquis" à bien des spectateurs.