Auréolé de son triomphe à Venise, le déjà fameux The Master de Paul Thomas Anderson était de passage à Toronto pour entériner le buzz phénoménal qui l’entoure. On ne va pas revenir sur le film (Gérard Delorme, envoyé spécial sur le Lido, a déjà dit tout le bien qu’il en pensait), juste confirmer qu’il est en effet d’une splendeur et d’une richesse inouïes, et qu’il a, ici aussi, fait l’effet d’une claque. Pas vraiment envie d’enchaîner sur autre chose après ça… Seulement voilà, pas le choix : l’Espagnol Juan Antonio Bayona, le réalisateur de L’Orphelinat, dévoilait dans la foulée The Impossible, sa reconstitution ambitieuse et très attendue du tsunami qui ravagea la Thaïlande en 2004. L’« impossible » du titre, c’est à la fois la violence quasi surnaturelle de l’événement, le chemin de croix enduré par les protagonistes (Naomi Watts, Ewan McGregor et leurs enfants – le film est inspiré du témoignage d’une famille de survivants), mais aussi le défi technique monstre que s’est imposé Bayona, qui a refusé les effets numériques et décidé de « recréer » la catastrophe dans un gigantesque studio des environs d’Alicante, en Espagne.Pure expérience viscéraleThe Impossible est un film limite. Dans tous les sens du terme. Limite, parce que sa volonté forcenée de faire chialer le spectateur est un peu trop voyante, et parce que son ethno-centrisme gêne quand même aux entournures. Mais, au cours d’une première partie qui s’impose comme une pure expérience sensorielle et viscérale, le film a justement pour seul programme de les repousser, les limites. Le tsunami filmé par Bayona est un incroyable moment de cinéma immersif, un instantané de terreur totale, un survival aquatique shooté et monté avec un brio et un sens du timing étourdissants, où s’accumulent les détails ultra-réalistes éprouvants et les très méchantes trouées gore.Au Princess of Wales Theater, où était montré le film (le Festival de Toronto a le bon goût d’ouvrir ses portes au public, et de ne pas réserver ses avant-premières aux professionnels de la profession), le spectacle était aussi, en toute logique, dans la salle. Grincements de dents, cris d’effroi, fauteuils qui claquent, et notre voisin (un grand gaillard canadien en maillot de hockey) qui a passé toute la projo agrippé aux accoudoirs… Pendant le dernier quart d’heure, rebelote, mais avec, à la place du mouvement de panique, une symphonie de reniflements et de kleenex froissés. Alors qu’au petit matin, on découvrait un Paul Thomas Anderson totalement libéré de l’ombre écrasante de ses idoles (Scorsese, Altman, Kubrick), on avait rendez-vous l’après-midi avec un héritier autoproclamé de Spielberg (The Impossible est bourré de citations du maître, des Dents de la Mer à Empire du Soleil). Le genre de chassé-croisé qui laisse de grosses marques rouges sur les joues.Bande annonce : Frédéric Foubert
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Toronto - The Impossible : le tsunami d'émotions de Juan Antonio Bayona
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