Hier, Cinemax diffusait le premier épisode de The Knick, l'une des séries les plus attendues de cet été. Avec Steven Soderbergh derrière la caméra et Clive Owen dans le rôle principal, cette nouvelle fiction médicale n'a pas déçu. Découvrez notre critique ci-dessous.
Hier soir aux Etats-Unis, les débuts de The Knick sur Cinemax ont marqué le retour de Steven Soderbergh aux commandes d’une série. Car, pour ceux qui l’ont oublié, ou plutôt pour ceux qui ne le savaient pas, Soderbergh n’est pas un néophyte en la matière. En 2003, il avait ainsi créé K Street, un drame politique tourné épisode après épisode en fonction de l’actualité, diffusé alors par HBO, la grande sœur de… Cinemax. Autre fait d’armes à son actif, sa contribution à une anthologie des années 90, Fallen Angels, aux côtés d’autres cinéastes de renom comme Alfonso Cuarón (Gravity) et Agnieska Holland (Treme, The Wire).Plus d'une décennie après sa dernière série, Soderbergh revient donc avec The Knick, une fiction historique qu’il a entièrement réalisée, et qui nous plonge, en plein New-York du début du XXè siècle, au sein de l’hôpital Knickerbocker, où chirurgiens et infirmières tentent de repousser les limites de la médecine en usant de méthodes peu orthodoxes, à une époque où le taux de mortalité est encore extrêmement élevé.Vous l’aurez compris, le réalisateur de Sexe, Mensonges et Vidéo s’est lancé, avec The Knick, dans une énième série médicale, un genre éculé du petit écran contemporain. Mais, à la vue du premier épisode, on saisit rapidement que cette fiction écrite par Jack Amiel (Miracle en Alaska, Raymond) est difficilement comparable aux Grey’s Anatomy, Private Practice ou encore Body of Proof qui squattent la programmation de nos chaînes nationales. Depuis plusieurs années maintenant, le genre médical se fourvoie régulièrement en servant de prétexte à un second arc narratif mielleux emprunté aux codes du soap opera. Fort heureusement, The Knick permettra aux plus exigeants d’oublier en un clin d’œil les pathétiques histoires de cœur de Meredith Grey, personnage principal de Grey’s Anatomy.Les dix premières minutes du pilote posent donc les bases d’une série qui va à l’encontre de ses lointaines cousines ressassées par les networks américains. On y découvre ainsi le docteur John Thackery, incarné par l’excellent Clive Owen, s’injectant, au sortir d’un bordel, de la cocaïne entre ses deux orteils (avant de le faire, un peu plus loin dans l’épisode, directement dans son… pénis), quelques minutes avant une opération chirurgicale menée devant plusieurs dizaines de ses confrères. Cette intervention, qui consiste à sauver une jeune femme et son fœtus de huit mois, tourne rapidement au désastre. Aucun des deux n’est sauvé, et le spectateur en ressort horrifié d’avoir vu, par l’entremise de plusieurs gros plans perturbants, autant de sang se répandre sur les blouses originellement immaculées du personnel. Anéanti par ce nouvel échec, le docteur J.M. Christiansen, supérieur de Thackery, met fin à ses jours en se tirant méthodiquement une balle dans la tête, propulsant ainsi Thackery à la tête du service de chirurgie de l’hôpital Knickerbocker.Le reste de l’épisode se révèle être de la même teneur. Amiel nous livre une sombre vision d’un New-York vicié à tous les niveaux : trafic de patients organisé par de menaçants ambulanciers, inspecteur de santé sévèrement corrompu, sœur vulgaire et effrontée… Le personnage principal lui-même, Thackery, un anti-héros dont la personnalité atrabilaire et solitaire peut faire penser à un certain Dr House, manifeste des relents racistes d’une froideur chirurgicale à l’égard de son futur subordonné, le docteur Algernon Edwards, campé par Andre Holland (Friends with Benefits). Ce pessimisme généralisé insufflé par Soderbergh et Amiel offre une profondeur intrigante aux membres du personnel de l’hôpital. De la philanthrope illusionnée (Juliet Rylance) à l’infirmière maladroite (Eve Hewson, accessoirement fille du chanteur Bono), cette ribambelle de personnages hétéroclites et perfectibles est assez convaincante pour attiser notre curiosité, et nous donner envie d’en savoir plus en regardant les épisodes suivants.Du côté de la réalisation, la pâte de Soderbergh est indéniable. Le cinéaste nous propose une multitude de plans rarement choisis dans des séries, à quelques exceptions près (comme True Detective par exemple). En lieu et place des habituels plans américains ou rapprochés utilisés pour capturer une conversation, on découvre, particulièrement dans des séquences en extérieur, des plans d’ensemble qui permettent au spectateur de mieux saisir, tel un passant, le tumulte et la confusion qui régissaient les rues de New-York en 1900. Egalement directeur de la photographie, Soderbergh utilise un filtre froid, à l’image de ce qu’il a fait dans Traffic, qui convient avec justesse à l’atmosphère morose de l’époque. L’étonnante musique électronique, composée par Cliff Martinez, déjà auteur de la bande originale de Drive, et fidèle partenaire cinématographique de Soderbergh, nous transporte, quant à elle, par son anachronisme et son minimalisme, dans un univers qui paraît presque irréaliste.Si The Knick captive notre attention dès le premier épisode, rien ne garantit que la suite de la saison sera du même acabit. Malgré des personnages intéressants, l’intrigue pourrait pâtir d’une monotonie, entraperçue dans le pilote, qui risque d’ennuyer les spectateurs en quête de perpétuels retournements de situation. Comme pour chaque série, The Knick devra donc être jugée sur le long terme.The Knick est diffusée en France, dès le lendemain de sa diffusion américaine, sur OCS City.Nick Carvalho
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